Ces dernières semaines, la fourniture de l’électricité a été fortement impactée par le différend entre ENEO et Globeleq puis par l’étiage sur le Ntem. Quels sont les termes du problème et où en est la résolution ?
Le fournisseur et producteur indépendant Globeleq a, à plusieurs reprises, mis en application une disposition contractuelle qui lui permet d’arrêter partiellement ou totalement ses machines (Dibamba fuel et Kribi gaz) quand il estime que les impayés d’ENEO dans ses livres sont arrivés à un niveau insoutenable. Et à chaque fois, les profondeurs de délestages ont tourné autour de 200 MW, donc environ 20% de production en moins dans le Réseau Interconnecté Sud. La situation de la trésorerie d’ENEO est tellement dégradée, du fait de l’accumulation des impayés de ses plus grands consommateurs et le retard d’autres paiements attendus. Une situation qui met l’entreprise en mauvaise posture vis-à-vis de ses fournisseurs et sous-traitants. En concertation avec le Gouvernement, un train de mesures est pris. Nous comprenons que Globeleq s’impatiente quand la mise en œuvre prend du temps. Mais en toute transparence, nous partageons avec ce fournisseur, l’évolution des discussions et des dossiers dont le bouclage permettrait de soulager cette dette. En marge de ces contraintes financières, il y a le problème de l’étiage. La centrale hydroélectrique de Memve’ele est construite sur le Ntem, un fleuve qui connaît deux étiages annuels.
…Pour y faire face, ENEO a dû engager des dépenses imprévues en combustibles pour mettre à contribution toutes ses centrales thermiques, avec des surcoûts moyens de 8 milliards mensuels sur la période difficile ….
Un étiage étant une baisse drastique du niveau d’eau, ou un assèchement naturel du lit du fleuve, l’ouvrage qui produit de l’électricité à partir de l’eau enregistre une baisse importante de sa production (de 200 mégawatts à 35-60 en moyenne, et parfois à zéro). Et pour terminer, le déséquilibre offre-demande de ces derniers temps a aussi été accentué par le retard des premières capacités de Nachtigal, annoncées depuis fin 2023. Ce qu’il faut retenir : Sur le plan structurel, le rapport entre l’offre de production et la demande est équilibré. Les capacités installées dans le pays et les pics de puissances appelées par les industries et les ménages tournent autour de 1200 MW. Mais c’est un équilibre fragile.
En raison de certaines contraintes naturelles et conjoncturelles (hydrologie, sécheresse), ou technique (la saturation des réseaux de transport et de distribution) ou encore financières et contractuelles évoquées plus haut, cet équilibre peut être rompu à tout moment. C’est ce qui est survenu ces derniers mois. Nous avons connu des rationnements pour cause de baisse ou déficit de production dans la centrale de Memve’ele affectée par l’étiage sur le Ntem et le retard des premières capacités du barrage de Nachtigal. Pour y faire face, ENEO a dû engager des dépenses imprévues en combustibles pour mettre à contribution toutes ses centrales thermiques, avec des surcoûts moyens de 8 milliards mensuels sur la période difficile. Il faut rappeler que toutes ces contingences interviennent alors que le plan de 2024 validé par le régulateur en fin 2023, intégrait les premières capacités de Nachtigal et la limitation du niveau des dépenses en combustibles ; et surtout, dans un contexte de trésorerie sérieusement dégradé d’ENEO. Cette situation remet sur la sellette la question persistante de l’équilibre financier du secteur de l’électricité.
Cette situation remet sur la sellette la question persistante de l’équilibre financier du secteur de l’électricité. Quelle est l’ampleur de la difficulté ? Et quelles solutions structurelles préconisez-vous ?
La question de l’équilibre financier est au centre des problématiques du secteur de l’électricité. Elle contraint aujourd’hui fortement le déploiement et le développement des différents acteurs du secteur. Que ce soit ceux, nombreux, qui opèrent aux côtés d’ENEO dans la production(en attendant Nachtigal : ENEO principal producteur du pays avec 65% des capacités, et 35% les autres), la SONATREL dans le transport ou ENEO dans la distribution et la commercialisation. Une situation qui impacte durement les clients qui, naturellement, accusent un faible niveau de fourniture en quantité et en qualité, en deçà des attentes. Nous sommes très peinés et frustrés de ne pas avoir la capacité d’apporter le niveau de service requis. Le déséquilibre est nourri pour l’essentiel par les impayés accumulés des factures des entités publiques vis-à-vis du secteur. ENEO a beau être une entreprise rentable sur le plan comptable, elle fait face à une crise de trésorerie aiguë qu’elle, en tant que collecteur du secteur, répercute à tous les acteurs de la chaîne de fourniture de l’électricité. Cette situation n’est évidemment pas une fatalité.
