Commerce international : l’Afrique, orpheline de la mondialisation

Dans l'édition 2023 de son rapport annuel sur le commerce, l’OMC note que l'Afrique n'a pas fait de progrès ni dans son inclusion dans le commerce mondial, ni dans l'accélération du commerce intrarégional, moins encore dans la réduction de la pauvreté grâce au commerce.

Qu’a apporté, l’expansion du commerce international à l’Afrique en terme d’inclusion au commerce international ou simplement de réduction de la pauvreté ? Très peu, constate l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) dans son rapport 2023. Ce rapport a été présenté le 12 septembre 2023 au siège de l’organisme à Genève. On en retient sur le plan global que malgré l’elan protectionniste que l’on peut constater, le commerce mondial a continué à croître, y compris entre les blocs géopolitiques opposés. « Les discours sur la démondialisation sont encore loin d’être étayées par les données. Le commerce bilatéral entre la Chine et les États-Unis a atteint un niveau record en 2022 », rassure Raph Ossa, l’économiste en chef de l’organisation mondiale du commerce. 

Si le commerce mondial se porte bien malgré quelques nuages sombre dûs aux discours protectionnistes, l’Afrique n’a qu’une part congrue du gâteau. « La part de l’Afrique dans le commerce mondial est restée stagnante et, pas plus tard qu’en 2021, près de 70 pour cent des exportations mondiales de l’Afrique étaient des produits de base. L’Afrique est également dépendante de l’importation de produits manufacturés, une combinaison qui expose le continent aux aléas des marchés internationaux des matières premières », souligne Stephen Karingi de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique. De même, souligne ce rapport de l’OMC, si le commerce a joué un rôle de catalyseur dans la réduction de la pauvreté, comme en témoignent l’augmentation de la part des exportations et la baisse des taux de pauvreté dans les économies à revenu faible ou intermédiaire, « certaines régions, comme l’Afrique subsaharienne, ont connu des progrès plus lents » peut-on y lire. « Alors que la croissance tirée par les exportations a considérablement réduit la pauvreté en Asie de l’Est et dans plusieurs économies d’Europe de l’Est, le nombre de pauvres en Afrique subsaharienne stagne depuis les années 1990 », ajoute le document. Cette stagnation de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté en Afrique reflètent en partie une croissance plus lente du commerce.

Les coûts du commerce s’avèrent plus élevés pour les économies à revenus faibles ou intermédiaires.  L’OMC estime, par exemple, que les coûts du commerce dans les économies africaines sont 1,5 fois plus élevés que dans les économies à revenu élevé.

En examinant en détail les coûts globaux du commerce, l’OMC constate que les infrastructures de transport et de communication sont deux facteurs majeurs affectant les coûts du commerce. Or ce sont justement ces deux facteurs qui manquent le plus à l’Afrique : « la réduction des coûts du commerce nécessite également le développement des infrastructures. Cela nécessite généralement des investissements importants que de nombreuses économies en développement ne peuvent se permettre », indique le World trade report 2023.

Les expert de l’OMC notent curieusement que les coûts du commerce intrarégional en Afrique sont anormalement plus élevés et entravent la croissance économique sous tous ses aspects. L’OMC estime que « les exportations africaines hors d’Afrique sont soumises à l’équivalent d’un droit de douane de 210 %, tandis que les exportations intra-africaines sont confrontées à l’équivalent d’un droit de douane de 460 %. En Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne, par exemple, les droits d’importation moyens  dans la région s’élèvent respectivement à 5 % et 7 %, tandis que pour le Marché commun du Sud (MERCOSUR), l’ASEAN, l’accord entre les États-Unis, le Mexique et le Canada ou l’Union européenne, les droits d’importation dans les régions sont inférieurs ou proches  à 1% ».

Fort de ces constats alarmants, et pour ne pas repeter les mêmes erreurs du passé qui ont confiné l’Afrique dans un statut marginal dans le commerce mondial, l’OMC formule des propositions de solutions à adopter dans le cadre de la re-mondialisation. Principalement, il s’agit de réformer les politiques commerciales pour réduire les coûts globaux du commerce, d’ouvrir l’accès aux fournisseurs étrangers dans les secteurs des infrastructures et des marchés publics, mais aussi d’améliorer la connectivité numérique pour réduire les coûts du commerce transfrontalier tant pour les biens que pour les services, en particulier pour les services commerciaux et professionnels. Une intégration commerciale régionale croissante pourrait promouvoir à la fois la performance économique globale et une intégration dans le marché mondial au-delà du commerce des matières premières, souligne l’OMC.  « Par exemple, projette l’étude de l’OMC, la mise en œuvre complète de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pourrait entraîner une augmentation supplémentaire de 29 % des exportations totales d’ici 2035. Les exportations intra-africaines pourraient augmenter de 81 %, tandis que les exportations vers le reste du monde  augmenterait également de 19 %.  Le secteur manufacturier bénéficierait particulièrement d’une réduction des barrières tarifaires et non tarifaires, avec une augmentation prévue de 62 % des exportations ».

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