Étudiant en génie mécanique à l’École nationale supérieure des mines et des industries pétrolières, située dans la ville de Kaélé, une commune de la région de l’Extrême-Nord, le jeune camerounais Martial Bitang Sifa fait face à un défi de taille : des coupures d’électricité incessantes, paralysant les études et la vie quotidienne de toute la communauté. « Nous avons passé près de deux mois sans électricité. Les élèves ne pouvaient plus étudier le soir, et mes recherches avançaient au ralenti, » se remémore-t-il. Mais là où d’autres se résignent, Martial trouve l’étincelle de l’innovation. Il se lance d’abord dans un projet audacieux : un réchaud capable de générer de l’électricité grâce à l’effet Peltier, un phénomène physique de déplacement de chaleur en présence d’un courant électrique. Bien que prometteur, ce dispositif montre vite ses limites. Refusant l’échec, Martial retourne au laboratoire, animé par une ambition claire : concevoir une solution énergétique accessible, durable et adaptée aux réalités locales.
C’est ainsi qu’il met au point une invention révolutionnaire : un groupe électrogène fonctionnant à l’air comprimé. L’idée paraît simple, presque intuitive. « L’air est partout, il est économique et non polluant. Pourquoi ne pas l’utiliser comme source d’énergie ? » dit-il. C’est ainsi qu’il développe un prototype capable de produire 500 watts, une puissance suffisante pour alimenter les besoins essentiels en électricité. Ce projet, devenu son mémoire de fin d’études, ouvre les portes d’une carrière prometteuse.
L’ABOUTISSEMENT D’UN RÊVE
Aujourd’hui fonctionnaire au ministère des Mines, Martial a vu son projet prendre une nouvelle dimension. Avec le premier prix de la Journée Technologie Nationale 2024, assorti d’une enveloppe de trois millions de FCFA et d’un brevet, il se lance dans une nouvelle étape : rendre son invention accessible au plus grand nombre. « Nous travaillons à réduire les coûts de production pour que ce groupe électrogène soit vendu à partir de 150 000 FCFA. Cela le rendra abordable pour la majorité des Camerounais, » précise-t-il. Sa création désormais sponsorisée par l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (Oapi), a obtenu une note de 80 points sur 100 (80/100) du jury. Ce prix n’est pas son premier coup d’éclat. Martial a déjà été doublement récompensé par le Fonds Proton en 2022 et 2023 et a reçu le prix spécial du meilleur jeune talent. Chaque reconnaissance renforce sa conviction que la technologie peut transformer les défis en opportunités.
UN INGÉNIEUR PORTÉ PAR UNE MISSION
Au-delà de ses prouesses techniques, Martial est un visionnaire. Suivre les avancées en énergies renouvelables, expérimenter des projets DIY ou perfectionner son groupe électrogène, tout découle d’une même passion : apporter des solutions concrètes à des problèmes réels. « Pour moi, l’innovation n’est pas un métier, c’est une mission, » conclut-il avec détermination. Martial Bitang incarne cette génération d’ingénieurs africains prêts à façonner un avenir durable, alliant savoir-faire local et ambitions globales.