Nous apprécions le plan de redressement du secteur de l’électricité monté par le Gouvernement, avec le soutien des bailleurs de fonds. L’un des objectifs principaux de ce plan est l’assainissement des finances du secteur de l’électricité. Des actions prévues dans ce plan sont clairement orientées vers l’amélioration, à la fois de la desserte et des recouvrements. Il est ainsi du développement des extensions prioritaires des réseaux de transport et de distribution ciblant notamment les zones industrielles en croissance, du déploiement des compteurs prépayés et intelligents sur les installations des administrations publiques, du projet d’installation (branchements neufs ou conversions) de 2 millions de compteurs prépayés. Dans le même temps, des pistes conduisent vers la mise en place d’un plan d’ajustement des tarifs pour se rapprocher, à tout le moins, de la vérité des prix. Parce qu’il faut bien comprendre qu’aujourd’hui, le KWH d’électricité coûte à ENEO 106 francs CFA, mais le prix moyen appliqué aux clients est de 80 Francs CFA. La différence est facturée à l’Etat en termes de compensation. Ce qui contribue pour beaucoup à la facture globale de l’Etat. Réduire cette différence allègerait le poids de la dette de l’Etat vis à vis du secteur de l’électricité
Les créances sur l’Etat sont une des sources majeures des difficultés. Quels sont les montants en jeu, et où en est le recouvrement ?
La dette est dynamique. Il faut préciser que le problème ce n’est pas que l’Etat ne paie pas ses factures. Mais qu’il paie dans des délais longs, obligeant l’entreprise à recourir au soutien quasi permanent mais très pénalisant des banques. Nous avons noté des questionnements sur cette dette qui en retardent la validation par le régulateur. C’est légitime qu’il y ait des questions. Nous apportons des réponses dans le cadre des discussions avec le régulateur. Nous souhaitons que ces discussions soient accélérées. Surtout que la capacité d’ENEO à mobiliser des financements aujourd’hui auprès des prêteurs locaux en est tributaire. Il est important de souligner l’engagement d’Eneo envers une gestion orthodoxe. Eneo est une entreprise régulée, dotée d’une gouvernance solide, et dont les comptes sont audités par deux commissaires aux comptes : l’un désigné par Actis, l’autre par l’État. Et les comptes de l’année 2022 ont été certifiés sans observation. Il est également important de noter que même les montants validés ne sont pas nécessairement versés immédiatement.
S’agissant de la fraude, quel est son impact sur vos revenus, et quelles sont les avancées dans la lutte contre ce phénomène ?
La lutte contre la fraude est un combat de tous les instants qui doit être érigée en cause nationale, tant les enjeux sont nombreux. Il s’agit en effet de lever des contraintes qui pèsent sur : 1. La qualité de service ; 2. La sécurité et la vie des personnes (que ce soit les fraudeurs, ou leurs complices et les bénéficiaires dans les communautés) ; 3. Les finances et par conséquent la capacité d’investir pour améliorer la qualité de service. Ces dernières années, les moyens importants déployés dans cette lutte ont contribué, aux côtés d’autres actions, à améliorer le rendement de distribution qui est à ce jour à 75%, contre 68% en 2019, et se situe au-dessus des objectifs de rendement fixés par le Gouvernement. Mais il faut faire plus, parce que les pertes financières pour le secteur demeurent trop élevées, environ 60 milliards de francs CFA par an. Nous continuons de travailler avec le régulateur et les associations de consommateurs pour lutter contre le phénomène. La décentralisation en cours chez ENEO participe des mécanismes internes de renforcement de cette lutte.
La situation financière d’ENEO semble également préoccupante du fait d’un lourd endettement. Pouvez-vous nous en dire davantage, y compris sur votre stratégie visant à alléger ou résorber cet endettement ?
