lundi, novembre 3, 2025
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Cameroun – FMI : le Minfi plaide pour un nouveau partenariat plus adapté aux priorités nationales

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LOUIS PAUL MOTAZE, Ministre des Finances

Le ministre camerounais des Finances, Louis Paul MOTAZE, a pris part du 13 au 18 octobre 2025 aux Assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale à Washington, avec collègue Alamine Ousmane Mey, ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire. Une participation marquée par des échanges de haut niveau sur la trajectoire économique du Cameroun, les réformes engagées, et la possibilité d’un nouveau programme avec les institutions de Bretton Woods. « Nous avons eu de très bonnes discussions ici à Washington au cours de ces assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale. Comme cela se fait toujours, il y a des discussions beaucoup plus thématiques parce que nous avons rencontré des banques internationales, mais aussi la direction des affaires financières du FMI », a confié le ministre Louis Paul MOTAZE à l’issue des travaux.

DES PROGRÈS SALUÉS PAR LE FMI

Au cœur des discussions, la qualité des réformes menées ces dernières années par le gouvernement camerounais, notamment dans le domaine fiscal et la digitalisation des services publics, notamment à la Douana, au Trésor aux impôts, ainsi que dans la gestion de la solde et des carrières. « Le FMI nous assiste déjà beaucoup et ses responsables ont reconnu qu’il y a d’énormes efforts qui ont été faits en matière de digitalisation. L’objectif étant que nous recouvrions plus d’impôts, mais sans avoir à accentuer la pression les mêmes, » a souligné Louis Paul MOTAZE. « C’est souvent le problème : certains se plaignent que c’est toujours eux qui payent. Il faut donc élargir l’assiette fiscale pour que l’effort soit mieux partagé. » Le ministre des Finances s’est félicité du bilan positif du second programme triennal soutenu par le FMI, arrivé à son terme en 2025. « Nous avons eu une séance de travail extrêmement importante avec le directeur Afrique du FMI, assisté de son adjoint.

Étaient également présents celle qui sera désormais la cheffe de mission pour le Cameroun au FMI. Au cours de cette discussion, nous avons essentiellement procédé à la revue, ou si je peux dire, à l’évaluation des deux programmes que nous avons menés à leur terme. Tout le monde a constaté que les choses se sont bien passées : nous avons atteint 41 repères structurels prévus dans le programme, qui sont pratiquement tous réalisés. La question maintenant est de savoir : what next ?, comme on dit ici à Washington au siège du FMI. »

VERS UN NOUVEAU PROGRAMME ADAPTÉ AUX PRIORITÉS NATIONALES

Ainsi, sur la suite de la coopération avec le FMI après la fin en juillet dernier du programme en conclu en 2021, Louis Paul MOTAZE, le Ministre des Finances, n’a pas caché l’intérêt du Cameroun pour un nouveau cadre d’accompagnement, à condition qu’il tienne compte des priorités internes du pays. « Je ne peux pas préempter la décision qui sera prise par notre hiérarchie, mais il est clair que certains problèmes se posent et qui peuvent plaider en faveur d’un nouveau programme.

D’abord, il y a des réformes qui ont été menées : il faudra les poursuivre, en renforcer certaines et en internaliser d’autres. Quand je dis internaliser, je veux dire que, bien souvent, les réformes sont réalisées parce qu’on nous l’a demandé. Et une fois qu’elles sont achevées, on a tendance à les oublier. Il faut donc les intégrer pleinement, notamment en matière de gestion et d’évaluation des entreprises publiques, ainsi que dans la systématisation des rencontres entre le secteur public et le secteur privé. C’est, à mon avis, une raison fondamentale pour continuer dans cette voie. » Parmi les axes évoqués figurent la gouvernance des entreprises publiques, la systématisation du dialogue public-privé et l’évaluation régulière de la performance économique.

Le ministre a également rappelé les apports concrets des deux précédents programmes conclus avec le FMI et d’autres bailleurs, et le risque de tarissement de certains financement si jamais un autre programme n’était pas conclu : « Une deuxième raison, qui me semble extrêmement importante, mérite d’être rappelée : ces deux programmes nous ont permis de bénéficier de ce qu’on appelle des appuis budgétaires, du FMI et d’autres partenaires au développement tels que la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la France, etc. Nous avons ainsi mobilisé plus de 2 600 milliards de francs CFA. Si ces appuis venaient à s’arrêter, il y aurait nécessairement un trou dans le budget qu’il faut combler. Il faudra bien trouver les moyens de le financer. C’est un également un aspect qu’il faut envisager.

MAINTENIR LA STABILITÉ FINANCIÈRE DE LA ZONE

 Le Cameroun, pilier économique de la sous-région, joue un rôle central dans la stabilité financière de la CEMAC. « Le Cameroun représente pratiquement la moitié des réserves et du PIB de la CEMAC. Si le Cameroun n’est pas sous-programme, à quoi servirait celui de la CEMAC ? », a questionné Louis Paul Motaze, insistant sur la dimension régionale des discussions tenues à Washington, et nécessité d’inscrire les relations entre le Cameroun et le FMI dans une perspective régionale. Mais pour le ministre, un nouveau programme devra aussi intégrer les attentes exprimées par les populations lors de la récente élection présidentielle. « Comme tout gouvernement démocratique, nous avons écouté ce que disaient les citoyens, qu’ils aient voté pour nous ou non. Un futur programme devra tenir compte de la nécessité d’investir davantage pour créer des emplois, notamment pour les jeunes, et accélérer la réalisation des infrastructures. »

Avec un déficit budgétaire ramené à 1,5 % du PIB – contre plus de 6 % en 2017 – le Cameroun a redressé ses fondamentaux, mais au-delà de ce redressement remarquable des finances publiques, le ministre veut désormais « une inflexion » vers la croissance inclusive. « Nous avons actuellement un déficit budgétaire de 1,5 %. Tout le monde a applaudi, car nous sommes passés d’environ 7 % en 2017, au début du premier programme, à seulement 1,5 % aujourd’hui. C’est une très bonne performance.

Mais est-ce que cela permet d’investir davantage pour créer des emplois, notamment pour les jeunes, et répondre aux problèmes d’infrastructures que nous connaissons ? Il y a là toute une réflexion à mener, même dans l’hypothèse d’un nouveau programme, afin de voir comment introduire une inflexion sur un certain nombre de points et s’attaquer de manière plus frontale aux problèmes soulevés par les populations.

