Législatives et municipales 2020 : Les ratés qui ont coûté des voix à l’opposition

L’appel au boycott, projets mal ficelés, campagnes au rabais, batailles en rangs dispersés… après deux semaines de campagne, les candidats de l’opposition ont commis plusieurs erreurs qui ont profité au parti au pouvoir.

Beaucoup d’appelés, peu d’élus ! Au soir de la proclamation des résultats officiels des élections municipales et législatives qui se sont tenues le 9 février dernier, il y aura des cris de joie, mais surtout des grincements de dents au sein de l’opposition. Si certaines tendances laissent présager une légère reconfiguration au sein des conseils municipaux et de l’Assemblée nationale due notamment à quelques victoires des principaux adversaires du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (Rdpc) au pouvoir, reste que ces derniers ont multiplié des erreurs plus ou moins fatales pour le changement tant revendiqué.

Le Mrc et l’appel au boycott

Si les résultats officiels de ce double scrutin ne sont pas encore connus, de grandes tendances se dessinent. Et annoncent la « razzia » du Rdpc. Sans doute à cause du fort taux d’abstention né de l’influence du principal parti de l’opposition, le MRC, qui avait appelé au boycott de ces élections, peu de temps après le début de l’opération des dépôts de dossiers de candidature. « Le MRC appelle les Camerounais à ne pas aller voter et à rester chez eux le 9 février 2020 afin de ne pas cautionner les élections qui ne ramèneront pas la paix dans notre pays », a déclaré Maurice Kamto, rival malheureux de du président Paul Biya, libéré début octobre 2019 après avoir passé plus de huit mois derrière les barreaux, pour avoir organisé des marches visant à contester les résultats de la présidentielle de 2018. « Organiser des élections au Cameroun aujourd’hui, qui plus est des élections locales, sans avoir rétabli la paix dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, c’est donner le message que les populations [de ces régions] ne sont pas des Camerounais et, ce faisant, consacrer la partition de fait du pays », avait ajouté M. Kamto, invitant « tous les partis politiques de l’opposition, l’ensemble de la société civile, les organisations et autres forces religieuses » à boycotter ce double scrutin. Un appel qui a non seulement été bien accueilli par certains partis de l’opposition comme le Cameroon Peoples’s Parti (CPP) de Kah Wallah, des figures influentes de la société civile telles que l’avocate Alice Nkom, les militants et sympathisants du MRC, mais aussi une grande partie des citoyens inscrits sur les listes électorales qui ont vite fait de dénoncer l’organisation de ces élections, s’inquiétant de leur crédibilité, au moment où le pays est confronté à de multiples crises. Conséquence, « peu de Camerounais ont voté et le Rdpc s’est retrouvé seul dans de dizaines de circonscriptions, constate un analyste politique. Dommage pour l’opposition qui a gâché une occasion de faire reculer le parti au pouvoir aussi bien au sein des conseils municipaux, qu’au sein de l’Assemblée où le Rdpc revendiquait 148 sièges sur 180 avant ces élections ».

Projets mal ficelés

Comme à chaque élection, les différents partis de l’opposition et leurs candidats respectifs avaient chacun son projet de société selon la commune ou la circonscription concernée. Seulement, les mêmes mots (expressions) sont revenus à chaque fois. Ainsi donc, l’on a parlé de : mettre fin aux crises ; développer les localités et le pays ; protéger et faciliter l’épanouissement des populations ; améliorer la qualité de l’éducation, investissement ; créer des emplois pour les jeunes ; améliorer l’offre en électricité et en eau potable de façon régulière ; éclairer les quartiers, les villages et les villes etc. Le problème, « c’est qu’en plus d’être redondants, ces différents projets de société avec la faiblesse d’être très peu détaillés notamment en terme de faisabilité », explique P. Mang, enseignant et habitant du quartier Ekounou dans la Commune de Yaoundé IV. « Les candidats ont eu de la peine à expliquer de manière précise, comment ils entendent implémenter leurs projets, dit-il. C’est bien de promettre des forages, de l’éclairage public etc. Mais ce qu’on attend c’est de savoir : qui va financer ces projets ? A hauteur de combien ? Dans quel délai ces projets seront mis en œuvre ? Et comment la population va-t-elle pouvoir en profiter ? Ce sont des choses qui ont manqué dans les projets présentés par les candidats notamment de l’opposition qui, au final, ont donné l’impression d’aller à ces élections juste pour justifier le statut d’opposant ».

Campagne au rabais

Qui n’a pas entendu un candidat de l’opposition se plaindre de la « petite » enveloppe qui lui a été octroyée par le ministère de l’Administration Territoriale pour financer la campagne ? Tous, ou presque, ont en effet « pleurniché » sur les « faibles » sommes qui leur ont été versées. Du coup, nombreux ont opté pour une campagne au rabais. Si certains ont été aperçus qu’à de très rares occasions, d’autres par contre, ont choisi les réseaux sociaux comme principal canal pour battre campagne. Mais pour quel résultat ?

Par Arthur Wandji

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