…A titre d’illustration, nous émettons pour environ 7 milliards de FCFA de factures mensuelles à l’égard des entités publiques (administrations, hôpitaux, universités), mais depuis le début de cette année 2024, nos recouvrements se sont limités à 1,5 milliards de FCFA en janvier, à 1,8 milliards en février…
La dette d’ENEO vis-à-vis de ses fournisseurs et de ses partenaires bancaires est lourde. Et elle est la conséquence directe des difficultés d’encaissement et de recouvrement auxquelles nous faisions référence plus tôt. Nous travaillons avec nos partenaires financiers sur un reprofilage de la dette bancaire à hauteur de 150 milliards de francs CFA. Ce qui nous permettra de repousser d’une vingtaine de mois les échéances de remboursement d’ENEO. Cela offrira un bol d’air à notre trésorerie. L’étau légèrement desserré sur cette trésorerie nous permettra d’améliorer le déploiement opérationnel. Ce reprofilage s’adosse sur la confiance qu’inspirent les plans de redressement du secteur en cours de mise en œuvre avec l’Etat. Ainsi, progressivement l’entreprise devrait se donner les moyens d’assainir ses rapports avec ses fournisseurs et partenaires.
Un des points difficiles semble également être le dilemme et les pertes sèches dans les régions de Nord-ouest et du Sud-Ouest. A savoir la nécessité de fournir de l’électricité et la quasi-impossibilité de recouvrer les sommes dues. Comment évolue cette situation ?
Par responsabilité, ENEO a continué d’opérer et d’assurer le service électrique dans les régions du Nord-ouest et du Sudouest, malgré les conditions sécuritaires drastiques. C’est une épreuve que nos équipes affrontent avec beaucoup de résilience et de courage. C’est aussi une épreuve pour les finances de l’entreprise. Vous avez raison. Les taux de recouvrement sont au plus bas dans ces régions, les montants non facturés ou recouvrés avoisinant 70 milliards durant les 5 dernières années. La question de la gestion de cette situation se pose effectivement. Nous espérons qu’avec le Gouvernement, nous pourrons trouver des solutions.
Dans ces conditions difficiles, comment parvenez-vous à mobiliser les financements nécessaires pour investir ?
Le déséquilibre financier du secteur contraint l’entreprise et limite ses investissements. Il est difficile d’obtenir des bailleurs de fonds qu’ils s’engagent. Malgré tout, en dix ans ENEO revendique 350 milliards de francs CFA d’investissements, une bonne partie sur fonds propres. C’est certainement loin de ce qui aurait pu être fait dans les conditions normales, mais ces investissements ont permis d’améliorer la desserte, l’accès à l’électricité et la qualité de la fourniture. Aujourd’hui, il faut regarder l’avenir avec optimisme. Le plan de redressement du secteur piloté par le gouvernement avec la contribution de tous les acteurs suscite l’espoir. Ce plan manifeste une prise de conscience de la nécessité d’assainir les finances du secteur pour donner aux opérateurs les moyens d’exprimer leurs potentiels.
Sur le plan des investissements, ENEO a engagé un programme de développement des énergies renouvelables. Où en est sa mise en œuvre ?
ENEO s’est engagée à renforcer/développer des sources d’énergie non polluantes. Sa stratégie repose sur : – La préservation dans son parc des grandes centrales hydroélectriques (l’hydraulique est la première source d’énergie renouvelable) en assurant leur maintenance et des investissements pour rallonger leur durée de vie ; – L’hybridation au solaire des centrales thermiques isolées ; – Le démantèlement progressif, en accord avec le Gouvernement, des unités de productions thermiques ; – Le développement des parcs solaires importants avec des partenaires. Dans ce cadre, ENEO a déjà développé dans une logique d’hybridation, des capacités solaires dans les centrales thermiques de Djoum, Lomié et Garoua Boulai. Ces solutions fonctionnent et permettent de moins faire appel au thermique dans ces localités. Le plus grand investissement est celui qui est visible dans le septentrion, et qui depuis fin 2022, contribue à y stabiliser l’équilibre entre l’offre et la demande. Il s’agit des parcs géants de 30 MW de capacités développées à Guider (15 MW) et Maroua (15 MW) avec le partenaire SCATEC et l’appui de plusieurs acteurs du secteur, sous la coordination du MINEE. Le plan d’ENEO en 2024 prévoit d’engager l’extension de ces centrales solaires. Sous réserve de l’approbation du conseil d’administration, nous projetons d’ajouter 18 MW à Maroua et 8 MW à Guider.
