Le Cameroun s’est doté, il y a plus de deux ans, d’une Stratégie de développement du secteur des industries et des services. Cette dernière prône le soutien à l’émergence des capitaines d’industries capables de contribuer significativement à l’industrialisation du pays. Cheville ouvrière de cette méthode qui a fait ses preuves dans d’autres pays à l’instar du Maroc, le ministère de l’Economie de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (Minepat) a réuni du 1er au 02 aout 2024 à Ebolowa dans la région du Sud, des entreprises privées considérées comme des «champions nationaux», entendez entreprises à fort potentiel, pouvant contribuer à l’atteinte de l’objectif susmentionné. Autour de la même table étaient réunis des responsables de Soproicam, une agro-industrie spécialisée dans la production et la transformation du Soja, Sotrabus, première unité de montage de bus au Cameroun, Zng Card Factory, spécialisée dans la fabrication des cartes magnétiques et des terminaux de paiement, ainsi que la Société camerounaise de production du riz et Agrocam.
A en croire Isaac Tamba, leDirecteur Général de l’Economie et de la Programmation des Investissements Publics (Dgepip) qui présidait les travaux, l’objectif de ce séminaire était de recueillir les besoins des entreprises sus-énumérées dans le but de leur apporter une aide financière et non financière, beaucoup plus efficiente qui devrait leur permettre de conforter leur statut de champion national. Il était également question de leur présenter les différentes facilités mises en place au niveau du gouvernement, pour faire leur promotion.
C’est quoi un champion national ?
Les entreprises présentes à Ebolowa n’ont pas été choisies de manière arbitraire. Leur statut de «Champion national» découle d’une idée qui a germé dans l’esprit des participants à la journée de l’entreprise organisée en 2016 par le Gicam, la défunte organisation patronale. Le ministre de l’Economie qui a pris part à cet évènement en tant qu’invité d’honneur a, un an plus tard, instruit la mise sur pied d’un groupe de travail mixte composé de membres de diverses administrations publiques et de représentants du secteur privé. Cette association d’intelligences a permis entre 2017 et 2019, «de définir ce qu’est une entreprise championne nationale au sens du Cameroun, de la caractériser et identifier les critères permettant de sélectionner les entreprises championnes nationales», précise le directeur de l’Economie. Aujourd’hui, est considéré comme «Champion national», une société de droit et à capitaux camerounais, ayant un potentiel de déploiement à l’international dans son domaine d’activité. C’est aussi une société innovante, compétitive et offensive, dont les objectifs de développement sont en cohérence avec la stratégie nationale de développement à l’horizon 2030.
En outre, dans le but d’affiner le choix des entreprises pouvant être considérées comme des « Champions nationaux», le groupe mixte évoqué supra, a élaboré des critères de sélection. Concrètement, toute firme prétendant à ce statut doit correspondre à quatre principaux critères. Il s’agit notamment de sa capacité à «Contribuer à l’accroissement de la richesse générée par l’économie camerounaise ; à participer de manière significative à l’accroissement des exportations et à la réduction des importations ; à contribuer au développement des PME et des TPE à travers le renforcement de la sous-traitance ; à conquérir de nouvelles parts de marché au niveau régional et sous régional», a indiqué le Minepat. Le cadre ainsi défini a facilité la sélection des cinq entreprises sus-évoquées, qui appartiennent selon la dénomination brandi par le ministère de l’Economie, à la catégorie des Champions nationaux de la première vague.
Entre soutien et besoins plus grands
Pour une entreprise, accéder à la condition de «Champion national» ouvre la voie à une multitude d’avantages. Lors de l’atelier d’Ebolowa le ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire s’est montré très peu disert sur ces derniers, ne préférant pas quantifier les aides ou encore les facilités accordées à ces entreprises depuis le lancement de la politique des «Champions nationaux». Toutefois, selon des indiscrétions captées lors des travaux, il s’agit principalement d’appuis financiers apportés à des entreprises comme Soproicam et Zng Card Factory, des exonérations fiscalo-douanières, des conseils pratiques prodigués par l’ancien Bureau de mise à niveau des entreprises (BMN), ainsi que des facilités pour accéder à la terre.
Cependant, ces aides étaient une réponse à des besoins recensés pour certains il y a près de 3 ans. Sauf que, qui dit «champion national», dit des besoins d’accompagnements toujours plus importants. Le Minepat en est conscient, c’est la raison pour laquelle les travaux d’Ebolowa ont été sanctionnés par la rédaction d’un rapport dans lequel ont été consignés les nouveaux besoins formulés par les entreprises. L’un des plus prégnants c’est le projet d’agrandissement de Sotrabus qui sollicite l’aide du Minepat , mais aussi celle du ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (Mindcaf) pour faciliter l’acquisition d’un terrain de 5 ha , où l’entreprise souhaite implanter une unité de montage. La même entreprise souhaite également que le gouvernement l’accompagne dans sa conquête du marché sous régional, notamment au Gabon, où, apprend-t-on, elle est en négociation avec le gouvernement local pour la livraison de bus.