Il y a encore quelques mois, le kilogramme de cacao s’achetait à environ 6000 FCFA au bord des champs camerounais. La donne a radicalement changé. Sur le marché actuel, les prix se sont repliés : entre 2 639 et 2 839 FCFA au Port autonome de Douala, et 2 400 à 2 700 FCFA dans les bassins de production. Ces chiffres, publiés par le Système d’information des filières (SIF), l’outil national de suivi en temps réel des prix agricoles, rapporté par Cameroon Tribune, le quotidien à capitaux publics, confirment une tendance baissière des prix. Une situation d’autant plus préoccupante que la campagne cacaoyère 2025-2026 s’ouvrait le 7 août 2025, dans la localité de Mbankomo, bassin de production de la région du Centre, sur des projections optimistes.
Les autorités avaient fixé une fourchette de 3 200 à 5 400 FCFA le kilogramme. Aujourd’hui, les producteurs constatent un écart important entre les prévisions et la réalité du marché. En cause, la forte exposition du cacao camerounais aux cours internationaux, déterminés principalement à la Bourse de Londres, où se joue l’essentiel de la valorisation mondiale de la fève. Sur le plan international, la République démocratique du Congo (RDC) connaît une évolution similaire. Le prix du kilogramme de cacao y a chuté de 3,84 %, passant à environ de 3700 FCFA à 3650 FCFA au 6 octobre 2025, selon un communiqué du ministère congolais du Commerce extérieur.
Ce recul prolonge une tendance observée depuis septembre, marquée par plusieurs semaines consécutives de baisse. Le mouvement illustre un rééquilibrage du marché mondial après trois campagnes déficitaires qui avaient soutenu les prix à des niveaux historiquement élevés, notamment au Cameroun où le prix de la fève dépassait 6000 FCFA le kilogramme, il y a quelques mois. Les analystes des marchés des matières premières anticipent désormais un excédent global de 186 000 tonnes pour la campagne 2025-2026, supérieur aux 142 000 tonnes de la saison précédente.
Cet excédent provient principalement de la montée en puissance de la production de l’Equateur, un pays de l’Amérique latine, désormais estimée à plus de 650 000 tonnes métriques. Si ces prévisions se confirment, apprend-on, l’Équateur pourrait devenir le deuxième producteur mondial, dépassant le Ghana, acteur traditionnel de premier plan derrière la Côte d’Ivoire. Cette progression latino-américaine bouleverse l’équilibre du marché. L’abondance de l’offre exerce une pression à la baisse sur les cours mondiaux, qui ont perdu près d’un tiers de leur valeur depuis le début de l’année. Les prix de référence devraient, selon les projections, se stabiliser autour de 3 000 dollars la tonne à moyen terme.
Cette correction marque la fin du cycle haussier observé entre 2022 et 2024, période où les problèmes climatiques en Afrique de l’Ouest et les perturbations logistiques avaient réduit l’offre mondiale, faisant grimper les prix. Cette situation a profité à la fève camerounaise, qui a contribué à une reprise économique modeste, avec une croissance du PIB passée de 3,2 % en 2023 à 3,5 % en 2024, selon la Banque mondiale.
La volatilité des cours reste désormais la principale caractéristique du marché. Plusieurs facteurs structurels y contribuent : d’une part, la variabilité climatique qui influence directement la productivité des vergers ; d’autre part, la demande mondiale fluctuante, affectée par le ralentissement économique dans plusieurs régions consommatrices. S’y ajoutent les contraintes de la chaîne d’approvisionnement mondiale, dont les coûts logistiques demeurent instables malgré l’amélioration du transport maritime.
Pour le Cameroun, cette conjoncture internationale réduit la marge de compétitivité d’une filière pourtant en croissance. Entre août 2024 et juillet 2025, le pays a commercialisé 309 528 tonnes, contre 266 710 tonnes l’année précédente — une progression de près de 16 %. Mais cet effort d’augmentation de volume n’a pas suffi à compenser la dépréciation des prix mondiaux. Les revenus à l’exportation risquent donc de se contracter malgré la hausse des tonnages.