Ce qui à terme portera les capacités de ces champs solaires à 56 MW contre 30 MW aujourd’hui. Toujours en 2024, Eneo poursuivra les démarches l’hybridation de 06 autres centrales isolées (Banyo, Ngaoundal, Touboro, Yoko, Yokadouma et Mouloundou). La stratégie est d’effectuer l’hybridation progressive de toutes nos centrales thermiques isolées en partenariat avec des entreprises exerçant dans le domaine. Il faut rappeler qu’il s’agit d’adjoindre aux sources thermiques présentes dans ces sites isolés des sources solaires afin de diminuer la part de la production thermique de ces centrales au profit de la production solaire.
Que se passe-t-il avec les compteurs prépayés et quelle est leur place dans la stratégie de développement d’ENEO ?
ENEO est en train de mettre en œuvre une campagne de mise à jour de certains compteurs prépayés de son parc. C’est une demande des éditeurs des logiciels qui font fonctionner la solution de prépaiement. La mise à jour des systèmes informatiques ou des appareils tels les téléphones ou les compteurs communicants est une opération routinière qui peut à un moment laisser pour un temps un sentiment que ça ne marche pas. Pour la mise à jour d’un appareil électronique, l’utilisateur reçoit des messages d’alerte et dans le cas des prépayés, ENEO a lancé une campagne de communication de masse, et envoie des messages à ses clients concernés. ENEO invite ses clients à ne pas les ignorer, et à suivre les instructions qu’ils contiennent.
En cas de difficultés, ils peuvent faire recours à ENEO qui a mis en place un dispositif d’accompagnement. Nous avons jusqu’à fin novembre 2024 pour procéder à cette mise à jour. L’opération est en cours, et plus de 95% des clients éligibles à cette mise à jour ont déjà reçu les tokens dédiés et un sondage nous permet de dire qu’à minima 85 à 90% des clients concernés avaient mis à jour leurs compteurs à fin mai 2024. En dehors de la campagne de mise à jour en cours, nous devons noter que la cyberattaque dont a été victime le système informatique d’ENEO a provoqué des désagréments chez des clients qui n’arrivaient pas à acheter des tokens ou à les recharger. La cyber-attaque a été maîtrisée en environ une semaine, mettant fin à ces désagréments conjoncturels. Maintenant, seule l’opération de mise à jour provoque chez certains un inconfort…A titre d’illustration, nous émettons pour environ 7 milliards de FCFA de factures mensuelles à l’égard des entités publiques (administrations, hôpitaux, universités), mais depuis le début de cette année 2024, nos recouvrements se sont limités à 1,5 milliards de FCFA en janvier, à 1,8 milliards en février….» 4 8 7 3 du jeudi 6 au 9 juin 2024 passager. Et pour cela, nous recommandons aux clients de prêter attention aux communications d’ENEO sur le sujet, et de se faire assister par les équipes en cas de soucis.
Nous le rappelons : Le compteur prépayé est l’avenir du secteur de l’électricité. Il est largement plébiscité par les clients qui apprécient pouvoir contrôler leurs budgets et consommations. Le compteur prépayé est l’avenir du secteur de l’électricité. Il est largement plébiscité par les clients qui apprécient pouvoir contrôler leurs budgets et consommations. Il occupe une place de choix dans le plan de redressement du secteur de l’électricité élaboré par le Gouvernement, avec le soutien des bailleurs de fonds. L’un des objectifs principaux de ce plan est l’assainissement des finances du secteur de l’électricité, avec la contribution du déploiement des compteurs prépayés et intelligents dans les administrations publiques, et du projet d’installation de 2 millions de compteurs prépayés.
Comment procédez-vous à maintenir un climat social serein au sein de l’entreprise?
