La 7e édition de la Semaine mondiale de l’entrepreneuriat, lancée le 18 novembre 2025 à Yaoundé, intervient dans un contexte où la structure même du tissu productif camerounais connaît des recompositions visibles. Les données actualisées du ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Économie sociale et de l’Artisanat (Minpmeesa) fournissent un point de départ concret pour analyser ces mutations. Au 31 décembre 2024, le fichier statistique du ministère recense 444 302 entreprises, dont 443 524 petites et moyennes entreprises (PME). La concentration de 77,2 % de ces entreprises dans le secteur tertiaire confirme l’orientation majoritairement commerciale et de services de l’économie nationale.
Cette configuration illustre la faible diversification structurelle du tissu productif et renforce la nécessité d’une montée en capacités des entreprises opérant en amont des chaînes de valeur. La rencontre de Yaoundé, organisée sous le thème « Entrepreneuriat productif et opportunités de la loi portant régime de la sous-traitance », inscrit ce débat dans un cadre institutionnel précis.

La loi sur la sous-traitance prévoit, notamment, l’obligation pour l’entreprise principale de verser un acompte de 30 % avant le démarrage d’un marché, ainsi que le paiement du solde au plus tard 90 jours après la livraison. Ces deux obligations visent à sécuriser la trésorerie des sous-traitants, un point particulièrement sensible dans une économie où les retards de paiement constituent un frein majeur à la croissance des PME.
Dans un environnement largement tertiarisé, ce dispositif tente de rééquilibrer les rapports entre donneurs d’ordre et opérateurs de terrain, dont la solidité financière conditionne la capacité d’exécution. La démographie entrepreneuriale présentée par le ministre Achille Bassilekin III apporte un éclairage complémentaire. Le fichier statistique révèle une forte présence masculine dans les registres de création, mais indique une progression continue des femmes entrepreneures.
Cette montée en participation féminine traduit l’élargissement progressif des niches d’activité, même si la répartition sectorielle demeure encore inégale selon le genre. Le même document précise que 70 % des entrepreneurs ont entre 20 et 40 ans. Cet indicateur démographique traduit une dynamique d’entrée massive des jeunes dans l’auto-emploi, devenu un levier d’insertion dans un marché du travail formel limité. Cette structure d’âge influe directement sur les secteurs privilégiés : commerce, services numériques, micro-services, restauration, artisanat urbain et activités à faible besoin en capital fixe.
La Semaine mondiale de l’entrepreneuriat mobilise simultanément les dix régions du pays à travers des ateliers, visites d’entreprise, rencontres sectorielles et témoignages d’entrepreneurs. Cette diffusion territoriale cherche à renforcer les capacités locales, souvent pénalisées par un déficit d’accompagnement et une faible structuration des réseaux économiques hors des métropoles. Les success stories partagées lors des activités illustrent les trajectoires possibles dans cet environnement encore marqué par l’informalité et la fragilité financière des petites unités productives.
Dans une interview accordée à Défis Actuels, Achille Bassilekin III, ministre camerounais des PME décrit une stratégie d’intervention structurée autour de quatre leviers. Le premier repose sur le renforcement des capacités des jeunes porteurs de projets à travers des programmes de formation comme Empretec ou PMTIC, dont la vocation est de consolider les aptitudes entrepreneuriales de base. Le second levier concerne l’accès au financement. Les dispositifs tels que le Fonds-Proto ou les subventions aux incubateurs visent à réduire le risque supporté par les banques et à faciliter le démarrage des entreprises naissantes. Le troisième axe porte sur la diffusion d’une culture entrepreneuriale, matérialisée par la mise en place du Programme national d’incubation, du Programme de promotion de l’entrepreneuriat chez les femmes et les jeunes, ainsi que par la création de clubs d’entrepreneuriat dans les établissements scolaires. Le quatrième levier s’appuie sur des partenariats avec le ministère de la Jeunesse et d’autres institutions pour encourager la maturation de projets et faciliter l’accès au crédit, notamment via le futur Fonds de garantie aux jeunes entrepreneurs.
Selon les données communiquées, 91 structures d’incubation (22 publiques et 69 privées) sont aujourd’hui répertoriées. Plus de 42 000 jeunes ont bénéficié de formations techniques et managériales, tandis que la création d’entreprises progresse : 21 132 en 2024 contre 19 651 en 2023, dont 9 488 portées par des jeunes.






