Alors que le programme économique et financier (PEF) triennal entre le Cameroun et le Fonds monétaire international (FMI) était censé s’achever en juillet 2024, les autorités camerounaises et l’institution de Bretton Woods ont décidé de le proroger jusqu’en 2025. Selon un communiqué publié par le ministère des Finances en décembre dernier, cette extension vise à permettre la réalisation de réformes essentielles pour garantir une clôture réussie du programme, particulièrement sur des problématiques complexes telles que la maîtrise de la dette publique, la gestion des risques climatiques et la réduction de l’inflation.
UNE SÉRIE DE RÉFORMES À IMPLÉMENTER
Dans cette perspective, le Cameroun et le FMI ont défini plusieurs actions prioritaires pour finaliser ce programme. Elles figurent dans le Document de programmation économique et budgétaire à moyen terme 2025-2027. Parmi celles-ci, la constitution et la gestion d’un Parc intercommunal d’engins de génie civil et d’hydraulique, sous la responsabilité du Fonds spécial d’équipement et d’intervention intercommunal (FEICOM). Ce projet qui fait l’objet d’une convention de prêt d’un montant de 97,2 milliards de FCFA en mai 2024, vise à renforcer les capacités des collectivités territoriales décentralisées (CTD) dans les secteurs stratégiques des infrastructures et de l’assainissement hydraulique.
Un autre projet crucial est le Programme de Développement Économique et Social des Villes Secondaires Exposées à des Facteurs d’Instabilité (PRODESV2). Ce dernier cible les villes de l’arrière-pays particulièrement vulnérables aux chocs socioéconomiques, dans un contexte où la stabilité des zones urbaines secondaires apparaît «comme une condition sine qua non au développement harmonieux du territoire», souligne le gouvernement Par ailleurs, les autorités camerounaises entendent poursuivre la mise en œuvre du Projet d’Appui à l’Accélération et à l’Approfondissement de la Décentralisation et du Développement Local (PAADD).
Ce programme, qui vise la promotion de la gouvernance locale, s’inscrit, selon le ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (Minepat), dans la continuité des actions engagées dans le cadre du Programme national de développement participatif (PNDP). L’objectif est d’intensifier la dynamique de la décentralisation et d’améliorer les services publics locaux.
L’OPTIMISATION DES RESSOURCES PUBLIQUES, UN AXE CENTRAL
Au-delà des réformes sur la décentralisation et le développement local, le gouvernement camerounais place la gestion des ressources humaines et financières publiques au cœur de ses préoccupations. Un des projets phares en ce sens est l’opérationnalisation du SIGIPES 2, un système informatique dédié à la gestion intégrée des personnels de l’État et de la solde. Cette nouvelle version, qui devait être déployée en 2023, ne verra finalement le jour qu’en 2025, conformément aux prévisions du ministère des Finances pour la période 2025-2027.
En parallèle, la numérisation des procédures de passation des marchés publics, à travers la plateforme e-procurement, demeure un autre enjeu crucial pour le gouvernement. Cette réforme vise à rendre les appels d’offres publics plus transparents, efficaces et compétitifs. Sa «mise en œuvre constitue un levier important pour l’amélioration de la gestion des finances publiques», rappelle Yaoundé, qui précise par ailleurs que son implémentation est l’une des exigences majeures du FMI dans le cadre de l’optimisation budgétaire.
VERS UN CONTRÔLE RENFORCÉ DE LA DETTE ET DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE
La prorogation du programme PEF offre au Cameroun une opportunité de réajuster ses politiques budgétaires pour maintenir la viabilité de sa dette. Le gouvernement s’est engagé à réduire le déficit primaire hors pétrole à moins de 2 % du PIB d’ici 2024, tout en limitant l’encours de la dette publique à environ 40 % du PIB. En 2023, ce ratio avait atteint 45 %, mais les projections du FMI pour 2024 prévoient une réduction à 42 %, grâce à une gestion plus rigoureuse des finances publiques.
Selon un expert en économie contacté, «l’atteinte de ces objectifs exige des efforts considérables en matière de discipline budgétaire et de rationalisation des dépenses publiques. Le programme est ambitieux, mais il repose sur des leviers concrets, tels que l’amélioration de la collecte des recettes et la maîtrise des dépenses courantes»
UN APPUI FINANCIER SUPPLÉMENTAIRE POUR CONSOLIDER LES RÉFORMES
Le soutien financier du FMI, par le biais de la Facilité élargie de crédit (FEC) et du Mécanisme élargi de crédit (MEDC), a déjà permis au Cameroun de recevoir environ 345 milliards de FCFA depuis le début du programme en 2021. À la suite de la prorogation du PEF, le pays bénéficiera de 45 milliards de FCFA supplémentaires, portant ainsi le financement total à environ 770 milliards de FCFA sur l’ensemble du programme.
Une partie de ces fonds proviendra également d’autres partenaires financiers internationaux, comme la Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD) et l’Union européenne. «Cette enveloppe permettra d’offrir une certaine marge de manœuvre budgétaire pour la poursuite des réformes, tout en assurant la mise en place des infrastructures nécessaires au développement local et à la décentralisation», souligne un expert