Les statistiques mises à jour par le ministère des Mines de l’Industrie et du Développement Technologique (Minmidt) révèlent qu’à date, le Cameroun a accordé 128 permis de recherche à 62 sociétés minières. Dans le détail, 59 permis ont été accordés à des entreprises pour l’exploration de gisements aurifères, 31 pour le rutile, 16 pour le fer, quatre pour la bauxite, huit pour le nickel/cobalt, cinq pour le calcaire, quatre pour le cuivre et un dernier pour l’étain. Si certaines de ces autorisations remontent à près de 10 ans, paradoxalement, tout ce potentiel reste encore faiblement exploité et ne contribue qu’à moins d’1% au budget de l’État.
Les projets avancent à pas de tortue
A titre d’illustration, le niveau de réalisation des 59 projets de recherche d’or varie entre les travaux de forage, la réalisation des puits, la cartographie géologique et géochimique, le prélèvement et l’analyse des échantillons. Si l’on s’en tient aux données fournies par le Minmidt, 10 de ces projets attendent encore la phase de démarrage. Au-delà de ces constats, il est important d’ajouter et de préciser que le plus inquiétant encore c’est que deux permis d’exploration ont été accordés pour des gisements aurifères localisés à Bengoubou et Mbitom dans l’Adamaoua, mais aucune information relative aux entreprises qui ont bénéficié de cette autorisation de recherche encore moins sur la consistance des travaux qui auraient pu être menés sur le site, n’est disponible. Si la situation décrite plus haut est vraie pour l’or, elle s’applique également au gisement de rutile. En effet, à date, le niveau des travaux de recherche effectués par les 13 entreprises qui ont bénéficié d’un permis d’exploration pour ce minerai varie entre la réalisation des forages et des puits et la cartographie géologique. Pour les 16 projets de fer, les entreprises sont, pour la quasi-totalité, encore occupées à réaliser les cartographies géologiques et géochimiques. Même chose pour les projets d’exploration puis d’exploitation de bauxite, de cuivre et de calcaire.
Problèmes fonciers et financiers
A en croire Fuh Calistus Gentry, ministre par intérim des Mines de l’Industrie et du Développement Technologique (Minmidt), cette situation est fille de l’inconsistance financière des entreprises bénéficiaires des permis d’exploration susmentionnés. Cependant-le membre du gouvernement affirme que certains de ces contrats sont en cours de restructuration. «Tous les éléments sont maintenant réunis pour ce démarrage effectif. Je peux vous assurer qu’il y avait des projets pas très bien structurés. Il fallait les restructurer. Beaucoup de permis étaient dans les mains des juniors minières qui n’ont pas les capacités techniques et financières pour mener à bien de tels projets. Le président de la République a donné des instructions. On a pris des mesures adéquates pour que les hautes instructions de la hiérarchie soient respectées», a-t-il déclaré.
La restructuration dont parle Fuh Calistus Gentry concerne également la levée d’autres obstacles non financiers, qui plombent l’exécution des projets miniers. Il s’agit notamment des litiges fonciers. «Nous avons mis en place un comité de suivi. Ce comité travaille avec tout le monde. Par exemple à Kribi, on a eu beaucoup de problèmes relatifs aux titres fonciers. Notamment le chevauchement du terrain du Port de Kribi avec les titres miniers. Notre rôle, c’est voir avec les concernés pour que tous ces défis soient relevés. Nous sommes bien accompagnés dans ce processus par différentes structures», a révélé le Minmidt. Comme l’a indiqué Fuh Calistus Gentry en lisant son discours durant la cérémonie solennelle d’ouverturede la 4e édition de la Convention Internationale des Mines et Exposition du Cameroun (Cimec), les premiers effets de la restructuration vont s’observer à travers le projet d’exploitation du gisement de nickel, cobalt et manganèse de Nkamouna, dans l’arrondissement de Lomié, région de l’Est, qui va bénéficier d’une recapitalisation de 42,5 milliards de FCFA, selon nos confrères d’EcoMatin.
Notons que cette dernière intervient au moment où l’entreprise américano-canadienne Geovic Mining Corp, qui détenait depuis 2003 un permis d’exploitation pour ce gisement a cédé l’ensemble de ses actifs à l’entreprise américaine Phoenix Mining, filiale de Cloudbreak Holdings. En outre, l’arrivée de ce nouveau partenaire qui s’est entouré du chinois Sinohydro pour la construction de la mine et Xing Hai pour l’usine d’enrichissement, a accéléré la résolution des dissensions qui couvaient entre la Société nationale d’Investissement (SNI) et Geovic Mining Corp, tous deux uniques actionnaires de Geovic Cameroun (Geocam), la société de projet mise sur pied par l’ancien détenteur du permis d’exploitation.
Paul Tjeg
Professeur Fuh Calistus Gentry, ministre par intérim des Mines de l’Industrie et du Développement Technologique
» Pour les retombées de la Cimec, nous aurons des réponses appropriées »
Nous avons changé la nomenclature de conférence internationale à Convention internationale. Parce que notre continent est connu pour les conférences. Nous avons souhaité que le Cimec 2024, soit un endroit où les gens se rencontrent, dans une atmosphère moins protocolaire qui va permettre d’avoir des échanges qui vont aboutir à des résultats visibles. C’est ça que les camerounais attendent. Quand on va nous demander quelles sont les retombées des assises de Yaoundé, Je suis sûr que j’aurai des réponses appropriées à leur fournir. On a enregistré plus de 50 nationalités qui ont participé à cet evènement. C’est aussi l’occasion de rappeler qu’un communiqué conjoint a été signé hier avec l’union européenne, en prélude à la signature d’un MOU en vue de développer la stratégie minière nationale du Cameroun. Afin que le Cameroun, à travers la Convention Internationale des Mines et Exposition du Cameroun (Cimec) se positionne comme le centre des négociations financières et pourquoi du développement de la politique minière en Afrique.
Jean-Marc Châtaigner, Ambassadeur, Chef de Délégation Union Européenne en République du Cameroun et pour la Guinée Équatoriale.
«Il faut créer de la valeur ajoutée sur place»
Il ne s’agit pas seulement d’exploiter les minerais critiques. Mais il s’agit aussi de s’assurer que de la valeur ajoutée soit créée sur place, que les premières industries de transformation existent localement. Il faut aussi s’assurer que la région toute entière bénéficie de l’exploitation des gisements de minerais critiques. Il faut que les infrastructures qui doivent être construites soient utiles aux populations. Je pense notamment aux chemins de fer, aux routes, à l’énergie hydroélectrique ou solaire.