La première richesse d’ENEO est ses 3600 agents compétents et très engagés. Un climat social serein est absolument nécessaire pour continuer d’obtenir de ces ressources un engagement fort, à la mesure des enjeux de l’entreprise. Depuis notre arrivée, nous nous sommes employés à traiter des points d’attention qui dégradaient le climat social. Les employés sont plus confiants. Le dialogue, l’écoute, l’empathie et la transparence sont les clés de cette évolution. Des groupes de travail créés se sont penchés sur la question de l’assurance maladie, l’application de la nouvelle convention collective et le problème que pose le véhicule des 5% du capital de l’entreprise réservés aux agents. Sur l’assurance maladie, un nouveau prestataire a été choisi. Il est opérationnel depuis le début de l’année. Nous observons son déploiement et traitons les soucis que remontent les agents.
Sur la convention collective, il faut noter que sa mise en œuvre est satisfaisante sur l’essentiel de ses innovations, sauf l’une qui a consisté à aligner le poids de chacun des postes sur les critères d’une formule jusque-là non utilisée, à savoir l’approche Hay. En vertu des nouveaux critères et de la pesée effectuée il y a quelques années, il ressort que 50% des postes gardent leur poids, 33% sont revalorisés et 17% perdent du poids et donc sont reclassés dans des cases plus basses dans la hiérarchie. En appliquant les nouvelles classifications, les occupants des 17% des postes ont eu le sentiment de reculer et dans une certaine mesure ceux du lot de 50% le sentiment de stagnation. Les mesures proposées par le groupe de travail et validées par le Comité de direction, CODIR, ont été de maintenir au moins les mêmes niveaux de rémunération qu’avant pour ceux dont les postes baissaient en force. Et de les prioriser dans les situations de besoin à des postes ayant une plus grande valeur que la leur. Nous avons expliqué la situation et les solutions au personnel en les rencontrant physiquement dans les différentes régions.
Nous leur avons aussi présenté un projet structurant, et confié au nouveau Directeur des ressources humaines, concernant la mise en place d’un véritable plan de gestion des carrières. Chaque agent doit être en mesure de se projeter verticalement ou horizontalement dans l’entreprise. Sur le véhicule des actions du personnel dans le capital de l’entreprise, nous travaillons avec les leaders dudit véhicule, plusieurs experts et des associations représentant les agents retraités ou encore dans l’entreprise. Les agents retraités qui ont investi dans ce véhicule demandent à être remboursés conformément à des projections de rentabilité de leurs investissements qui avaient été faites au lancement. Les réflexions avec tous les acteurs se poursuivent et nous avons bon espoir que la question trouvera solution le plus rapidement possible. De même, que des solutions devront être trouvées pour la viabilité et la crédibilité de ce véhicule aux yeux de tous afin qu’il puisse intéresser davantage de souscripteurs en interne.
Depuis quelques mois, il y a dans l’actualité le sujet de la renationalisation d’ENEO. Quelles en sont les raisons et où en est le processus ?
…Il est important de souligner l’engagement d’Eneo envers une gestion orthodoxe. Eneo est une entreprise régulée, dotée d’une gouvernance solide, et dont les comptes sont audités par deux commissaires aux comptes : l’un désigné par Actis, l’autre par l’État. Et les comptes de l’année 2022 ont été certifiés sans observation…
Après 10 ans au Cameroun, Actis a émis le vœu de se retirer de l’actionnariat d’ENEO. En tant que fonds d’investissements, c’est dans son ADN de se retirer après des années d’investissement dont la maturité moyenne est souvent de 5 ans. Le Gouvernement a accepté d’acquérir les actions d’Actis. Les deux parties sont en discussion pour conclure cette transaction. Et comme vous pouvez le noter, des milliers de transactions du genre rachat, vente d’actions, ont lieu dans l’actionnariat des entreprises à travers le monde. Cela ne change ni la nature de la mission de l’entreprise, ni ses opérations. C’est le cas pour ENEO. Elle restera, quelle que soit la structure de son actionnariat à venir, une entreprise qui assume une mission de service public. Après la transaction, l’Etat aura 95 % des actions, et de fait elle deviendra une entreprise publique. Mais aura-t-elle vocation à le rester ? Il me semble que c’est à partir de ce moment que l’Etat fera le choix du type d’actionnariat. Ça pourra être une renationalisation, ou alors un partenariat public-privé, ou encore un affermage. Mais quel que soit le format du partenariat à venir, la question centrale est de savoir si tout est organisé pour donner à ENEO et au secteur les moyens de se développer mieux qu’aujourd’hui
Quelles sont vos stratégies et actions phares en matière de RSE ?
