L ‘économie de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), dont le Cameroun est un membre important, est en proie à de vives inquiétudes. Sur la dernière année, les réserves de change (des avoirs détenus par les banques centrales ou les États en devises étrangères ou en or), de la CEMAC ont fondu de 976 milliards de FCFA, passant de 7 617,7 milliards à 6 642 milliards de FCFA au 30 avril 2024, a révélé la BEAC dans son rapport sur la politique monétaire de la sous-région. « Cette situation s’explique par un accroissement des besoins en devises de la zone. Toutefois, il convient de souligner qu’entre juillet 2023 et avril 2024, les réserves de change de la BEAC ont affiché une évolution relativement stable, avec une moyenne autour mensuelle », a indiqué la Banque centrale dans ce document dont nous avons une copie. Les réserves de change sont un instrument permettant à un pays de disposer de liquidités suffisantes pour conduire des opérations de change ou faire face à un déficit de sa balance des paiements. Le Cameroun, poids lourd économique de la CEMAC, a fortement contribué à la chute des réserves de change dans la sous-région. Son solde net des transferts a chuté à -225,9 milliards de FCFA, contre -164,9 milliards à la même période l’année dernière. Ce qui met en évidence la dépendance croissante du pays vis-à-vis des importations, notamment de produits pétroliers raffinés.
LE CAMEROUN SOMME DE RELANCER LA SONARA
Lors de la première session du Comité de politique monétaire (CPM) tenue en mars dernier à Yaoundé, la BEAC avait mis en garde les Etats contre cette hémorragie financière. En se basant sur le « taux de couverture extérieure de la monnaie de 74,2% et des réserves en mois d’importations de biens et services à 4,3 en 2024, contre 4,8 en 2023 », la BEAC s’inquiétait déjà d’« un léger repli des réserves de change de 2,7% à 6 699 milliards de FCFA au cours de l’année 2024 ». Pour réduire ces pertes financières, le gouverneur de la Banque centrale des pays de la CEMAC (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA) avait anticipé en invitant les autorités camerounaises à accélérer le projet de réhabilitation de la Société nationale de raffinage (Sonara), l’unique raffinerie de pétrole du pays. Cette initiative vise à restaurer la raffinerie, qui avait été gravement endommagée par un incendie en mai 2019. A la lumière du dernier rapport de l’Institution bancaire, « le taux de couverture extérieure de la monnaie est revenu à 73,5 % à fin avril 2024, contre 74,9 % un an auparavant, reflétant la baisse observée des avoirs extérieurs de la zone. Selon leurs principales composantes, au 30 avril 2024, les réserves de change de la CEMAC sont constituées à 69,1 % des avoirs extérieurs à vue, 23,7 % des autres avoirs extérieurs en devises gérés par la Salle des Marchés, 4,4 % de l’encaisse or et 2,9 % des avoirs auprès du FMI. », lit-on dans le document.
RENFORCER LA REGLEMENTATION DES CHANGES
Plus récemment, le 24 juin 2024, Yvon Sana Bangui le gouverneur de BEAC a souligné le rôle joué par l’institution bancaire dans la gestion des réserves de change des États membres, après les discussions avec certains industriels de la sous-région. « La Banque centrale règle souvent les factures d’exportation en dollars, ce qui affecte nos avoirs en devises et nous expose à un risque. Il fallait interpeller les responsables industriels sur la nécessité d’augmenter la production nationale afin de satisfaire en priorité les besoins nationaux et de la sous-région. Cette démarche est cruciale pour préserver les réserves de change des États à la BEAC », a-t-il indiqué à l’issue de la deuxième session ordinaire de l’année du Comité de politique monétaire de la Banque. Lors de ses premières sorties officielles, en mars dernier, le gouverneur de la BEAC avait indiqué son intention de renforcer la mise en œuvre de la réglementation des changes en vigueur depuis janvier 2019 au sein de la CEMAC. Ceci en vue de relever des réserves de la sous-région, d’équilibrer sa balance commerciale et d’éviter la dévaluation de la monnaie.