Au terme de ses échanges avec le directeur Afrique du FMI et la future cheffe de mission pour le Cameroun, Louis Paul MOTAZE s’est dit satisfait de la qualité du dialogue. « Nous sommes tombés d’accord qu’ils attendront la position du Cameroun. Nous sommes ouverts à un programme, mais tout dépendra du type de programme. L’important, c’est qu’il soit aligné sur nos priorités nationales et nos impératifs de développement, » a conclu le Ministre des Finances Louis Paul MOTAZE.

La production des œufs de table menacée par la pression fiscale

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En 2024, de grands producteurs ont dû mettre la clé sous le paillasson, occasionnant une baisse drastique de l’offre d’au moins 20 000 tonnes au 31 décembre dernier, tandis que la filière souffre déjà de problèmes structurels.

Selon les données de l’Interprofession Avicole du Cameroun (Ipavic), le cheptel de poules pondeuses est passé de 9 millions en 2016 à moins de 5 millions en 2025. Conséquence, la production des œufs de table est à la baisse ces dernières années. Au 1er décembre 2024 en l’occurrence, le gouvernement estime à 95501 tonnes d’œufs produits, soit une chute de moins 28% comparé à la même période en 2023. Le déficit s’est davantage creusé avec la fermeture récente de grandes unités de production avicoles sous le prétexte d’une forte pression fiscale.

« De grandes fermes de plus de 200.000 pondeuses ont fermé carrément les portes. Vous imaginez que, malgré tout ça, les agents des impôts viennent mettre la pression sur ceux qui ont été un peu résilients », regrette François Djonou, président de l’Ipavic qui célébrait en différé à Douala le 21 octobre dernier, la journée mondiale de l’œuf consacrée le deuxième vendredi du mois d’octobre.

 Cet environnement des affaires peu propice décrié par les aviculteurs se greffe aux difficultés que rencontre la filière depuis plusieurs années. L’approvisionnement en intrants menace fortement la production. Le maïs, principal élément de la provende, connaît une flambée de prix. « On a eu des coûts de matières premières, principalement le maïs, parce que c’est une denrée qui rentre à près de 60% dans l’aliment de la poule. Cette denrée a vu son prix pratiquement doubler, et ceci a été dû à différentes crises, surtout à l’échelle internationale, telles que la crise du Covid que nous avons tous connues. Il y a même la guerre en Ukraine qui a beaucoup impacté sur le coût de production du maïs au Cameroun », explique Victor Viban, délégué régional littoral du ministère des Pêches, de l’Elevage et des Industries Animales (Minepia).

Pour faire face à cette explosion des prix du maïs dont la production locale est en berne, le gouvernement a autorisé cette année, l’importation de 30 000 tonnes de cette céréale pour le compte du premier trimestre. Mais l’Ipavic espère des mesures encore plus fortes pour soutenir la relance de cette filière qui se relève progressivement de diverses crises, notamment de l’épizootie de grippe aviaire de 2022.

Interview

 François DJONOU, président IPAVIC

 « Depuis 2018, nous avons besoin d’être appuyés à nouveau »

Le président de l’Interprofession Avicole du Cameroun revient sur la situation actuelle de la filière et des défis auxquels font face les producteurs.

Monsieur le Président, les chiffres font état d’une baisse globale de la production nationale des œufs de table. De quel poids pèse aujourd’hui la filière avicole et quels sont les principaux bassins de production ?

Les grands bassins de production au Cameroun, c’est principalement à l’ouest du Cameroun. On en produit dans le littoral, dans le centre. Mais l’ouest du Cameroun représente pratiquement 70%. Et ceci justement parce que le climat y est favorable. Il y a de cela environ une quinzaine d’années, dans le littoral, on produisait autour de 30% d’œufs. Mais à cause du changement climatique, on produit de plus en plus dans l’ouest du Cameroun parce que le climat est assez favorable. Actuellement aussi, depuis quelques années, on observe des fermes qui s’installent aussi du côté de l’est. Nous comptons dans l’ensemble autour de 560 fermes agricoles. Mais c’est réparti inégalement. 70% à peu près, à l’Ouest et c’est dans cette région qu’on a aussi des fermes de très grande taille. Dans le nord, il y a des fermes de petite taille. Dans l’est du Cameroun aussi, il y a des fermes de petite taille. Dans le centre, il y a des fermes de taille moyenne, en général. Voilà à peu près comment c’est réparti.

Quelle est la capacité de production annuelle ?

En fait, je vais vous parler plutôt du cheptel. Parce qu’en 2018, nous avions près de 9 millions de poules. Le cheptel a baissé. Je crois qu’aujourd’hui, on est à moins de 5 millions de poules. Sur l’ensemble du territoire national. On parle de 5 millions de poules en production. C’est vrai qu’à partir de là, on peut faire des petits calculs pour avoir le nombre d’œufs.

De quel appui gouvernemental a bénéficié l’Ipavic ?

Au niveau des appuis des pouvoirs publics, depuis quelques années, nous n’avons pas eu d’appui, malheureusement. Nous avons fait des lettres, des démarches, si vous voulez. On a même tenu plusieurs réunions pour que l’État intervienne dans le secteur avicole, parce que, comme je l’ai mentionné, on a connu beaucoup de crises, même au niveau international, même au Cameroun, parce qu’il y a eu même des problèmes de changement climatique qui ont impacté sur la production du maïs dans le Grand Nord, comme vous connaissez. Nous avons donc demandé à l’État de nous appuyer, plusieurs fois jusqu’à aujourd’hui. On n’a pas encore eu un retour des pouvoirs publics, mais ça ne veut pas dire que l’État ne nous a jamais appuyé, parce que l’État a quand même appuyé la filière avicole.

Après la crise de grippe aviaire de 2006, vous vous souvenez que l’État nous a fait importer 4200 tonnes de maïs. Les 4200 tonnes sont passées par ici. C’est moi-même qui avais géré ces 4200 tonnes. Après toujours cette crise, en octroyant une subvention aux accouveurs pour repeupler les fermes parentales, parce qu’à l’époque, il était question de mettre à disposition des élèves des poussins pour redémarrer dans l’activité agricole. Il y a eu quand même des appuis, mais depuis 2018, nous sommes vraiment dans le besoin d’être encore appuyés à nouveau.