Chez ENEO, la Responsabilité Sociétale d’Entreprise (RSE) est ancrée dans toutes nos valeurs fondamentales. Nous considérons qu’en tant qu’entreprise socialement responsable, ENEO doit être crédible auprès de toutes ses Parties Prenantes, utiliser durablement ses ressources et moyens, traiter convenablement ses employés, clients et communautés, maîtriser les impacts sociaux, économiques, sanitaires et environnementaux de ses activités, honorer ses obligations réglementaires et légales. C’est ce que nous nous employons à faire par exemple quand nous arrivons à justifier en 10 ans de 700 milliards d’impôts et taxes diverses payés à l’Etat, 1400 milliards engagés au profit des entreprises locales, du recrutement de 1200 jeunes, de l’accès à l’électricité à plus d’1 million de ménages et commerces, de l’encadrement suivant les règles de 3600 employés et de 10 000 ressources humaines indirectes, d’un dialogue permanent avec nos entreprises partenaires sur la gestion de nos relations, des actions pour le bien être des communautés qui nous entourent. Au profit des communautés et des usagers du courant en général, ENEO déploie en permanence une campagne de sensibilisation sur les dangers du courant électrique. Parmi les autres axes d’intervention, ceux ci-après déployés entre 2020 et 2023 mobilisent beaucoup l’attention de l’entreprise aujourd’hui : – Renforcement de l’accès à l’eau potable (Programme WASH) et à l’électricité dans les zones rurales à travers des solutions autonomes (MICROSOLAR Programme) : 09 forages d’eau potable offerts aux communautés villageoises et 09 kits solaires photovoltaïques autonomes installés sur des sites sociaux entre 2020 et 2023 (orphelinats, établissements scolaires et centres de santé dans la zone rurale), pour un coût total estimé à 166 millions de FCFA et environ 415.000 bénéficiaires directs.
Programme de reboisement et de lutte contre la désertification : 21.000 arbres plantés entre 2020 et 2021 pour contribuer à la lutte contre l’avancée de la désertification dans la partie septentrionale du pays, pour un coût total estimé à 7 millions de FCFA octroyés à la phase pilote et 300 emplois saisonniers, une main d’œuvre essentiellement recrutée dans la zone rurale. – Programme de lutte contre les invasions de la simulie dans le Bassin de la Sanaga (Black Fly Control Program) : plus de 200 millions de FCFA investis régulièrement depuis plus de 10 ans pour réduire la recrudescence de la simulie, vecteur de l’onchocercose et de réduction des activités agricoles, économiques et scolaires dans les communautés locales. Plus de 40 villages couverts par le programme le long du fleuve Sanaga y inclus les affluents, depuis Nachtigal jusqu’à Edéa.
Déploiement des projets sociaux visant à contribuer au bien-être des communautés locales et au renforcement de la bonne cohabitation avec ENEO(projets sociaux associés aux projets d’investissements d’ENEO, projets sociaux autonomes et adaptés aux besoins et attentes des communautés locales) : plus de 350 millions de FCFA investis entre 2021 et 2023 dans le renforcement du réseau ou la construction de nouvelles lignes électriques dans la zone rurale, afin de permettre aux communautés locales d’avoir accès à une électricité fiable, continue et sécurisée. Déjà plus de 10 villages couverts par ce programme. Aussi, la mobilisation de plus de 70 groupements d’initiatives communes (GIC) à travers le pays pour l’entretien des corridors des lignes de distribution. Cette activité permet de soutenir l’amélioration de la qualité de vie dans les communautés par la rémunération d’un millier de personnes membres de ces GIC. – Solidarité Sociale : Près de 200 millions de FCFA mis à contribution en 2020 pour soutenir les efforts de l’Etat du Cameroun dans la lutte contre la COVID-19. 10 Arrondissements couverts avec des dons de matériels de santé et produits de désinfestation et prévention. – Continuité de service dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest, à perte, malgré la situation sécuritaire difficile et la trésorerie singulièrement dégradée de l’entreprise.