« Tout débat dans les médias sur l’état du président de la République est […] formellement interdit ». Le « décret » est de Paul Atanga Nji, le ministre de l’Administration territoriale (Minat). Dans un communiqué rendu public nuitamment ce 9 octobre 2024, le patron de l’organisation du territoire s’en prend à la presse privée qui relaie les informations faisant état de la mort du président de la République, diffusées le 8 octobre dernier par ABS, une chaine de télévision basée en Afrique du Sud, et détenue par des sécessionnistes camerounais. Un « fake news », selon le régime de Yaoundé. Le ministre de la Communication (Mincom) et le directeur du cabinet civil (DCC) de la présidence de la République ont commis des communiqués pour démentir cette information et tenter de rassurer l’opinion nationale et internationale que Paul Biya est vivant, sans en apporter une preuve. De quoi envenimer davantage ce qui se chuchotait seulement sous cape.
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Alors le Minat est monté au créneau pour amplifier la menace. « Le président de la République est la première institution de la République. De ce fait, les débats sur son état relèvent de la sécurité nationale », brandit-il. S’érigeant en enseignant de journalisme, sans pour autant soutenir son enseignement par des arguments juridiques. « A la suite de ces mises au point du ministre DCC et du Mincom, porte-parole du gouvernement, aucun autre commentaire ou débat ne devrait plus être cautionné, de qui que ce soit dans les médias privés en semaine ou les week-ends», indique-t-il. « Dès ce jour, je demande à chaque gouverneur de créer auprès de ses services compétents des cellules de veille chargées de suivre et d’enregistrer toutes les émissions et débats dans les médias privés et d’identifier les auteurs des commentaires tendancieux, y compris ceux qui agissent à travers les réseaux sociaux », annonce-t-il.
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Le Minat instruit les gouverneurs de régions de créer des cellules de veille devant scruter les médias audiovisuels nationaux et enregistrer, afin de traquer toute tentative de défiance à cette violation de sa mesure pourtant illégale. « Les contrevenants devront faire face à la rigueur de la loi », prévient Atanga Nji.
Ainsi, au Cameroun, la liberté d’expression, et plusieurs autres libertés sont de plus en plus embrigadées. Le ministre de l’Administration décide désormais de ce qui est permis, selon sa convenance.