Quelles étaient réellement les attentes de l’interprofession ?

Après les différentes crises que j’ai citées tout à l’heure, le coût du maïs est passé de 170 à 350 francs. Une denrée qui entre à 60% dans la production d’aliments. Cette denrée est passée à 360 francs le kilo. Nous avons donc demandé à l’État de nous aider à avoir cette denrée. Notre demande était principalement axée sur l’apport en maïs. Il fallait que l’État nous mette à notre disposition près de 9000 tonnes de maïs.

Plusieurs fermes ont récemment mis la clé sous le paillasson. Comment appréciez- vous globalement l’environnement des affaires ?

Malgré les difficultés que les agriculteurs traversent, ils sont toujours sous la pression des agents des impôts. Ils ne comprennent pas que nous traversons, que nous avons, et que nous traversons encore une période très difficile due à ces différentes crises. Ils ne comprennent pas que l’activité a baissé. De grandes fermes de plus de 200.000 pondeuses ont fermé carrément les portes. Donc vous imaginez que, malgré tout cela, les agents des impôts viennent lui mettre la pression sur ceux qui ont été un peu résilients. Il y en a même qui ont réduit le cheptel, à 80%. Mais là, les 20% qui restent, on les met sous pression. Il faut le dire, c’est vraiment négatif. Ce que les agents des impôts font, c’est pour décourager tous ceux qui essaient encore de faire dans la filière.

Fintechs illégales : prêts express, taux abusifs… les dérives cachées des applications de microcrédit

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Sur le réseau social Meta (ex Facebook), Mathieu Ngom, jeune habitant de Yaoundé, découvre une application mobile de crédit vantant des prêts instantanés sans garantie. Séduit par l’offre, il y souscrit un crédit de 16 000 FCFA, mais ne reçoit que 10 400 FCFA via Mobile Money, envoyé par un numéro identifié au nom d’une Fintech située à Douala, fondée en 2021 dans le but de fournir des solutions de paiement apprend-on.

 Au moment du remboursement, il doit payer 16 104 FCFA, soit un taux implicite d’environ 40 % sur sept jours. « Ils m’ont dit que le délai de paiement est de sept jours, mais dès le quatrième jour, ils m’appelaient toutes les cinq minutes pour exiger le remboursement », raconte-t-il. Lorsqu’il s’interroge sur les montants, une standardiste lui explique : « Notre intérêt est de 104 FCFA seulement, les 6 000 FCFA, c’est pour l’application ». Une justification confuse qui masque un coût réel du crédit bien supérieur aux standards légaux. Au-delà du taux excessif, les pratiques de harcèlement et d’intimidation s’avèrent systématiques.

Mathieu découvre que l’entreprise appelle non seulement les contacts fournis lors de l’inscription, mais aussi des numéros présents dans son historique d’appels. Les plateformes de prêt en ligne obtiennent en effet, dès l’installation de l’application, l’accès aux données personnelles, aux répertoires téléphoniques et parfois même aux fichiers multimédias de l’utilisateur. Ces informations deviennent ensuite un levier de pression psychologique ou une ressource monétisable.

DES MICROCRÉDITS SOURCE DE SURENDETTEMENT DES USAGERS

 Dieudonné, autre victime, illustre cette dérive. Après avoir contracté pour 90 000 FCFA de crédit, il se voit réclamer plus de 140 000 FCFA à rembourser. Le taux effectif qui avoisine également 40%, avec des échéances resserrées sur quelques jours. Lorsque le jeune homme tente de négocier, les prêteurs contactent ses collègues de travail, leur affirmant qu’ils sont garants de sa dette et risquent d’être signalés à la « Banque centrale ». Sous le poids du harcèlement, Dieudonné change de numéro et de compte mobile money.

Les publicités de ces plateformes restent omniprésentes sur les réseaux sociaux, notamment sous forme de vidéos promotionnelles. Elles vantent des taux d’intérêt mensuels fixés à 1 %, des délais de remboursement pouvant atteindre trois mois selon le montant emprunté, et l’absence totale de garantie exigée — des arguments séduisants qui ciblent les publics les plus vulnérables. « Pas de collatérale, pas de complication », clament-elles, avant d’assurer que l’argent est transféré « en moins de trois minutes » sur le compte mobile de l’emprunteur. Une offre séduisante, mais trompeuse : les intérêts cumulés, frais cachés et pénalités de retard transforment rapidement ces microcrédits en spirales de surendettement.

UN COMMERCE LUCRATIF DES DONNÉES PERSONNELLES DES USAGERS

Selon un économiste rencontré à Yaoundé, ces pratiques s’inscrivent dans une économie spéculative du crédit et de la donnée. Les fintechs de prêt non agréées construisent leur rentabilité sur deux leviers : d’une part, la marge usuraire issue d’intérêts cumulés, frais d’extension et pénalités ; d’autre part, la revente ou l’exploitation des données personnelles collectées auprès des utilisateurs. Ces informations – numéros de téléphone, géolocalisation, historique de paiement – sont valorisées sur des marchés secondaires du ciblage publicitaire ou de la notation comportementale, apprend-on dans la foulée.

Cette logique transforme la dépendance au crédit en produit économique. En monétisant à la fois le besoin d’emprunter et les traces numériques de l’utilisateur, ces entreprises réalisent des marges spéculatives difficilement traçables. La promesse d’inclusion financière masque ainsi un modèle d’exploitation fondé sur la précarité et la collecte massive de données personnelles.

Cette pratique, assimilable à de l’usure, est formellement interdite par la législation camerounaise. L’article 325 du Code pénal la définit comme le fait d’exiger ou de percevoir des intérêts supérieurs aux taux légalement fixés pour des prêts similaires. Les contrevenants s’exposent à une amende comprise entre 5 000 et 1 000 000 FCFA, doublée en cas de récidive, ainsi qu’à une peine d’emprisonnement allant de quinze jours à un an. Face à la multiplication des plaintes, le Ministère des Finances a publié, le 5 mai 2025, un communiqué rappelant que plusieurs sociétés exercent sans agrément des activités d’octroi de crédit, de transfert d’argent et de collecte de fonds via des plateformes numériques.

