Insalubrité au Cameroun : les populations se prononcent

Selon plusieurs réactions recueillie par notre rédaction, l’incivisme des citoyens et la négligence des communes sont les principales causes de l’insalubrité dans les villes camerounaises.

Même si beaucoup de gens pensent que l’importation des produits étrangers entraîne l’insalubrité, la population camerounaise, pense que l’insalubrité est pour la plupart causée par la mauvaise éducation des citoyens et la négligence des communes. Selon elle, le manque d’éducation, de sensibilisation, de sanction, le non de collecte des ordures par les sociétés en charge, l’inefficacité du service d’assainissement, la pauvreté sont les principales causes de l’insalubrité des villes.

L’incivisme des Camerounais

Les causes de l’insalubrité des villes du Cameroun sont multiples et pourtant, l’une des raisons est évidente ; le Camerounais contemporain a certainement oublié que la place des ordures, c’est dans la poubelle ! En effet, il n’éprouve aucune gêne à jeter sur la chaussée, dans les caniveaux, sur la voie publique le sachet d’eau, la peau de banane, le mouchoir que l’on vient d’utiliser. Ensuite, les rues sont jonchées de détritus puant à mille lieues, toutes les artères sont occupées par des commerces. Le comble, c’est que lorsque ces commerçants décident de rentrer chez eux, aucun ne songe à balayer les ordures ou à en disposer convenablement. Généralement, ces ordures sont déversées sur la voie publique, dans le caniveau ou carrément dans la bouche d’égout parce qu’aucun de ces vendeurs ne dispose de poubelle. L’illustration parfaite est celles des marchés des métropoles Yaoundé, Douala et Bafoussam qui a été transformé en dépotoir géant au vu et au su de tous.

La sensibilisation

Le manque d’information ou de sensibilisation fait qu’une bonne partie de la population adopte des comportements inciviques du fait de l’ignorance et du manque de savoir-vivre ne répondant pas aux exigences sanitaires urbaines. La sensibilisation au sujet de l’insalubrité, notamment en ce qui concerne le lien entre l’insalubrité et les maladies comme la fièvre typhoïde, le paludisme, le choléra, etc. restent négligeables, tout comme la sensibilisation sur le lieu de dépôt des ordures, la collecte des taxes et le danger de déféquer à l’air libre, surtout lorsque de la poussière contenant les déchets humains séchés souffle sur la ville et que ces déchets sont ceux des personnes atteintes de choléra ou de la fièvre typhoïde. Imaginez la suite, lorsque ces poussières sont déposées sur les légumes, fruits, gâteaux, vendus dans les quartiers ou sur les marchés.

Dans les villes camerounaises, la présence des bacs à ordures ne sert pratiquement à rien aux populations. En plus de l’ignorance de la présence des bacs à ordures, il faut noter que leur usage est encore méconnu du grand public de certaines villes : certains individus l’utilisent pour y mettre de l’eau à boire ou de la farine. Le mauvais usage des bacs à ordures pourrait être considéré comme l’une des causes de l’éparpillement des ordures dans les villes du pays. Une sensibilisation sur le mode d’utilisation des bacs à ordures devrait être envisagée pour éradiquer le mal.

L’assainissement

L’inefficacité du service d’assainissement est un facteur qu’il ne faut pas négliger. Le service de collecte des ordures peut afficher une bonne volonté pour la collecte des ordures, mais si elle est inefficace, les ordures seront toujours visibles dans les marres, les espaces non aménagés, dans les rues, dans les caniveaux, etc. Les eaux usées des puisards sont quotidiennement versées sur les voies publiques, parfois drainées vers le goudron, s’ajoute l’insalubrité de la plupart des marchés où les produits alimentaires sont vendus par terre et sans couverture de protection, parfois les lieux de vente dégagent des odeurs nauséabondes. Cela montre à suffisance que le service de régulation (ou d’assainissement) est inefficace.

Un facteur qui n’est pas aussi à négliger dans l’analyse de l’insalubrité de la ville est la pauvreté. Compte tenu de la cherté de la vie, certains ménages sont incapables de se procurer des bacs à ordures, de construire des latrines modernes ou d’aménager leur devanture. L’insalubrité des villes serait d’une part due à la pauvreté. A ce facteur, s’ajoute la pression démographique : il y a de cela quelques années, certains quartiers des grandes métropoles étaient encore des villages voisins de celles-ci, distants entre 10 et 20 km ; aujourd’hui, ces villages sont devenus des quartiers. On pourrait donc déplorer la non-adaptation des pratiques domestiques de ces villages aux exigences sanitaires urbaines.

