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Lac Municipal de Yaoundé : Un site à l’abandon 5 mois après la fin de la première phase

L’état de délabrement de la clôture provisoire, les intrusions des usagers qui se livrent à des pratiques peu recommandables et dangereuses, et le retour des activités de pêche, laissent croire que cet espace ne fait pas plus partie des priorités du gouvernement qui a engagé sa modernisation afin d’en faire l’un des principaux lieu de villégiature de la capitale

Le 26 mars 2024, la ministre de l’Habitat et du Développement Urbain, Célestine Ketcha Courtès, a annoncé la fin de la première phase des travaux d’aménagement du Lac Municipal de Yaoundé. Cette première étape, inscrite dans un ambitieux programme de modernisation des villes initié par le chef de l’État, devait redonner vie à cet espace longtemps laissé à l’abandon. Selon les informations relayées à l’époque par le ministère de l’Habitat et du Développement Urbain (Minhdu), les abords du lac ont été aménagés afin de permettre aux habitants de la ville de Yaoundé d’effectuer des promenades aux alentours.

Ses eaux ont été assainies et on annonçait avec imminence, la pose des lampadaires sur le pourtour de cette étendue d’eau pour faciliter les marches piétonnes nocturnes. Sur le terrain, certains de ces travaux ont été réalisés. Toutefois, au lieu de devenir l’attraction principale de la ville, le lac municipal de Yaoundé revêt progressivement le visage hideux qu’il arborait il y a encore quelques années. Les lampadaires, censés éclairer les allées piétonnes pour permettre des promenades nocturnes, sont inexistants, tout comme la clôture de sécurisation du site, lais sant le lac exposé aux intrusions.

COMPORTEMENTS DÉGRADANTS ET DANGEREUX

Raymond M., un habitant de Yaoundé, raconte avoir été témoin d’une scène déplorable le 30 août 2024. Alors qu’il passait devant le lac, il a vu plusieurs personnes se livrer à l’expulsion de matières fécales dans ses eaux. Quelques jours auparavant, il avait également observé des écoliers tentant de se baigner dans cet étang, un comportement dangereux qui a été interrompu par des passants soucieux de leur sécurité. En l’absence de clôture, le lac est devenu un lieu où tout le monde peut entrer librement, sans contrôle, et les scènes de pêche au filet par des hommes en pirogue sont devenues monnaie courante.

Ces comportements ne sont pas seulement des actes isolés, ils reflètent un problème plus profond dans la gestion et la protection de cet espace que le gouvernement voulait transformer en un symbole de modernité. En effet, la réalité contraste fortement avec les déclarations optimistes du ministère de l’Habitat et du Développement Urbain. Bien que la première phase des travaux ait été officiellement déclarée terminée, la mise en œuvre effective des infrastructures nécessaires pour rendre le site fonctionnel est loin d’être accomplie.

En outre, Le restaurant qui s’affiche fièrement aux abords du lac attend toujours la mise en place de commodités qui doivent permettre son lancement. En visite sur le site il y a plusieurs mois, Célestine Ketcha Courtès a prescrit la correction en urgence des manquements susmentionnés. Cependant, les premiers coups de pelle se font toujours attendre

PROBLÈMES FINANCIERS

 Le retard accusé dans la réalisation de ces travaux complémentaires est en partie attribué à des problèmes d’acquisition de matériel. Le restaurant, qui devait être l’une des principales attractions du site, n’est toujours pas équipé. Selon Arnaud Philippe Ndzana, coordonnateur de l’unité opérationnelle du projet de valorisation du lac municipal de Yaoundé et de la vallée de Mingoa, «le projet du lac tel qu’il a été conçu n’avait pas les équipements du restaurant (tables, chaises et autres).

 C’est l’acquisition de ces équipements qui est en cours à la Communauté urbaine de Yaoundé et c’est au bout de cette acquisition qu’on devrait pouvoir ouvrir le site pour accueillir les usagers». Cette acquisition de matériel est retardée par des procédures administratives complexes. Le mobilier nécessaire, en grande partie importé, nécessite un délai supplémentaire pour arriver à Yaoundé.

Pour pallier cette situation, le ministre de l’Habitat et du Développement Urbain a suggéré une solution intermédiaire, consistant à louer temporairement certains équipements pour permettre l’ouverture du site au public. Cependant, cette solution reste à l’étude, et les habitants de la capitale doivent encore patienter avant de pouvoir profiter pleinement des installations promises.

«C’est une question de procédures maintenant, pour pouvoir acquérir les équipements. S’ils sont importés, ça prendra un peu de temps mais tout va être fait pour que ça se fasse vite. Le ministre de l’Habitat et du Développement Urbain a souhaité voir une solution intermédiaire mise sur pied même par location de certains équipements pour commencer. Donc nous sommes en train d’explorer cette alternative qui permettrait d’ouvrir dans les meilleurs délais le site sans attendre ce qui pourrait être importé.», a ajouté Arnaud Philippe Ndzana.

QUID DE LA PHASE II

 En attendant, les négociations sont en cours pour confier l’exploitation du site à un opérateur privé, une décision qui devrait permettre une meilleure gestion de cet espace une fois les équipements installés. Toutefois, l’ampleur des retards ne se limite pas à l’ouverture du restaurant. La deuxième phase du projet, qui prévoit la construction de deux autres restaurants, d’un centre nautique, d’un aquarium, et d’un hôtel cinq étoiles, semble avoir été renvoyée à une date indéterminée. «Nous n’avons pas encore de visibilité sur ce sujet», avoue Arnaud Philippe Ndzana. «C’est pour ça qu’on essaie de mettre un peu plus d’efforts pour une phase intermédiaire qui permettrait de compléter ce qui a été fait avec d’autres agréments tels que les jeux d’enfants, les pédalos dans le lac, des petites choses comme ça qui peuvent se faire facilement», a-t-il ajouté.

Pis encore, le gouvernement camerounais ne semble pas pressé d’injecter des fonds dans le second versant du projet de valorisation du lac municipal de Yaoundé et de la vallée de Mingoa. En effet, ce dernier ne figure ni dans la liste des projets d’investissement par région à réaliser par le gouvernement en 2024, ni dans le Document de programme d’investissement prioritaire (PIP) 2024- 2026, qui sert de feuille de route pour les projets prioritaires du pays sur une période de trois ans.

Le lac municipal de Yaoundé, censé incarner le renouveau urbain de la capitale, reste donc un projet inachevé. Les habitants, qui espéraient voir en cet espace un lieu moderne et convivial, doivent pour l’instant se contenter d’aménagements partiels. Le chemin vers la valorisation complète de ce site semble encore long, ponctué d’obstacles administratifs et financiers.

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