Le ministre y enjoint les promoteurs « de cesser immédiatement leurs opérations ainsi que toute forme de publicité ou de communication liée à ces activités financières ». Six mois après cet avertissement du ministre des Finances, plusieurs applications de prêt à court terme restent accessibles sur le Google Play Store, en violation des règles de la plateforme, qui interdisent les crédits d’une durée inférieure à soixante jours ou susceptibles d’« exposer les utilisateurs à des produits financiers trompeurs ».

En l’absence d’un contrôle effectif et d’une régulation numérique claire, ces fintechs continuent de prospérer dans les zones grises du marché financier camerounais. L’endettement à la demande, présenté comme une solution d’urgence, devient pour beaucoup un piège à intérêts où chaque clic, chaque donnée et chaque minute de retard se monétisent au profit de plateformes hors de portée des régulateurs.

Assainissement du secteur financier : le Minfi prépare la traque des opérateurs illégaux

Le ministère des Finances (Minfi) prépare une étape décisive dans la lutte contre les services financiers numériques non agréés. Une liste noire des plateformes de prêts et de transferts d’argent opérant sans autorisation est en cours de finalisation, selon une source interne au ministère. Elle servira de base à une phase répressive visant à assainir le marché, protéger les consommateurs et préserver le marché des établissements financiers légalement autorisés.

Dans un communiqué publié le 5 mai 2025, le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, a dénoncé les activités de plusieurs sociétés opérant sur Internet sans agrément. Avec un ton ferme, le ministre s’est adressé « aux promoteurs des plateformes de collecte de fonds du public et de prêt en ligne, de cesser immédiatement leurs opérations ainsi que toute forme de publication, communication ou publicité en rapport avec l’activité financière ou susceptible de créer la confusion å ce sujet », lit-on dans le communiqué.

Ces entreprises mènent des opérations de collecte de fonds, d’octroi de crédit et de transfert d’argent en dehors du cadre légal. Elles utilisent des plateformes et applications numériques attractives, mais échappent à tout contrôle réglementaire. Le ministre exige également dans sa sortie, la suspension des campagnes de communication et de publicité de ces plateformes, souvent présentées comme des solutions rapides d’inclusion financière.

Selon une source au sein de ce département ministériel, plusieurs entreprises ont déjà déposé des dossiers de demande d’agrément depuis la publication du communiqué. Cette régularisation est exigée par la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac), l’organe chargé de superviser les établissements de crédit et de microfinance dans la sous-région. Mais la même source précise que certaines plateformes de crédit en ligne persistantes seront contraintes de fermer, une fois la liste noire rendue publique. Cette opération de recensement et de répression marque un tournant dans la régulation du secteur financier numérique au Cameroun.

En renforçant la traçabilité et la conformité des acteurs, le gouvernement cherche à éviter que les innovations technologiques ne deviennent des vecteurs d’arnaque et de déstabilisation monétaire. L’enjeu est double : protéger les usagers contre des pratiques abusives, tout en garantissant une concurrence loyale pour les institutions financières agréées, indique notre source au sein du ministère. Le rappel à l’ordre s’appuie sur le règlement du 21 décembre 2018 de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), qui encadre les services de paiement.

Ce texte impose un agrément préalable à tout opérateur souhaitant exercer une activité financière professionnelle. L’agrément est une autorisation officielle délivrée par le ministère des Finances après vérification de la solidité juridique, technique et financière de l’entreprise. Il garantit que celle-ci est apte à manipuler des fonds du public en toute sécurité.

Dans son communiqué, le Minfi fixe un délai de trois mois aux promoteurs concernés pour régulariser leur situation. Passé ce délai, les contrevenants seront sanctionnés conformément à l’article 84 du règlement précité. Les sanctions peuvent aller jusqu’à la fermeture des plateformes, des poursuites administratives et judiciaires, voire des amendes lourdes. En parallèle, les prestataires agréés, les entreprises et les administrations publiques doivent rompre toute collaboration avec ces structures non autorisées, afin de couper leurs circuits de financement et d’éviter la contamination de l’économie formelle.

A l’observation, le ministère des Finances veut ainsi restaurer un équilibre entre innovation et sécurité, en s’appuyant sur la réglementation de la CEMAC et la supervision de la Cobac. Pour les consommateurs, cette campagne rappelle une règle simple : toute application ou plateforme proposant des crédits ou transferts d’argent sans agrément officiel présente un risque réel de perte et d’abus.

Crédit numérique : les applications de microcrédit dans le viseur du régulateur bancaire

Présentées comme un outil d’inclusion financière, les applications de crédit numérique exposent les usagers à des risques croissants. La Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) et le ministère des Finances renforcent leur contrôle face au surendettement et à l’exploitation des données.

Le rappel à l’ordre est clair : aucune plateforme de prêt ou de transfert d’argent ne peut exercer sans autorisation préalable. Cette exigence découle du règlement CEMAC du 21 décembre 2018 relatif aux services de paiement, qui établit le cadre juridique de la finance numérique dans les six pays membres. Ce texte interdit à toute personne physique ou morale non agréée de fournir, à titre professionnel, des services tels que la collecte de fonds, l’octroi de crédit, le transfert d’argent ou toute autre opération liée à la gestion des moyens de paiement.

L’objectif est de protéger les fonds du public et de préserver la confiance dans le système financier sous-régional. En pratique, cela signifie qu’une entreprise qui propose du microcrédit via une application mobile doit disposer d’un double agrément : celui du ministère des Finances, en tant qu’établissement de paiement, et celui de l’Agence de régulation des télécommunications (ART), pour l’usage des technologies de téléphonie mobile.

Ce contrôle conjoint vise à vérifier la solidité juridique, technique et financière des opérateurs avant leur entrée sur le marché. La Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) joue un rôle clé dans ce dispositif. Conformément à l’article 19 du règlement, elle assure la surveillance de la conformité et de la sécurité des solutions techniques utilisées pour fournir les services de paiement. Lorsque ces services reposent sur des technologies mobiles, la BEAC peut collaborer avec les autorités nationales de régulation des télécoms pour s’assurer de la fiabilité des plateformes.

Cette articulation institutionnelle illustre la complexité de la régulation du secteur, situé à la croisée de la finance et du numérique. Les établissements de crédit et de microfinance déjà agréés dans la CEMAC ne sont pas exemptés de contrôle. L’article 37 du règlement du 21 décembre 2018, les oblige à déclarer à la Cobac tous les services de paiement proposés et les outils technologiques utilisés. Tout changement ou extension d’activité doit être notifié et validé par la Commission bancaire.

