Dans un communiqué publié mercredi 18 septembre 2024, Camtel attribue ces difficultés à la gestion des abonnés par «certains opérateurs », qui, selon elle, peinent à fluidifier leur trafic. La société indique que le nombre important d’abonnés de ces opérateurs engendre des congestions sur leurs réseaux, ce qui se répercute sur la qualité globale des services internet. L’entreprise publique regrette que ses concurrents préfèrent attribuer ces perturbations à la gestion du backbone qu’elle fournit, alors que d’autres facteurs doivent être pris en compte. «Certains opérateurs, du fait du nombre élevé de leurs abonnés et de l’insuffisance des actions entreprises pour la fluidité de leur trafic, se heurtent à des congestions qui dégradent la qualité de service de leurs réseaux», peut-on lire dans ce manifeste
Les préoccupations de MTN et Orange
Du côté des opérateurs privés, la qualité de la gestion de la fibre optique a souvent été mise en avant comme l’une des causes principales des dysfonctionnements. Dans une récente interview accordée à nos confrères d’Investir au Cameroun, Mitwa Ng’ambi, directrice générale de MTN Cameroon, a notamment évoqué des coupures fréquentes de la fibre, qui compliquent la fourniture d’un service stable. Elle a insisté sur le fait que ces interruptions ont un impact direct sur la capacité de MTN à répondre aux besoins de ses abonnés. En août 2024, par exemple, MTN aurait selon elle, enregistré un nombre record d’instabilités liées à la fibre. «L’un de nos défis est notre dépendance à l’égard d’un tiers pour la fibre optique afin d’assurer l’interconnectivité entre les villes. Nous constatons aujourd’hui une augmentation exponentielle des coupures de fibre dues à divers facteurs. Il est nécessaire de collaborer activement avec nos partenaires chargés de la gestion de la fibre optique afin d’en assurer la stabilité. Au mois d’août 2024, nous avons enregistré le plus haut niveau d’instabilité de la fibre optique», a-t-elle déclaré.
Malgré ces difficultés, MTN a souligné la nécessité de renforcer sa coopération avec Camtel pour améliorer la coordination opérationnelle. Ng’ambi a précisé que l’opérateur s’efforce de gérer ces défis tout en planifiant des actions pour limiter l’impact des coupures sur la qualité des services offerts. «En ce qui concerne les facteurs qui relèvent de notre contrôle, nous assurons à nos clients que des plans complets sont en place pour une amélioration continue. En ce qui concerne les facteurs externes, nous maintenons un engagement permanent avec les autorités afin de nous assurer que nous recevons le soutien nécessaire pour améliorer la qualité de nos services», a-t-elle ajouté.
Orange Cameroun, pour sa part, à travers Alain Blaise Batongue, directeur des affaires institutionnelles et réglementaires, a également soulevé des inquiétudes concernant l’état de la fibre optique. Selon lui, la gestion exclusive de cette infrastructure par un seul acteur – en l’occurrence Camtel – limite les capacités d’intervention rapide en cas de coupure. La filiale locale du géant français des télécoms Orange dit avoir recensé plus de 130 incidents au cours des trois derniers mois, certains nécessitant jusqu’à 72 heures pour être résolus. Batongue a ajouté que les réparations multiples affectent la qualité globale des services, tant pour la voix que pour les données. «Ce qui nous rend encore plus impuissants, c’est la gestion monopolistique de la fibre optique par l’opérateur historique et public, Camtel, selon la volonté du gouvernement. Les nombreuses coupures de cette fibre optique ces derniers mois sont la principale cause de cette dégradation continue, comme le reconnaît d’ailleurs le régulateur dans son communiqué. Petite illustration : au cours des trois derniers mois seulement, nous avons subi plus de 130 coupures de la fibre optique, avec des délais de rétablissement de plus en plus longs, certains pouvant durer 72 heures», a-t-il déclaré.
A en croire ce dernier, ces coupures sont souvent liées à des travaux de génie civil, mais aussi parfois à des actes de vandalisme. «Ce qu’il faut savoir, c’est que, au-delà des conséquences directes sur les consommateurs pendant la durée de la coupure, les multiples réparations entraînent aussi, de facto, une dégradation naturelle de la qualité de service pour la voix et les données», a-t-il révélé.
L’état de la fibre au cœur des débats
En réponse aux différentes critiques, Camtel a reconnu l’existence de coupures de fibre, mais en attribue les causes à des facteurs externes comme le vandalisme ou les travaux de génie civil, tout en soulignant que la société ne peut pas être exonérée de toute responsabilité. L’opérateur historique a ainsi expliqué que ces interruptions, bien qu’indépendantes de sa gestion directe, ne sont pas sans conséquence pour la qualité du service.
L’Agence de régulation des télécommunications (ART), arbitre du secteur, a d’ailleurs récemment lancé un audit pour évaluer l’état de la fibre optique nationale. Les premières observations confirment la nécessité d’améliorer la maintenance de cette infrastructure clé, qui souffre d’une dégradation progressive. L’ART a également noté que d’autres facteurs, comme l’instabilité de l’approvisionnement en énergie, contribuent à aggraver les perturbations observées sur le réseau national. « Il ressort à l’issue des contrôles effectués par les équipes de l’ART que cette perturbation est causée par une offre insuffisante en énergie électrique, telle que constatée dans leurs réseaux actuels, et la difficulté d’approvisionnement des différents sites techniques des opérateurs d’infrastructures passives en carburant, surtout dans nos grandes métropoles. D’autre part, les multiples ruptures des câbles à fibre optique sur certains segments du réseau national aggravent la situation», a souligné l’ART.
Une responsabilité partagée
Si les opérateurs se renvoient la balle sur les causes exactes des dysfonctionnements, ils s’accordent toutefois sur la nécessité d’une amélioration générale des infrastructures et des services. MTN et Orange insistent sur le besoin d’une meilleure gestion de la fibre optique, tandis que Camtel invite ses concurrents à investir davantage dans leurs propres infrastructures pour répondre à la demande croissante de connectivité. Chacun reconnaît donc que des efforts doivent être faits à plusieurs niveaux pour garantir une meilleure qualité de service à l’ensemble des abonnés du pays.