« Depuis plusieurs années, le Cameroun traverse plusieurs crises, sans que le régime en place n’y apporte des solutions concrètes ». Tel est le diagnostic que vient de faire une franche de l’opposition camerounaise et une partie de la société civile qui entend former une coalition afin d’assurer la transition politique pacifique et résoudre les graves crises que traverse le Cameroun. Pour ce faire, le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto l’un des pionniers de cette initiative a engagé des pourparlers il y’a quelques jours avec des partis politiques et des acteurs de la société civile. Joint au téléphone pour qu’il s’exprime sur l’état actuel des rencontres que son parti a engagé, Joseph Emmanuel Ateba, chef de département de la communication du MRC a indiqué que « Nous avons rencontré plusieurs partis politiques et leaders de la société civile. D’autres rencontres sont prévues et nous allons communiquer en temps opportun sur ce qui sera décidé de commun accord ». Pour le porte-parole du parti de Maurice Kamto, « il est question pour le moment de trouver la forme à donner au mouvement, le nom et de fixer certaines conditions ». Contacté le Mouvement Stand Up for Cameroon a affirmé qu’il a eu une rencontre dimanche dernier avec le MRC. Dans le communiqué signé par Franck Essi, porte-parole de ce mouvement, l’on peut lire : « aujourd’hui, le 13 septembre 2020, les dirigeants des organisations membres de Stand Up for Cameroon ont rencontré les dirigeants du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun. Ensemble nous avons analysé la situation du pays et déterminé deux points clés : Pour que le Cameroun commence à résoudre ses nombreuses crises, la première étape est le départ du Régime Biya par la voie non-violente ; Suite au départ du régime, il est nécessaire de procéder à une transition politique pour réconcilier la nation et reconstruire les fondements de notre pays.».
Djeukam Tchameni, l’un des acteurs de la coalition de l’opposition en gestation a quant à lui précisé que « les choses sont en train de se mettre en place. On est encore en train de se parler pour arriver à des positions communes. Pour former une coalition, il faut définir de façon conjointe des objectifs, et tabler sur la stratégie, c’est-à-dire quels sont les moyens que nous allons mettre en œuvre pour atteindre nos objectifs. Bref donner un minimum d’organisation (comment rejoindre la coalition et comment en sortir, comment les décisions sont prises et diffusées) ». Selon lui, il est question d’apporter une solution aux grandes questions qui se posent au Cameroun : « la paix, et éventuellement arriver à un cadre institutionnel qui soit plus démocratique ». L’homme politique ajoute néanmoins que la coalition qui est entrain de se mettre sur pied « n’a rien à voir avec les marches du MRC annoncées à la suite de la convocation du corps électoral pour les élections régionales ».
Les chances
Si les acteurs de la coalition sont optimistes quant à l’issue de leur initiative, plusieurs experts rencontrés émettent des réserves. Le politologue Pierre Nka, estime que « C’est un message que l’opposition veut passer au gouvernement, parce qu’on est resté dans un échange qui jusqu’ici se faisait par réseaux sociaux interposés, par pic du président de la République, qui a parlé de petits partis. C’est une opposition qui veut juger sa force de mobilisation, mais qui fera face à l’administration qui pourra s’ériger en véritable obstacle. Cette coalition sera jugée soit par sa force de mobilisation, soit par sa capacité à faire entendre raison aux forces répressives. Il ne faut pas oublier que plusieurs militants du MRC ont passé près de 09 mois en prison et ont « la force de l’expérience ». Sans doute ils sont près à aller jusqu’au bout. C’est une bataille de mobilisation qui va se jouer, mais on est dans l’incertitude ». Pour le sociologue Stéphane Akoa, « C’est un appel qui ne provoquera pas l’événement attendu : dans la rue, dans les conversations attrapées au hasard d’un trajet en taxi il n’y a aucun signe de tension, d’agacement et encore moins de colère qui pourrait laisser croire que les Camerounais attendent avec impatience ce 22 septembre pour descendre dans la rue. Par ailleurs, le MRC ainsi que toutes les entités qui soutiennent ce projet n’ont aucun élu – dans les Conseils municipaux, à l’Assemblée nationale, au Sénat – et ne peuvent donc pas quantifier le nombre de citoyens qui sont favorables à leurs idées. Pour, ainsi, en déduire leur poids réel face au RDPC. Ou à tous ceux qui, pour l’heure, ont décidé d’attendre en silence que la Nature se charge de résoudre une équation … délicate. »
Joseph Essama