Cette exigence vise à éviter la prolifération d’offres non autorisées sous couvert d’activités déjà agréées. Les sanctions prévues en cas de non-conformité sont strictes. Les articles 79 à 81 du règlement interdisent la fourniture illégale de services de paiement et toute communication susceptible d’induire le public en erreur. Il est par exemple interdit à un établissement de paiement de se présenter comme une banque, afin d’éviter toute confusion sur la nature de ses activités.

Ces mesures visent directement les plateformes de crédit en ligne qui ont proliféré au Cameroun ces dernières années. Nombre d’entre elles opèrent sans agrément, promettant des prêts rapides, accessibles en quelques clics, mais assortis de taux d’intérêt très élevés et de clauses opaques. En contournant les mécanismes de contrôle bancaire, ces opérateurs exposent les emprunteurs à des risques de surendettement, de fraude et de violation de leurs données personnelles.

En durcissant les règles du jeu, les autorités monétaires et financières cherchent à rétablir un équilibre : garantir l’accès aux services financiers tout en protégeant les consommateurs contre les excès d’un marché encore largement informel.

Cop30: l’urgence de mesures internationales concrètes pour préserver les zones humides

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En prélude aux négociations sur le climat, prévues en novembre prochain, les gouvernements sont appelés à intégrer la conservation des zones humides dans leurs plans nationaux sur le climat et à augmenter le financement des solutions sur la nature étant donné que ces zones disparaissent trois fois plus vite que les forêts, libérant d’énormes réserves de carbone accumulées au cours des millénaires.

Les zones humides d’eau douce sont en train de disparaître, alerte un rapport de l’Environmental Justice Foundation (EJF) présenté à l’ambassade de l’UE au Brésil. D’après l’ONG, les zones humides d’eau douce, du bassin du Congo à l’Asie du Sud-Est en passant par le Pantanal au Brésil, sont les plus négligées de la planète en matière de climat.  Or, « ces écosystèmes stockent d’énormes quantités de carbone, régulent les flux d’eau et soutiennent la biodiversité et les moyens de subsistance dans le monde entier. Pourtant, ils sont asséchés, brûlés et détruits à un rythme alarmant, déclenchant une « bombe carbone » et compromettant fatalement les objectifs climatiques mondiaux », avertit EJF.

Le rapport indique que les zones humides disparaissent trois fois plus vite que les forêts, libérant ainsi d’énormes réserves de carbone accumulées au cours des millénaires.  Pour exemple, les tourbières du bassin central du Congo stockent à elles seules environ 29 milliards de tonnes de carbone, soit l’équivalent de 33 ans d’émissions de gaz à effet de serre de l’UE, et que la zone humide du Pantanal contient trois fois plus de sols tourbeux que l’Amazonie.  « Nous assistons à la mort lente des écosystèmes qui régulent silencieusement le climat de notre planète. Le rôle du Brésil en tant qu’hôte de la COP30 lui offre une occasion unique de montrer l’exemple, mais le reste du monde doit également se mobiliser. La protection des zones humides telles que le Pantanal doit être au cœur de l’action climatique mondiale. Il ne s’agit pas de terres marginales, mais de nos systèmes naturels de survie », », a déclaré Luciana Leite, représentante en chef de l’EJF pour le Brésil.

Plus de financement

Dix recommandations clés sont contenues dans le rapport. Entre autres, l’intégration de la protection des zones humides dans les contributions déterminées au niveau national (CDN), l’inclusion des émissions et de la restauration des zones humides dans les inventaires nationaux des gaz à effet de serre et l’intensification de la recherche sur les tourbières tropicales. Les gouvernements sont surtout appelés à augmenter le financement des solutions fondées sur la nature qui protègent les populations et la biodiversité. Selon EJF, le financement des solutions fondées sur la nature reste bien en deçà des besoins.

Des mesures internationales urgentes sont préconisées étant donné l’importance des zones humides. Elles jouent en effet un rôle dans la mise à disposition de la ressource en eau potable, l’atténuation des inondations et le soutien des étiages. Elles contribuent également à l’épuration des eaux, et à la préservation de la biodiversité en hébergeant une faune et une flore spécifiques.

Leçons post-présidentielle 2025 : la sourde-oreille de l’élite RDPC face aux messages des urnes

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Les résultats officiels de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025 seront proclamés, le 27 octobre 2025 par le Conseil constitutionnel. Ils ne seront probablement pas très différents de ceux déjà en circulation sur les réseaux sociaux, après la compilation des résultats faite par la Commission nationale de recensement général des votes. Des résultats qui donnent Paul Biya, vainqueur avec environ 53% des suffrages exprimés, suivi par Issa Tchiroma Bakary, 35%. Mais la vérité des urnes selon le candidat Issa Tchiroma Bakary est toute autre. Au soir du 12 octobre 2025, il s’est déclaré vainqueur de cette élection, selon les tendances issues des bureaux de vote. Bien évidemment, cette vérité ne sera pas celle du Conseil constitutionnel, l’instance juridictionnelle habilitée à proclamer officiellement les résultats de l’élection présidentielle.

 Et déjà depuis lundi dernier, les cadres du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), le parti du président candidat Paul Biya, sont mis à contribution pour préparer l’opinion publique à se détourner des éventuelles contestations incitées par certains candidats à cette élection. En exécution des « Très hautes prescriptions » du Président Paul Biya, ces élites sont de nouveau envoyées sur le terrain, pour délivrer « un message de rejet total de la violence et d’impératif respect du verdict des urnes à venir, visant à contrecarrer les appels au chaos lancés par des acteurs politiques en attendant la décision du Conseil constitutionnel », apprend-on de la communication de ce parti.

Les mises en garde du RDPC

Dans la région de l’Est par exemple, le ministre Joseph LÉ, ignorant le message d’une autre élite de cette région, Michel Ange Anguing qui, dans une tribune au lendemain de l’élection présidentielle, reconnaissait que « les bastions imprenables du RDPC sont pour la plupart ébranlés dans leurs fondations » et que « le moment est certainement venu pour chaque militant, sympathisant ou allié du RDPC d’évaluer sa contribution à la victoire souhaitée du candidat président ». Mais le plénipotentiaire politique de la région de l’Est va plutôt mette en garde les populations contre les manipulations qui conduiraient à la destruction de leurs villes. Tout en insistant sur le fait que le vrai gagnant doit être le Cameroun, et en réitérant le message de paix du Chef de l’État. Il va également mettre en garde la population contre les conséquences dévastatrices de la violence, insistant sur la primauté de la stabilité et du vivre-ensemble sur toute ambition politique individuelle. Pourtant, comme le pense Mgr Paul Lontsie, évêque de Bafoussam, « On ne peut pas parler de paix et bourrer les urnes, voler la victoire du peuple. La paix va ensemble avec le respect de la volonté populaire ».