Réactions

Emmanuel G. Bouba, habitant de la ville de Maroua, conseiller régional junior.

« On se rend compte que la population ne s’inquiète pas des sujets de corruption et de détournement des biens dans les communes et dans beaucoup d’institutions. L’insalubrité serait donc due à la mauvaise gestion des ressources disponibles, car ces deniers détournés peuvent servir à grand-chose pour lutter contre l’insalubrité ».

Christelle Toukam Godjé, professeur de géographie, habitante de la ville de Bertoua.

«  Nous avons tous salué l’avènement des sacs et des sachets plastiques dans le paysage des emballages. Aujourd’hui presque tout s’emballe dans le sachet plastique : les courses du marché, l’eau, les jus de fruits,etc. Ignorant certainement le drame écologique et environnemental qu’ils convoyaient. En effet, une fois le contenu de ces sachets consommé, nous nous contentons de les jeter dans la nature ou le vent et la pluie font alors le reste : ces sachets sont charriés et se retrouvent dans les égouts, ils s’emplissent de sable. Si vraiment les communes appliquent des sanctions et pénalités à ceux qui ne respectent pas l’hygiène des villes, il y aura un important changement. Nous camerounais, nous prenons tout à la légère. Il faut même noter qu’aujourd’hui les embouteillages dans nos villes sont causées par les bacs et ordures en plein centre de nos voies ».

Éric E, habitant de Yaoundé.

« Les Camerounais aiment bien la chicote. Instaurer des mesures de sensibilisation et de sanctions pourrait réduire ce manque d’incivisme. Ça a marché dans une ville du Cameroun qui a été plusieurs fois été déclaré ville la plus propre. Les maires pourraient se réunir de manière semestrielle pour mettre sur pied une stratégie pour résoudre ce fléau. Pourquoi l’État n’enverra pas ces maires dans une ville africaine appelée Kigali pour ce qu’on appellera une  » visite scientifique » ».

Alliance Massah, professeur de lycée, habitante de la ville de Garoua.

« Dans la ville de Garoua plus précisément à Afriland first Bank, la salle abritant les guichets automatiques est bourrée de papiers traînant au sol. En effet, dans cette salle, se trouve un panier à poubelles destiné uniquement à la réception de ses tickets que l’on reçoit des distributeurs, mais les usagers (adultes) préfèrent jeter ses petits bouts de papiers au sol ; et ceci, juste à côté du panier. Cet acte est vraiment irresponsable et témoigne de l’incivisme des Camerounais. Cela peut paraître banal, mais nous oublions que le développement commence toujours par de petites choses. Nous sommes nous-mêmes acteurs du développement, le développement, c’est nous et non les autres. De même dans la ville de Yaoundé au quartier Melen, nous constatons cet incivisme des Camerounais qui s’amusent à jeter les ordures partout ; en route ; dans les caniveaux voire même sur les terre-pleins. Nous rencontrons des Camerounais qui marchent en mangeant laissant traîner les débris de leur nourriture au sol, salissant ainsi les rues de la ville. Ce qui pollue non seulement la ville, mais aussi la vue des citoyens camerounais ».

Arnaud Kevin Ngano, journaliste, habitant de Yaoundé.

« Il est anormal de voir des tas d’ordures dans les marchés d’une cité comme Yaoundé. Ce degré d’incivisme des Camerounais et particulièrement des commerçants, commerçantes et parfois même acheteurs doit être sévèrement sanctionné à mon avis. Je me demande souvent à quoi sert les agents des mairies qui sillonnent dans les marchés pour collectionner des pièces d’argent. Il y en a qui doivent veiller sur l’entretien de ces plateformes commerciales. Je n’arrive pas à croire qu’ils traversent aussi ces ordures. C’est vraiment déplorable. Il existe pourtant des entreprises en charge de la salubrité. Mais si les employés ne sont pas bien traités, que peut-on bien attendre d’eux comme efforts, acharnement et assiduité ? ».

Benjamin d’Obili-Yaoundé.

« La salubrité commence à la maison et continue à l’école. Nous sommes trop sales nous les Camerounais des grandes villes. On dirait que les citoyens pensent que ce n’est pas leur ville et qu’ils n’y vivent pas. C’est déplorable vraiment. Et il faut voir dans les maisons et écoles, car tout s’explique à partir de là. Je me rappelle que lorsque j’étais au Nord du pays, il y avait des agents de ma mairie qui passait vérifier les foyers et punir certains qui ne respectent pas les normes. A Yaoundé par exemple, dans les quartiers Briqueterie, carrefour Obili ça laisse à désirer ».

