«Les autres nous piquent nos talents ou c’est nous qui ne savons pas les retenir ?». Ce questionnement est le sujet principal d’une étude publiée en juillet 2024 par l’Institut tunisien d’Etudes stratégiques. Confrontée à un exode sans précédent de ses talents, la Tunisie tente d’analyser les causes profondes de ce phénomène et de proposer des solutions adéquates.
Au Cameroun, où ce phénomène se renforce au fil des années, la question ne se pose plus. Le régime en place est en grande partie responsable de cette quête permanente d’ailleurs. C’est du moins ce que révèle le rapport sur l’Etat de la compétitivité de l’économie camerounaise en 2023, publié par le Comité de compétitivité du ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire.
Dans ce document, le pays est pourtant reconnu comme un important vivrier où les pouvoirs publics mettent en place des initiatives pour développer des talents, surtout des talents de qualité. «Le Cameroun enregistre un score de 24,5 sur 100 dans l’Indice global de compétitivité des talents et occupe le 118e rang sur 134 pays classés.
Par rapport à 2022, le score s’améliore de 4,7 points et le rang d’une position. Le pays performe le mieux en matière de compétences de niveau élevé (102e rang) et de capacité de développement des compétences (107e rang)», lit-on dans le rapport.
MAUVAIS ÉLÈVE
Cependant, le Cameroun fait partie des mauvais élèves en matière de capacité de rétention des talents. Il est classé 125e sur 134 pays classés. «Ces résultats montrent que si le pays fait des efforts dans le sens du développement des talents, il a du mal à retenir ces derniers», souligne le rapport. Pour y remédier, le comité de compétitivité, au regard des résultats de l’Indice global de compétitivité des talents, a identifié différents éléments liés à la gouvernance qui doivent être améliorés pour pouvoir retenir les cerveaux candidats à l’exode.
Il s’agit notamment de mettre en place des politiques visant à promouvoir : le développement technologique (innovations, infrastructure TIC), la sécurité sociale (couverture de la retraite, protection des personnes, protection sociale, emplois moins vulnérables, densité des médecins), un meilleur environnement des affaires (état de droit, efficacité du gouvernement, qualité réglementaire) et une éducation de qualité (formation continue, dépenses dans l’enseignement supérieur, pertinence du système éducatif pour l’économie).
D’après les conclusions du rapport susmentionné, les pays qui mettent en place de telles politiques sont généralement les mieux classées dans l’Indice de compétitivité des talents. C’est notamment le cas de la Suisse qui occupe le premier rang au niveau mondial et l’Afrique du Sud qui occupe le premier rang en Afrique, soit 15 places au-dessus du Cameroun qui trône à la 16e place sur 34 pays.
LA DIASPORA OUBLIÉE
En dehors de la rétention et de l’attrait des talents, le Cameroun pêche également dans la capitalisation du potentiel économique que représente la diaspora. Ce manquement est illustré par une étude réalisée par le ministère des Relations Extérieures auprès de ces compatriotes installés hors du pays.
Elle a permis de relever les principaux freins à la capitalisation du potentiel de cette dernière. Il s’agit notamment : d’un déficit en termes de coordination et de communication, plus de 75% des camerounais de l’étranger interrogés ne connaissent pas les initiatives gouvernementales visant à mobiliser la diaspora ; la faiblesse des infrastructures, Il n’existe aucune plateforme en ligne dédiée à la diaspora, 50% des camerounais de l’étranger seraient prêts à investir au Cameroun si l’accès à internet était meilleur ; du manque de sensibilisation , 60% des camerounais de l’étranger ne sont pas informés des opportunités d’investissement au Cameroun, 80% des camerounais de l’étranger seraient intéressés par des programmes de mentorat et de mise en réseau.
En dernier lieu on a la fuite des cerveaux, 30% des diplômés camerounais choisissent de s’installer à l’étranger chaque année ; 70% des camerounais de l’étranger reviendraient au Cameroun s’ils y trouvaient des opportunités d’emploi adéquates