Les vraies raisons de la débâcle électorale ignorées

La tribune de l’ancien ministre Michel Ange Angouing, si elle a le mérite d’appeler les cadres de son parti à une autocritique pour comprendre les véritables causes de leur échec électoral et s’ajuster. Elle cache mal le malaise actuel au sein de ce parti. L’on se regarde en chiens de faïence. Des messages comme « Présidentielle 2025: Philippe Mbarga Mboa, l’homme de main du SGPR, Ferdinand Ngoh Ngoh accuse le ministre Etoundi Ngoa de faire partie des ministres qui ont félicité Issa Tchiroma Bakary », écument les réseaux sociaux. L’on se rejette donc mutuellement la responsabilité de l’échec électoral. Ou alors, on se réfugie derrière un supposé vote communautaire, comme le reconnaissait Félix Zogo, le Secrétaire général du ministère de la Communication, au cours d’un débat télévisé sur les antennes de la télévision Vision 4, le 19 octobre 2024. Toute chose qui frise la stigmatisation. C’est cette logique de stigmatisation qui peut d’ailleurs transparaitre de cette invitation du préfet de la Sanaga Maritime, Cyrille Yvan Abondo, à la suite de ceux du Wouri et de Guider, invitant les chefs des communautés Bamiléké, du Grand Nord et Anglophones, regroupées et organisées d’Édéa à une séance de travail prévue, le mardi 21 octobre à la préfecture, pour consolider la paix et le maintien de l’ordre.

Pourtant, les véritables raisons de cet échec électoral n’ont aucune couleur tribale. C’est tout simplement l’expression d’un raz-le-bal social face aux difficultés que rencontre l’ensemble de la population actuellement. La vie chère, le chômage des jeunes, la pauvreté ambiante, avec son corollaire de faible pouvoir d’achat des Camerounais, la mauvaise gouvernance, etc., n’ont de couleur ethnique. Et, c’est ce raz-le-bal qui a été exprimé à travers les urnes, le 12 octobre 2025.

Blaise Nnang

Tensions: Manifestations pro-Tchiroma à Yaoundé et Garoua

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Alors que l’audience du contentieux post-électoral est attendue ce 21 octobre 2025, des caciques d’Issa Tchiroma entendent réclamer la victoire de leur champion dans les rues. A Yaoundé, des marcheurs se sont lancés sur la bretelle entre le carrefour Warda et l’Ecole nationale supérieure de police. Des manifestations improvisées que la police et la gendarmerie ont tenté de maitriser et de circonscrire autour du Palais des sports. Pendant ce temps, d’autres foyers sont nés sur l’axe principal de Madagascar et à la sous-préfecture de Tsinga. Des camions de la gendarmerie veillent au grain, et parviennent à immobiliser des manifestants aux abois, scandant des chansons à la gloire du candidat du Front pour le Salt national du Cameroun (Fsnc). Au fur et à mesure, le nombre s’accroit. L’on annonce des interpellations. De source crédible, des renforts sécuritaires sont en route pour la capitale.

Couvre-feu à Garoua

On apprend de sources journalistiques que la ville de Garoua avait déjà engagé les hostilités avant. « Des manifestants ont pris d’assaut les rues dans la zone du Carrefour 8», renseigne un confrère en service dans la ville. Il s’agit d’un des coins de la ville où des échauffourées avaient eu lieu le 12 octobre dernier, jour même de l’élection présidentielle. C’est là que, à un jet de pierre de sa maison, Issa Tchiroma avait été « sauvé » par la foule de partisans, alors que la gendarmerie l’avait déjà encerclé.

Des manifestants près de l’école de police

Le prefet de la Benoué a instauré un couvre-feu dans son territoire de commandement, entre 20h et 5h. Le patron de l’administration territoriale dans ce département dont est originaire Issa Tchiroma, a convoqué la presse cet après-midi. L’on en saura un peu plus dans les prochaines heures.

Porciculture : Proporc vise 1,3 milliard de consommateurs africains de viande de porc

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La Chambre d’Agriculture, de Pêche et d’Élevage (CAPEF) s’est engagée depuis quelques mois à moderniser une filière porcine longtemps artisanale pour la rendre compétitive sur le marché national et la zone du libre-échange continental africain (ZLECAf). Le dossier Proporc prévoit, d’ici 2026, la construction de 500 fermes modernes et la mise en service de plusieurs abattoirs industriels — une architecture destinée à faire basculer la production vers une logique d’échelle et d’exportation.

Sur le plan financier et opérationnel, le projet s’appuie sur des partenaires étrangers notamment avec la société française I-TEK qui a annoncé un apport technique et financier d’environ 5 milliards FCFA pour la construction des unités, tandis qu’un volet génétique confié à des acteurs comme Axiom doit améliorer les performances zootechniques des élevages. Le pilote est programmé à Bankim (Adamaoua) et la phase de déploiement s’étend sur plusieurs régions. Le calcul économique motive l’urgence, le Cameroun accuse un déséquilibre structurel entre offre et demande.

 Les estimations publiques et professionnelles varient — une production nationale souvent citée autour de 30 000 tonnes contre une demande évaluée entre 50 000 et 75 000 tonnes selon les sources — ce déficit structurel nourrit l’argument central du Proporc : combler le marché intérieur puis convertir l’excédent en recette d’exportation. Sur le plan technique, le modèle retenu est calibré et chiffré : chaque ferme-type comptera 28 truies pour une production estimée à 1 500 porcelets par an — hypothèses fournies par la CAPEF — et, à terme, la capacité cumulée des fermes projetées doit permettre d’atteindre une masse critique de production.

