En raison des incompréhensions et des difficultés dans l’application des dispositions de la loi de finances 2023 instituant cette taxe, les entreprises par la voix du Gicam sollicitent la mise en place d’un groupe de travail secteur privé gouvernement qui définira des modalités d’application desdites dispositions.
Depuis plusieurs mois, le ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (Minefop) appelle les entreprises employant la main-d’œuvre étrangère à se conformer à la loi camerounaise. Parmi les exigences à respecter par les entreprises figure l’acquittement des frais de visa sur les contrats des travailleurs étrangers. Il s’agit d’une taxe qui a été instituée par la loi de finances 2023, précisément l’article 22. Cette disposition fixe le prélèvement à 2 mois de salaire brut pour les travailleurs non africains et 1 mois pour les travailleurs africains. Le Minefop constate cependant que peu d’entreprises s’acquittent de ces frais.
De leur côté, les entreprises pour la plupart disent éprouver des difficultés à appliquer cette disposition de la loi de finances, quoique de bonne foi. Leurs plaintes ont été recensées par le Gicam il y a deux semaines qui a par la suite saisi le ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle pour une rencontre à Douala avec les opérateurs économiques. Le 20 novembre dernier donc, Issa Tchiroma Bakary était au siège du Gicam à Douala. Des échanges avec les chefs d’entreprises, il ressort que les employeurs font face à plusieurs blocus dans leurs démarches pour le paiement desdits frais.
Le problème d’interprétation de la loi est cité comme l’obstacle majeur. Il y a par exemple l’absence de texte d’application qui fixerait sur les délais de traitement de dossiers, la constitution des dossiers, le délai de traitement, les modalités de paiement, etc. Car pour d’aucuns, il faut payer par la Campost et pour d’autres par le Minefop etc. Une circulaire du ministre de l’emploi tient lieu de référence mais reste floue selon les chefs d’entreprises.
Les frais de visas ne prenant pas en compte les contrats de court terme, soit moins de 3 mois, les entreprises se plaignent de débourser le même montant quelle que soit la durée du contrat. Ce qui, selon elles, remet en cause le caractère équitable de ce traitement. Autre chose, « aucun remboursement ou compensation n’est envisagé dans le cas de l’annulation par le travailleur d’un contrat dont les frais de travail ont été réglés. Et au cas où un autre travailleur est engagé, il n’y a pas de compensation entre un contrat qui n’a pas été exécuté et un nouveau contrat », souligne Aline Mbono, directrice exécutive du Gicam.
Le Gicam et ses adhérents ont ainsi proposé la mise sur pied d’un groupe de travail constitué des représentants du secteur privé, du Minefop et du ministère des Finances. Ce groupe de travail devra formuler des propositions pour faciliter la compréhension de la disposition règlementaire et sa mise en œuvre. On devra par exemple être fixé sur l’assiette, les modalités de calcul et de collecte etc. Le Gicam sollicite également que la circulaire du Minefop soit remplacée par un arrêté. Dans le même temps, renforcer les compétences des entreprises sur l’utilisation de la plate-forme trésor pay mise sur pied par le Minfi pour la collecte des recettes non fiscales.
Réactions
Célestin Tawamba, président du Gicam
« Nous espérons que cette plateforme pourra se mettre en place rapidement »
« Nous avons, depuis la mise en place de cette loi qui était importante pour le financement de la formation professionnelle, éprouvé un certain nombre de problèmes dans la mise en œuvre des dispositions qui pourraient dénaturer la loi elle-même. Nous avons de commun accord avec le ministre pensé qu’il est question de mettre en place une plate-forme entre le secteur privé, son département ministériel et le ministère des Finances pour qu’on puisse trouver des solutions pour rendre efficace la mise en œuvre de cette loi. Nous espérons que cette plateforme pourra se mettre en place le plus rapidement possible pour pallier toutes difficultés que les entreprises rencontrent dans la mise œuvre. Il est donc question pour nous d’interpeller les secteurs, un certain nombre de communautés qui ne paient pas les taxes sur les visas de se mettre à jour. Il n’est pas question non plus d’avoir une loi qui soit punitive et qui punit ceux qui sont de bonne foi. C’est pourquoi nous avons besoin de mettre en place cette plateforme de concertation ».
Issa Tchiroma Bakary, ministre de l’Emploi
« Nous allons voir les aspects de cette loi qui méritent d’être revisités »
Le président du Gicam s’est toujours plaint que la main-d’œuvre que nous mettons à sa disposition ne correspond pas à ses besoins du fait de l’absence de formation professionnelle. Le président du Gicam a salué la mobilisation de ces fonds dont l’objet est la construction des centres de formation professionnelle. Je valide ce qu’il a dit, c’est à dire l’impérieuse nécessité pour les membres du gouvernement, tous les acteurs qui contribuent à la mise en œuvre de cette loi d’un côté et de l’autre le Gicam avec tous ses experts ; qu’on se retrouve autour d’une table pour voir quels sont les aspects de cette loi qui méritent d’être revisités afin de la rendre beaucoup plus faisable. Et j’ai promis au président que cette rencontre aura lieu le plus rapidement possible. Mais en attendant, la loi reste la loi, elle reste applicable aussi longtemps qu’une autre loi ne sera pas venue pour modifier une disposition et une autre. La deuxième information, il y a beaucoup d’étrangers par dizaine et dizaine de milliers qui sont ici au Cameroun qui ne contribuent en rien à la formation et même à la marche de notre nation. La responsabilité aujourd’hui est de porter à leur connaissance. Il n’est pas question quel que soit ce qu’il nous en coûte de brader un seul aspect de notre souveraineté. Les étrangers qui sont au Cameroun doivent se conformer aux lois et règlements en vigueur. Jusqu’à présent ils se taisent. Mon département est en train de s’organiser pour aller les chercher là où ils se trouvent. Nous les obligeons à obéir, ou ils quitteront notre nation conformément aux dispositions de la loi et de la réglementation en vigueur. »