Secteur de l’électricité: Entre Eneo et l’Etat, le cercle vicieux de la dette

Si l'entreprise Eneo reconnaît que la dette validée par l'Etat a été apurée à hauteur de 329 milliards de FCFA au 20 décembre 2023, elle réclame encore 266 milliards de F CFA au titre des arriérés relatifs à la subvention de la consommation des ménages et aux factures de l'éclairage public.

directeur général d'Eneo à gauche et le ministre camerounais des Finances à droite

Au mois de janvier, l’Etat, par la voix du ministre des Finances, a annoncé qu’il a réglé sa dette due à Eneo. Conformément au décompte consensuel réalisé par le membre du gouvernement, l’énergéticien camerounais et l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel), 109,9 milliards de FCFA ont été payés entre le 1er janvier et le 20 décembre 2023. Soit 28 milliards FCFA au titre de la consommation publique d’électricité ; 31,9 milliards FCFA représentant la compensation tarifaire (subvention au consommateur supportée par l’État) ; 14 milliards FCFA au titre des remboursements de la TVA et 5 milliards FCFA de travaux remboursables. A cela, Yaoundé dit avoir adjoint une seconde enveloppe de 30 milliards FCFA en décembre 2023, représentant la dette partielle de certaines entreprises publiques notamment Alucam (17 milliards), CDC (4,8 milliards), CICAM (2,2 milliards), Camwater (5,6 milliards). Ce paiement additionné à d’autres versements effectués entre 2021 et 2023, porte à 329 milliards de Fcfa, le total des sommes versées à Eneo par l’Etat, qui prétendait à ce moment avoir soldé la totalité de sa dette due au concessionnaire de la production, de la distribution et de la vente de l’énergie électrique au Cameroun. Précisant par ailleurs que des vérifications méticuleuses ont permis de déceler un excédent de 16 milliards de FCFA.

Réserves

Du côté d’Eneo, les informations du gouvernement sont corroborées par une source au sein de l’entreprise contactée par Defis Actuels, qui émet cependant quelques réserves concernant un éventuel surplus de paiement. A en croire cette dernière, le procès-verbal relatif aux paiements susmentionnés  signé le 20 décembre 2023, porte sur un état financier arrêté au 31 août 2023.  «On a arrêté au 31 août 2023, en disant voilà ce que l’Etat doit et on a considéré les paiements additionnels que l’Etat a fait jusqu’au 20 décembre 2023. Est-ce que vous pensez sérieusement que l’Etat n’est pas suffisamment attentif  à ses deniers publics et donne plus d’argent à Eneo qu’il ne mérite ? Moi je ne pense pas» a-t-elle indiqué. Toutefois, «ce que dit le ministère des Finances est vrai. Parce qu’au 20 décembre, la dette validée qu’Eneo réclame au 31 août, a été payée. Entre le 31 août 2023 et le 20 décembre, l’Etat a continué à faire des avances à Eneo qui ont représenté 14 ou 16 milliards», a-t-elle ajouté.

Eclairage public et compensation tarifaire

Expliqué ainsi, la situation de la dette entre l’Etat du Cameroun et Eneo semble avoir retrouvé la voie de l’apaisement. Que nenni ! D’après le distributeur exclusif de l’électricité au Cameroun, il subsiste des arriérés d’un montant de 266 milliards, qui doivent au préalable être validés par l’Arsel avant l’enclenchement d’un processus d’apurement. « Quand on dit dette validée, cela veut dire qu’il y a une dette qui n’est pas validée. Quel est le montant de cette dette non validée ? 266 milliards», révèle notre source. A en croire cette dernière, les discussions achoppent sur la compensation tarifaire et l’éclairage public.  Pour le premier point, tel que l’explique notre interlocuteur «On a une dette qui est liée à la compensation tarifaire. C’est-à-dire qu’Eneo investi dans les infrastructures et autres, le régulateur reconnait ces investissements, puis rémunère Eneo de ces investissements. Tant que le régulateur n’a pas reconnu les investissements d’Eneo, il ne les paye pas. Mais ce n’est pas parce que le régulateur n’a pas reconnu les investissements d’Eneo que ces derniers n’existent pas. Ce n’est pas parce que le régulateur n’a pas reconnu les investissements d’Eneo qu’Eneo n’est pas fondé à réclamer le paiement de ces derniers» précise-t-elle.

En ce qui concerne l’éclairage public, dont la facture impayée s’élève à près de 60 milliards de Fcfa, selon des chiffres dévoilés par Eneo, le point de discorde réside sur les moyens de comptage servant à mesurer l’électricité qui a servi à alimenter les points lumineux qui éclairent les voiries. «Le problème qu’on a aujourd’hui c’est que cette consommation est estimée. Puisqu’on pas des points de comptage, puisqu’on n’est pas sur un réseau d’éclairage public orthodoxe. Évidemment quand on fait des estimations, ça donne lieu à des discussions. Est-ce que les caractéristiques et les paramètres qui ont été retenus pour faire ces estimations sont partagés par tout le monde? Le régulateur a considéré que les hypothèses qui ont été retenues par Eneo, n’étaient pas en accord avec les paramètres que lui il prenait en considération. Ce qu’il a fait, c’est qu’il a dit que tant que pas d’accord, on ne vous paie pas», rappelle l’entreprise.

Afin de rendre ses prétentions un peu plus crédibles, Eneo a engagé un consultant qui a réalisé un inventaire. Ce dernier a, selon l’entreprise, sillonné les rues de Douala et de Yaoundé, répertoriant les lampes allumées toute la nuit, leurs caractéristiques en fonction desquelles il a évalué leur niveau de consommation. Ledit inventaire qui a été signé par les super maires de ces deux villes est en attente de validation par l’Arsel.

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