La stratégie de développement de la filière porcine repose sur quatre leviers étroitement liés : moderniser les infrastructures et les abattoirs pour répondre aux normes internationales, lancer des programmes d’amélioration génétique combinant races adaptées au climat et lignées plus performantes, sécuriser l’approvisionnement en intrants tels que les aliments et produits vétérinaires, et enfin élargir l’accès aux marchés nationaux comme régionaux. L’ambition affichée est claire : faire évoluer l’élevage porcin d’initiatives dispersées vers une véritable chaîne de valeur intégrée, capable de peser dans l’économie camerounaise et au-delà. L’orientation vers la ZLECAf est stratégique. La zone continentale offre un marché potentiel d’environ 1,3 milliard de consommateurs et, selon la Banque mondiale, l’accord continental peut accroître significativement les échanges intra-africains — des projections évoquent des gains substantiels pour les filières industrielles intégrées.

Pour le CAPEF, la ZLECAf représente la débouchée naturelle d’un surplus camerounais industrialisé. Mais un défi de taille subsiste : la résilience sanitaire et climatique, condition sine qua non de la réussite industrielle. Experts et partenaires insistent sur l’urgence d’introduire des races porcines adaptées aux fortes températures, de sécuriser les chaînes d’approvisionnement en intrants, et de renforcer les dispositifs de surveillance zoosanitaire. Ces exigences techniques, dictées par la fréquence des chocs épidémiques qui affectent la porcherie mondiale et africaine, sont cruciales pour éviter que la montée en puissance du projet ne soit fragilisée dès ses fondations.

Pour les acteurs nationaux — éleveurs, transformateurs, distributeurs — Proporc ouvre une fenêtre d’opportunité d’emplois avec une estimation d’environ 2 000 emplois directs, apprend-on, de formation dans le centre pilote en cours d’implantation à Bankim, dans la région de l’Adamaoua et l’intégration des chaînes de valeur. Mais la réussite passera par trois conditions politiques et économiques : sécurisation du financement privé/public, mise en conformité sanitaire et traçabilité, et construction d’un corridor logistique compétitif pour l’export intra-africain.

Cameroun: la transformation industrielle de la viande de porc reste encore faible

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Elle reste le parent pauvre d’une filière pourtant en forte croissance. La transformation industrielle de la viande porcine au Cameroun reste faible et en croissance. La filière souffre d’un manque de maîtrise des techniques modernes de production, de transformation et de valorisation de la viande porcine. Il y a encore un besoin de construction et de modernisation des abattoirs, des unités de transformation, et de systèmes de conservation (chambres froides). Bien que la production et la consommation de porc augmentent, le marché reste dominé par les ventes de produits frais ou de produits issus d’abattages artisanaux. La transformation industrielle, en produits élaborés, notamment en jambon, saucisses, viande hachée, et autres produits dérivés, nécessitant des techniques de préparation spécifiques, est encore embryonnaire, bien qu’il existe des opportunités de développement.

 L’USINE DE TRANSFORMATION DE NKOLAFAMBA TOUJOURS ATTENDUE

C’est le cas par exemple, dans le cadre du projet Proporc, avec la construction annoncée d’une usine de transformation industrielle de porc dans la commune de Nkolfamba, région du Centre. Malheureusement, malgré la signature d’une convention, le 11 avril 2023, entre cette collectivité territoriale décentralisée et la CAPEF, ce projet tarde à prendre corps. Cette convention prévoyait l’implantation dans la commune de Nkolafamba, d’un centre technique d’excellence, avec en son sein, des blocs administratifs ; des blocs pédagogiques ; des dortoirs ; des aires de jeux ; des abattoirs ; des parkings et des voies et réseaux divers. Il était question, à travers ce centre d’excellence, d’y développer une expertise locale dans un domaine de la transformation industrielle de porc qui fait encore quelque fois défaut dans cette filière.

Également, le ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries animales (Minepia) avait lancé, le 12 janvier 2021, un appel à préqualification des investisseurs désireux d’investir dans la transformation des produits animaux. Concrètement, grâce aux financements de la Banque mondiale dans le cadre du Projet de développement de l’élevage (Prodel), le gouvernement entendait cofinancer la mise en place de ces unités de transformation avec des privés.

Selon le Minepia, les projets visés étaient la construction « d’une unité de transformation laitière d’envergure avec possibilité de mise en place d’une laiterie de type UHT, d’une unité industrielle de charcuterie (porc), d’une unité industrielle de transformation de volaille, d’une unité de transformation des produits de la ruche, d’une unité industrielle de transformation de la viande bovine ».

Par Blaise NNANG

Elevage : chiffrée à 231 milliards FCFA, la filière porcine en plein essor

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Le marché camerounais de la viande porcine s’impose aujourd’hui comme l’un des plus dynamiques du secteur de l’élevage. D’après une étude récente du cabinet Trends & Poor, la filière représentait en 2024 une valeur estimée à 231 milliards de FCFA, pour un volume de 77 000 tonnes. Cette analyse du cabinet co-fondé à Londres par Ludovic Feumo, spécialiste en modélisation macroéconomique, souligne un potentiel de croissance considérable, même si certains chiffres diffèrent de ceux avancés par le ministère de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales (Minepia).

Selon le rapport publié par le Minepia en février 2024 sur la situation du sous-secteur, la production nationale de viande porcine a atteint 49 400 tonnes en 2023, contre 46 000 tonnes en 2022, soit une hausse de 7 %, presque le double du rythme enregistré l’année précédente. « Ce chiffre est en hausse de 57% par rapport au chiffre du ministère de l’Elevage pour l’année 2023. Nous pensons que cette différence n’est pas uniquement le fait de l’augmentation de la production entre 2023 à 2024, mais aussi le résultat d’éventuelles erreurs de calcul », a indiqué le cabinet Trends & Poor.

Les projections du cabinet Trends & Poor anticipent une croissance annuelle moyenne. « Ce marché devrait connaître une croissance régulière avec un TCAC moyen prévu d’environ 9 % et atteindre près de 490 milliards de francs CFA d’ici 2030. Par construction, cette tendance projetée, fondée sur la dynamique historique du marché, est également influencée par les prévisions démographiques et de revenus dans les régions du Cameroun. Elle ne tient pas compte (au-delà des informations intégrées dans la structure de l’équation prédictive) des variations plausibles des préférences des consommateurs, des prix relatifs des viandes et des poissons, et des coûts de production et de distribution », indique le cabinet londonien.

