La Beac maintient sa stratégie de lutte contre l’inflation

Après la reconduction, il y a quelques jours, des émissions des bons du trésor Beac, la banque centrale maintient inchangés comme l’année dernière, ses principaux taux directeurs. Cette décision a été entérinée le 25 mars 2023, lors de la réunion du Comité de politique monétaire

vue partielle du siège de la Beac à Yaoundé

«Il faut réajuster les visions, réajuster les programmes, réajuster les axes stratégiques et amorcer véritablement les réformes qui doivent  rendre résiliente notre zone Cemac». C’est ainsi que s’exprimait Yvon Sana Bangui, le 1er mars 2024, au sortir de la cérémonie d’installation du gouvernement de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac). Quelques semaines plus tard, plus précisément le 25 mars dernier, le Centrafricain a présidé sa première réunion du  Comité de politique monétaire (CPM) au cours de laquelle, cette petite étincelle de nouveauté n’a pas été ravivée. En effet, l’actuel gouverneur de la Banque centrale et ses collaborateurs ont décidé de poursuivre avec la politique monétaire restrictive en vigueur pendant les dernières années du mandat de son prédécesseur Abbas Mahamat Tolli.

Concrètement, pour la 4e fois consécutive, la BEAC maintient inchangés ses principaux taux directeurs. Ainsi, le taux d’intérêt des appels d’offres, principal outil dont dispose la Beac pour influer sur l’octroi de crédits aux banques commerciales, et le taux de facilité de prêt marginal ont été respectivement maintenus à hauteur de  5%, et 6,75%. L’institut d’émission commune aux 6 pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique (Cemac) maintient également le statu quo relativement au taux de la facilité de dépôt qui reste à 0%, de même que le coefficient des réserves obligatoires des banques maintenu à 7% sur les exigibilités à vue et à 4,5% sur les exigibilités à terme.

Faible impact des mesures de la Beac

Si l’on se réfère aux conclusions qui figurent dans le communiqué qui a sanctionné les travaux, le maintien de cette politique monétaire est motivé par la persistance des tensions inflationnistes que la Beac projette à 5,5% en 2024, largement au-dessus du seuil communautaire qui est fixé à 3%. Toutefois, ces mesures restrictives qui visent à durcir les conditions de refinancement des banques commerciales, et au final, à équilibrer les moyens monétaires par rapport à l’offre n’ont jamais permis de résorber l’inflation. En 2022,  date à laquelle la Beac a procédé au premier relèvement du Taux d’intérêt des appels d’offres et du Taux de la facilité de prêt pour lutter contre l’inflation née du conflit russo-ukrainien, l’inflation a culminé à 5,6% . Elle s’est maintenue au même niveau 1 an plus tard, et va baisser de 0,1% en 2024 selon les prévisions de la Banque centrale.

Une régression somme toute insuffisante, qui confère d’ailleurs un caractère surprenant à la décision de l’institution financière, qui reconnait elle-même le faible impact de sa politique monétaire restrictive sur la réduction de l’inflation. «La proportion de l’inflation d’origine monétaire n’est que de 20%», indiquait Abbas Mahamat Tolli, l’ancien gouverneur de la Beac au cours de la conférence de presse en visioconférence qui a ponctué les travaux du dernier CPM de l’année 2023.

Cet aveu explique vraisemblablement l’accueil mitigé réservé par les banques aux opérations d’émission des bons du trésor «Beac» adoptés le 12 décembre 2023 lors d’un comité de politique monétaire. En effet, après le relèvement successif de ses principaux taux directeurs, l’augmentation du volume de liquidité prélevé dans les banques chaque semaine (200 milliards de FCFA), et la suspension des opérations d’injection de liquidité dans le système bancaire de la Cemac, La Banque centrale a pensé à l’émission des Bons du Trésor pour combattre l’inflation en zone Cemac. En effet, l’objectif des «Bons Beac» est «d’assécher davantage les banques. La banque centrale espère que cela va se répercuter sur le coût du crédit bancaire et restreindre ainsi son accès aux agents économiques. Ce qui devrait réduire la création monétaire dans l’espace Cemac, souvent à l’origine de la hausse généralisée des prix (inflation) que la Beac entend ainsi combattre».

 Les bons du trésor toujours inefficaces

Malheureusement, après l’échec qu’a essuyé la Beac qui espérait lever 150 milliards de FCFA en février 2024 auprès des établissements de crédits de la zone Cemac, la seconde phase d’émission des bons du trésor Beac qui a été lancée le 18  mars dernier, connaît les mêmes déboires. «Les établissements de crédit n’ont pas non plus accouru autour de la deuxième. Celle-ci s’étant soldée par une offre globale de 2,5 milliards de FCFA, sur les 50 milliards de FCFA recherchés. Ce qui correspond à un taux de couverture de l’offre de seulement 5%. Mieux, une seule banque sur la cinquantaine que compte la Cemac a souscrit à cette opération», soulignent nos confrères d’Investir au Cameroun.

D’après le calendrier d’émission publié par la BEAC, deux autres opérations sont prévues à la fin du mois de mars et le 1er avril avec des titres de 14 jours de maturité, rémunérés à 2,5%. La première a été lancée le 25 mars avec des objectifs de collecte de 50 milliards de FCFA. «L’émission de bons Beac du 25 mars 2024, qui visait à réduire la liquidité bancaire pour lutter contre l’inflation, à travers une ponction de 50 milliards de FCFA dans les coffres des banques disposant de la liquidité, s’est soldée par une offre de seulement 12,5 milliards de FCFA. Ce qui représente un taux de couverture de la demande de 25%Ce taux de souscription est nettement en hausse par rapport aux deux premières opérations du même type. En effet, après avoir aligné une opération infructueuse en février 2024, la banque centrale s’est contentée d’un taux de souscription de seulement 5% lors de son opération du 18 mars 2024», rappellent nos confrères d’Investir au Cameroun.

Pour le reste,  la croissance du PIB de la CEMAC devrait s’établir à 3,6% en 2024 soutenue par une bonne tenue de l’activité non pétrolière. Les réserves de changes devraient fléchir de 2,7% à 6 699 milliards FCFA correspondant à un taux de couverture extérieure de la monnaie de 74%. Ces réserves représentent surtout 4,3 mois d’importations des biens et services contre 4,8 mois en 2023.

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