Pendant deux semaines, le Cameroun a opéré dans la discrétion la plus absolue un retour sur le marché financier international, près de 3 ans après un emprunt international fortement médiatisé. L’objet de ce retour n’a été officiellement dévoilé que mercredi dernier à travers un communiqué publié par le ministère des Finances. C’est à travers ce document que l’on a appris que le pays a de nouveau sollicité les investisseurs internationaux afin de lever des fonds qui devraient être utilisés pour financer des dépenses supplémentaires du budget de l’Etat en 2024. Une sortie qui est intervenue moins d’une semaine après que le président de la République a apporté sa caution pour la recherche de 616 milliards de francs CFA (1 milliard de dollars) par le biais d’obligations nationales et internationales. L’emprunt international du Cameroun a été un succès. Yaoundé a réussi à lever 335 milliards de FCFA. Selon l’expert financier Willy Stéphane Zogo, ce dénouement heureux est en grande partie dû à l’ingénierie financière mise en place par la délégation camerounaise, aidée par Citigroup Global Markets Ltd et Cygnum Capital Middle East respectivement agent de placement pour cette opération d’emprunt et arrangeur.
Le plus apporté par le placement privé
En effet, contrairement à la plupart des pays africains qui ont opté pour un Eurobond par appel public à l’épargne cette année, le Cameroun a préféré un emprunt privé. «Le placement privé qui a effectivement été adopté comme modalité de cette opération, sans doute en accord avec Citigroup Global Markets Ltd comme unique agent de placement et en co-arrangement avec Cygnum Capital Middle East, ne peut viser qu’un seul but : la garantie et le contrôle dans le but d’atteindre efficacement et dans les brefs délais l’objectif de la levée de fonds» at-il expliqué. A en croire ce dernier, «le placement privé ici permet à l’émetteur, en l’occurrence, l’Etat du Cameroun, de se focaliser sur des investisseurs précis préalablement identifiés sur le marché primaire et le marché gris (dans le monde financier, c’est un marché non officiel, de gré à gré, qui permet aux investisseurs d’échanger des titres avant leur cotation en Bourse, ndlr) comme ayant les capacités financières de répondre à l’offre».
Un taux d’intérêt conditionné par le marché
Au-delà du relatif enthousiasme que peut générer la réussite de cette opération d’emprunt, c’est surtout la contrepartie financière que devra payer le Cameroun qui interpelle les observateurs avertis. La question qu’ils se posent tous, est de savoir pourquoi le Cameroun a accepté des financements avec une rémunération fixée à 10,75%. A en croire des responsables de Cygnum Capital Middle East, il ne pouvait en être autrement, en raison des conditions de marché volatiles. «Il faut dire que cette transaction a été faite selon les termes les plus optimums du marché. En droite ligne avec les niveaux auxquels traitent les instruments du Cameroun qui existent aujourd’hui. Il faut aussi prendre en compte que ces niveaux de marché dépendent entièrement des taux d’intérêt en dollar, qui sont en cours aujourd’hui. C’est le lieu de féliciter l’équipe pour le travail qui a été fait auprès des investisseurs et auprès du marché», a indiqué un cadre de cette entreprise lors de la cérémonie de clôture de l’opération d’emprunt susmentionnée qui a eu lieu à Londres en Angleterre, en fin de semaine dernière.
En plus, indique Willy Stephane Zogo, le Cameroun ne prendrait pas plaisir à payer fort une dette si la liberté lui était totalement offerte. «L’obligation de liquider la dette intérieure qui se présente déjà sous forme d’arriérés comme indiqué plus haut pouvait être soldée lentement, sauf que le Fonds Monétaire International aurait recommandé un apurement plus urgent pour le bien des finances publiques. Donc, voilà la lecture qui peut justifier cette posture du Cameroun sur cette opération», souligne l’expert financier.