Sur le terrain, apprend-on, la consommation par habitant reste faible. Elle oscille entre 0,5 et 4,11 kg par an selon les régions, bien en deçà des standards internationaux. Mais les disparités régionales sont frappantes. La région de l’Ouest domine le classement en termes de consommation, tandis que les régions septentrionales ferment la marche. Côté prix, l’écart est tout aussi marqué en 2024. Si le kilogramme de porc s’affiche à 3 500 FCFA dans le Littoral et le Centre, il tombe à 1 400 FCFA dans l’Extrême-Nord, traduisant des différences de pouvoir d’achat et de structuration de l’offre. Les régions du Littoral et du Centre représentent les principaux pôles de marché, tandis que l’Ouest, le Nord-Ouest et l’Extrême-Nord constituent les bassins d’approvisionnement stratégiques.

 UN SECTEUR À FORT POTENTIEL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Au-delà des chiffres, l’étude souligne l’existence de segments encore sous-exploités dans la chaîne de valeur : transformation locale, production de charcuterie, conservation et exportations régionales. Ces créneaux offrent non seulement des marges attractives mais aussi un fort potentiel de création d’emplois et de réduction de la pauvreté en milieu rural, dans une filière qui exige moins d’expertise technique que d’autres productions animales.

Avec une demande croissante, une structuration progressive des pôles régionaux et des opportunités d’industrialisation, la filière porcine se positionne comme un levier stratégique de l’agro-industrie camerounaise. À condition de relever les défis sanitaires – notamment la Peste porcine africaine, devenue endémique – et d’investir dans la transformation locale, le Cameroun pourrait rapidement transformer ce secteur en moteur de croissance et de sécurité alimentaire.

Présidentielle 2025: Issa Tchiroma brandit les preuves de sa  »victoire »

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Au moment où l’on annonce l’ouverture du contentieux post-électoral pour le scrutin présidentiel du 12 octobre dernier, le candidat Issa Tchiroma Bakary qui a déjà reconnu sa victoire, rend publics les procès-verbaux de 18 départements, qui fondent sa déclaration de victoire. Ces procès-verbaux sont issus des compilations des (PV) sortis des bureaux de vote et des antennes communales. Il s’agit du Wouri (Littoral), du Mfoundi (Centre), de la Bénoué (Nord), du Diamaré (Extrême-Nord), du Mayo-Danay, du Mayo-Tsanaga, de la Vina (Adamaoua), du Logone-et-Chari, du Mungo, du Noun, du Mayo-Louti, du Mayo-Kani, du Mayo-Sava, de la Menoua, de la Mifi, du Mayo-Rey, du Lom-et-Djérem et de la Lékié.

On en apprend que le candidat du Front pour le Salut national du Cameroun (Fsnc) a remporté l’élection dans le Wouri avec 78,31% des suffrages ; 59,56% dans la Vina ; et 61,05% dans le Mungo. Globalement, ces 18 départements clé qui, selon le communiqué accompagnant la publication desdits PV, totalisent près de 80% des 8 millions d’électeurs. « En remportant ces 18 départements, la victoire nationale est garantie, car leur poids électoral détermine l’issue du scrutin », explique le communiqué.

Alors même que les opérations de vote se déroulaient encore en terre camerounaise, la diaspora avait commencé à livrer les résultats des urnes. Et dans l’ensemble, selon les informations reçues et concordantes, Issa Tchiroma se comporte mieux à l’étranger. Aux Emirats-Arabes unis, le candidat du Fsnc a damé le pion à Paul Biya avec 174 voix contre 21, et Cabral Libii arrive en 3ème position avec 13 voix. En Arabie saoudite, c’est encore Issa Tchiroma qui arrive en tête avec 33 voix, contre 17 pour Paul Biya. Pareil en Chine où l’ancien membre du gouvernement dame le pion au président sortant, par 21 voix contre 12. A Naïrobi pour vote au Kenya, le même opposant coiffe les autres avec 92 voix contre 70 pour Paul Biya. C’est aux Pays-Bas que Cabral Libii force un passage mais juste pour occuper la seconde place (13 voix), derrière Issa Tchiroma (25 voix), et Paul Biya 3ème avec 11 voix.

En revanche, en Russie, le président Paul Biya arrive en tête avec 56 voix, suivi d’Issa Tchiroma avec 43 voix. 

Vague jaune

Sur le plan national, Yaoundé a vu une vague jaune jaillir des urnes. En témoigne les explosions de joie de militants se réclamant de l’ancien membre du gouvernement, dans la plupart des bureaux de vote de Yaoundé 2, Yaoundé 3 et Yaoundé 6. A Maroua, capitale de la région de l’Extrême-Nord, c’était une liesse populaire. Les partisans d’Issa Tchiroma ont envahi les rues pour crier la victoire de leur champion. Ici, le résultat le plus illustratif est celui des Services du gouverneur. Dans ces locaux abritant les bureaux du représentant du président de la République, deux bureaux avaient accueilli les votes des électeurs. Dans l’un, le « candidat du peuple » a récolté 117 voix contre 72 pour Paul Biya, 7 pour Cabral Libii et 3 pour Bello Bouba. Le PAL et le FDC se contentent chacun d’une voix. Dans l’autre bureau, le même opposant arrive en tête avec 18 voix contre 12 voix pour le « propriétaire » des lieux, et une seule voix pour le candidat de l’Undp.

Au lamidat de Maroua, un autre centre de vote installé dans le domaine d’un affidé du régime, les deux bureaux de vote ont donné la même tendance. Dans le bureau A, Issa Tchiroma obtient 78 voix, contre 39 pour Paul Biya et 4 pour Bello Bouba. Les autres n’ont aucune voix. Dans le bureau B, c’est la même razzia jaune avec 80 voix pour Tchiroma et 27 pour Paul Biya, 02 pour Cabral Libii et une seule pour Bello Bouba. 

Le contentieux électoral s’ouvre mercredi 22 octobre. Une journée marathon qui débouchera sur la proclamation des résultats officiels du scrutin. Mais Issa Tchiroma, lui, a déjà pris la peau de l’élu. Son représentant à la commission nationale de recensement général des votes ayant déserté la salle des travaux en dénonçant de grandes disparités entre les chiffres issus des départements, et ceux présentés devant la commission. De quoi susciter des contestations dans plusieurs villes dont Garoua, Dschang, Douala, Bafoussam. L’homme retranché dans sa résidence de Garoua, a appelé les forces de défense et de sécurité à se ranger du côté du peuple et non d’un clan ou d’un individu.

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