Pipeline Tchad-Cameroun : Paul Biya joue la carte du capitaine du navire, pour le compte de Ndjamena

La nomination d’Harouna Bako laisse croire que le président camerounais veut prendre le contrôle du business et poursuivre l’assainissement de ses relations avec Ndjamena.

Paul Biya aux commandes comme au début du projet

Dans un décret présidentiel rendu public ce 4 juillet 2023, le président de la République du Cameroun a porté Harouna Bako à la Direction générale de la Cameroon oil transportation company (COTCO). A la suite du Conseil d’administration tenu en matinée. Paul Biya met ainsi un terme au bail à peine engagé de Nicolas de Blanpré qui a été porté à la tête de l’entreprise le 2 juin dernier. L’homme nommé par Savannah Energy, la compagnie britannique qui revendique avoir racheté les parts d’Exxon Mobil dans l’actionnariat de la COTCO, n’aura passé qu’un mois à la tête de l’entreprise qui gère la partie camerounaise duPipeline Tchad-Cameroun. Le Conseil d’administration de COTCO a confié au Camerounais les rennes de la compagnie. Le magistrat de formation sera secondé par Haoua Daoussa Deby, jusqu’ici représentante du Tchad à COTCO et ancienne directrice générale adjointe de la Société de raffinage de Ndjamena.

Aussitôt, Mahamat Idriss Deby Itno, le président du Conseil militaire de transition tchadien, a salué cet acte par un tweet dans lequel le numéro un tchadien écrit que « le processus de nationalisation arrive à son terme. Souverainement». En clair, l’acte du conseil d’administration entériné par le président camerounais épouse les plans de Ndjamena dans ce dossier. Parlant à n’en point douter de l’ex-Esso décidée en mars 2023. Esso Pipeline Investments Limited (EPIL) étant le repreneur des actifs d’ExxonMobil que Savannah dit avoir rachetés. Une transaction que le Tchad n’a jamais admise et a fini par révoquer les administrateurs de Savannah et nationaliser la COTCO. Conforté par la Commission de la CEMAC qui l’a autorisé depuis mi mai dernier, à acquérir les actifs de Petronas Carigali Chad exploration & Production Inc via la Société des hydrocarbures du Tchad (SHT). Ce après l’avis conforme de la Commission de la concurrence communautaire qui était bloqué par la signature du Cameroun. Un des points de crispation des relations entre les deux pays voisins.

Harouna Bako, l’homme de la paix?

Fin de tensions diplomatiques

Et de fait, la nomination d’Harouna Bako à la tête de la COTCO survient dans un contexte marqué par une de l’acquisition des actifs de sortie de crise diplomatique entre le Cameroun et le Tchad. Au sujet de la gestion des actifs de l’ex-ExxonMobil dans l’actionnariat de COTCO ; et de l’affaire Petronas. Au plus fort des tensions, le Tchad avait rappelé son ambassadeur au Cameroun. Après que la SNH ait décidé de conclure un pacte actionnarial avec Savannah Energy dans COTCO, intégrant ainsi l’entreprise britannique que Ndjamena considère comme une nébuleuse dans laquelle des Camerounais détiennent des intérêts. S’en sont suivi des négociations entre Yaoundé et Ndjamena, avec une visite du Secrétaire général de la présidence de la République (SGPR) du Cameroun, puis la réciproque le 19 juin 2023. Au sortir de l’audience avec le président camerounais, Gali Ngothé Gatta avait indiqué être venu rencontrer le président camerounais pour « une bonne cogestion [du pipeline Tchad-Cameroun] et une avancée qui ne permette plus les dissensions que nous avons connues dans le passé ». Par la suite, le pays de Paul Biya lève le pied et laisse la STH acquérir les actifs de de Petronas Carigali Chad Exploration & Production inc. Le Cameroun était le seul pays de la CEMAC qui n’avait pas encore accordé sa non objection dans ce deal. Du coup, le Tchad devenait actionnaire majoritaire de Cotco, avec 53,77% des parts.

La réaction du président tchadien à la nomination d’Harouna Bako

Le haut représentant de Mahamat Idriss Deby Itno a retrouvé son poste diplomatique à Yaoundé. L’homme fort de Ndjamena a ensuite nommé de nouveaux dirigeants à Savannah ; alors qu’à Yaoundé, Paul Biya a dû intervenir dans le conflit entre Adolphe Moudiki le directeur général de la Société nationale des hydrocarbures (SNH) et Ferdinand Ngoh Ngoh le SGPR, en maintenant le représentant du ministère des finances (MINFI), Judith Menguélé au Conseil d’administration de Cotco. Celle-ci ayant choisi de soutenir les intérêts du Tchad, refusant ainsi de s’aligner sur les positions de la SNH qui elle, défendait la cause de Savannah au Conseil d’administration du 24 mai dernier à Paris. Avec l’intention de densifier sa participation dans l’actionnariat de Cotco. Or Savannah est une « nébuleuse » aux yeux du Tchad qui tient à l’évincer de la gestion du pipeline.

La nomination d’Harouna Bako à la tête de Cotco est une suite logique des positions déjà engagées par Judith Meguele, qui le 8 juin déjà, avait maintenu Judith Menguele comme représentante du Minfi au conseil d’administration de Cotco. Il est donc fort probable que la participation du Cameroun dans le capital de COTCO soit améliorée très bientôt dans cette cogestion. Le Tchad détenant pour l’instant avec 53,77% des parts. Tout en sauvant la « souveraineté » du Tchad.

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