C’est une affaire qui fait grand bruit dans la région du Sud du Cameroun. Le 25 octobre, quatre hommes comparaîtront devant le Tribunal de Première Instance d’Ebolowa, accusés de trafic d’ivoire. Parmi eux, deux ingénieurs, un enseignant et un autre suspect non identifié. Ils devront répondre de la détention illégale de quatre défenses d’éléphants, une infraction grave dans un pays où ces animaux sont protégés.
Tout commence le 23 juillet dernier, lorsque les agents de la Délégation Régionale des Forêts et de la Faune du Sud, en collaboration avec la police judiciaire, mènent une opération coup de poing. Leurs efforts sont récompensés par l’arrestation des quatre suspects. Parmi eux, un ingénieur forestier, un ingénieur électromécanicien, et un enseignant du secondaire, trois professions qui contrastent avec le trafic illégal dont ils sont accusés.
Lors de l’opération, quatre défenses d’éléphants sont saisies. Ces objets, issus du braconnage, symbolisent un commerce de plus en plus inquiétant dans la région. Le Sud-Cameroun est en effet une zone à haut risque pour les éléphants, les trafiquants y sévissent régulièrement. Rien qu’en août, 15 défenses d’éléphants ont été interceptées à Ambam, tandis qu’en 2021, ce sont 120 défenses qui y avaient été saisies. Djoum, autre ville du sud, n’est pas en reste, avec la saisie en 2017 de 216 défenses et 81 queues d’éléphants, des chiffres alarmants qui correspondent à la mort d’environ 85 éléphants.
Malgré l’interdiction du commerce d’ivoire, la demande semble toujours aussi forte, alimentant un braconnage qui continue de décimer la population d’éléphants. L’action des autorités et des organisations comme LAGA, qui assiste le MINFOF dans la procédure judiciaire, montre une détermination à freiner ce fléau. Cependant, la justice est souvent perçue comme trop clémente, les peines infligées aux trafiquants étant rarement dissuasives.
Si les quatre présumés trafiquants sont reconnus coupables, ils risquent une peine de prison pouvant aller jusqu’à 3 ans et une amende de 10 millions de FCFA, conformément à la loi de 1994 sur la faune et la flore. Cependant, une nouvelle loi promulguée le 24 juillet 2024 pourrait changer la donne. L’article 173 de cette loi prévoit désormais des peines beaucoup plus sévères, avec des peines de prison pouvant atteindre 20 ans et des amendes pouvant aller jusqu’à 50 millions de FCFA.
Cette affaire, qui est renvoyée pour comparution des parties et débats, pourrait donc marquer un tournant dans la lutte contre le trafic d’ivoire au Cameroun. Un jugement exemplaire pourrait non seulement rendre justice aux éléphants tués, mais aussi envoyer un message fort à ceux qui continuent de tirer profit de ce commerce illégal et destructeur.