Delby, détenteur de prêt-à-porter au marché Mokolo de Yaoundé.

« Les responsabilités sont partagées au niveau des organes en charge et des citoyens. Je pense fort qu’il existe des sanctions à l’égard des citoyens qui déversent les déchets partout et qui jonchent nos rues, nos marchés… Il faut également noter une faible sensibilisation des organes en charge de la salubrité sur les avantages et inconvénients que cela peut avoir sur le plan Environnemental, social, et économique dans une perspective de développement Durable ».

Jean-Yves, ingénieur de conception, habitant de la ville de Garoua.

« La salubrité est une question d’éducation. Si un citoyen dès son bas âge n’a pas appris à faire la propreté chez soi, à ne point jeter les ordures, n’importe où cela impactera la société. C’est le manque de suivi gouvernemental ou des entités mis en place pour maintenir la salubrité en zone urbaine telle que la mairie et Hysacam. Il n’y a pas assez de poubelles dans les coins des rues, le système de ramassage ou vider les poubelles est lent, la sensibilisation est restreinte. On peut proposer un projet « pas 100 pas sans poubelle » afin de disposer ces poubelles et cela limitera le taux d’insalubrité. Surtout, le gouvernement doit accompagner dans l’action ».

Deli Samuel, professeur de langue hispanique et écrivain, habitant de la ville de Maroua.

« C’est avant tout un problème de culture. Beaucoup n’ont pas la culture ou du moins, l’éducation de ne jeter les ordures que dans les endroits appropriés ou bacs à ordures. Quand bien même ces bacs existent, d’aucuns choisissent de le faire non pas dans les bacs, mais tout autour. Aussi, certaines villes manquent cruellement de dispositifs pouvant aider à contenir ces ordures, d’où des amas d’ordures autour des marchés et coins des villes. Les villes septentrionales tiennent la palme d’or de ce désordre. Toutefois, il faut des initiatives visant à faire la cuire de jouvence dans nos villes et coins. Il faut noter que les phénomènes naturels notamment les pluies accompagnées d’érosions laissent des débris qui écument nos coins, nos villes. À cela, ajouter le manque de voies d’évacuation, caniveaux appropriés et l’étroitesse de nos routes, jouxtées d’habitations et d’édifices publics. Le cas du centre urbain de la ville de Maroua ».

Hassan Hamza, politologue, habitant de la ville de Ngaoundéré.

« Je pense que le problème d’insalubrité dans notre pays est un sujet très important, voire même crucial en l’état actuel dans la mesure où cela engendre des conséquences néfastes dans notre société. Pour remédier à ce fléau, il faut une forte sensibilisation de la population. Puisque ce problème est d’abord moral, il faudrait donc intensifier cette sensibilisation dans les coins des villes, montrer de façon concrète les effets néfastes de ce comportement immoral des acteurs de la société que chacun de nous représente… Les sanctions doivent être envisagées et s’appliquer à tout le monde sans exception. Si déjà une majorité de personnes appliquent les mesures envisagées par ces autorités administratives, traditionnelles, locales, et même religieuses, les premiers résultats seront bien visibles. Je me souviens quand j’étais à Bamenda, dans la région du Nord-ouest en 2008, un jour, j’avais acheté 3 bananes à 50f et après avoir mangé, j’ai eu honte de jeter les peaux de bananes par terre, tellement que la ville était propre, soudain, j’entendis une voix derrière moi qui me dit !!! Monsieur, voilà une poubelle à 5 m de là où vous êtes, déposez ça là-bas ».

Joseph Essama, journaliste, habitant de Yaoundé.

« L’insalubrité au Cameroun est causée par la population en partie et au gouvernement qui néglige la politique mis sur pied pour remédier à cette situation. En fait, pas assez de bacs à ordures dans les coins de ville. Quand bien même, il en existe les populations ne prends pas la peine de jeter leur ordure dans les bacs. Il faut noter que la population doit vraiment être sensibilisée. Et pour cela, la presse doit y participer. Si nos médias font assez de sensibilisation autour de ce problème de ville salles, il peut avoir un changement. Mais rien n’est fait. Il est temps d’applique les sanctions pour garder nos villes propres. Et pour cela, l’éducation sur ce sujet est très importante ».

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