Bien avant sa conclusion prévue en 2026, le gouvernement fait montre d’un certain scepticisme concernant le Plan intégré d’import-substitution agropastoral et halieutique pour la période 2024-2026. Ce pessimisme assumé concerne surtout la culture du blé, qui est, depuis 2022, au centre d’une politique concrète de relance. En effet, afin de réduire la dépendance du Cameroun aux importations de cette spéculation, l’Institut de Recherche Agricole pour le Développement (Irad) fait depuis quelques années des tests sur ses différentes variétés, pouvant être cultivées au Cameroun. Ces essais ont eu lieu dans les régions du Nord-Ouest et de l’Adamaoua (Wassandé), où l’Irad a lancé les premiers champs semenciers. Selon des données du ministère de l’Agriculture et du Développement rural (Minader) qui figurent dans le Piisah, la production actuelle des champs pilotes de Wassandé est de 45 tonnes. Quant aux champs aménagés dans la région du Nord-Ouest, leur production culmine présentement à 900 tonnes, soit un total de 945 tonnes. Le gouvernement envisage également d’aménager d’autres champs semenciers dans les régions de l’Ouest (Menoua, Ndé, Koung-Khi, Noun, Bamboutos), de l’Extrême-Nord (Mayo-Tsanaga), du Centre, de l’Est, du Sud et du Nord, pour des volumes de production globaux projetées à 225 000 tonnes relativement à une période qui n’a pas été définie. Malheureusement, ces projections font dire au gouvernement «qu’en dépit des mesures prises pour la relance de la production du blé au Cameroun, la production envisagée reste largement en dessous des 900 000 tonnes nécessaires pour satisfaire la demande», peut-on lire dans le PIISA.
A en croire l’Etat du Cameroun, ces résultats mitigés sont dus à l’insuffisance du matériel végétal à haut rendement, l’accès difficile à la terre, la raréfaction et la faible qualification de la main d’œuvre en milieu rural, l’accès difficile aux intrants agricoles, le faible accès des producteurs aux financements, le caractère rudimentaire et obsolète des équipements de production pour les exploitations familiales. Comme alternative, l’Etat du Cameroun propose la substitution progressive de la farine de blé, principal substrat entrant dans la fabrication du pain et d’autres denrées très prisées par les camerounais, par des farines issues de la transformation des tubercules telles que le manioc et la patate, «qui présentent des meilleures perspectives de production», argue-t-il. A titre d’illustration, les simulations réalisées dans le cadre du Pisaah indiquent que pour la période 2023-2025, «il est attendu une production 195 750 tonnes de farines de manioc et 24 525 tonnes de farine de patate», contre «2 856 tonnes de farine de blé». Pour atteindre ses objectifs de production, le Piisah préconise, la promotion des unités de production des farines locales, l’identification et l’accompagnement des organisations de producteurs de farines locales, le renforcement des capacités techniques, organisationnelles et managériales des acteurs, l’organisation des campagnes de sensibilisation des utilisateurs de la farine de blé à l’incorporation des farines locales dans leurs produits.
Pour mémoire, le volume des importations de blé est passé de 61 800 tonnes en 2017 à 966 400 tonnes en 2021, soit une augmentation de 42%. Au cours des 5 dernières années, les importations de blé ont coûté environ 839,6 milliards de Fcfa, d’après des chiffres du Commerce extérieur du Cameroun. En 2022, le Cameroun a importé environ 920 000 tonnes de blé pour un montant estimé à 260 milliards de FCFA.