Les récentes inondations à l’Extrême-Nord ont mis à genoux l’économie locale et menacent de plonger des milliers de familles dans la pauvreté. Elles ont déjà causé la mort de vingt personnes et forcé 236 025 habitants à fuir leur foyer, selon le bilan rendu public le 10 septembre dernier par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).
L’organisation Onusienne craint même une aggravation de l’insécurité alimentaire et de l’inflation. A en croire cette institution spécialisée, les dégâts sont sans précédent, notamment dans les départements du Diamaré, Logone-et-Chari, Mayo-Danay et Mayo-Tsanaga. Plus de 18 000 habitations ont été ravagées et 3 471 hectares de cultures détruits, privant ainsi des milliers de personnes de leur principal moyen de subsistance.
Le tableau des pertes dressé par OCHA révèle en outre la perte massive d’animaux d’élevage, accentuant l’ampleur du désastre dans cette région déjà fragile, avec plus de 1 678 têtes de bétail perdues. L’éducation est également affectée avec plus de 185 écoles primaires et 13 lycées inondés, selon les chiffres révélés par le préfet du département du Mayo-Danay, Jean Lazare Ndongo Ndongo, dans une interview accordée au quotidien gouvernemental Cameroon Tribune.
Pis encore, la rupture du pont sur la rivière Danay, survenue le 12 septembre, a amplifié les conséquences socioéconomiques de ces inondations. « Ce pont relie en fait les deux grandes parties de la ville de Yagoua et même l’arrondissement de Yagoua aux autres arrondissements du côté nord. Son effondrement complique davantage la mobilité non seulement des élèves, mais aussi de la population qui se déplace d’un côté à l’autre de la ville. Lorsque des infrastructures comme celle-ci sont détruites, cela aggrave la situation des déplacements de personnes et de biens. Le jour de marché, les populations des autres arrondissements et villages viennent vendre des produits de grande consommation, comme les céréales, mais ne peuvent pas arriver, ce qui est inquiétant pour la nutrition des populations », s’inquiète le préfet du département du Mayo-Danay. Ces pluies dévastatrices ont englouti « de vastes étendues de cultures vivrières et de coton. Beaucoup de maisons se sont écroulées. Ces inondations ont aussi emporté des poules et des moutons », fait savoir Jean Claude Karmo, le maire de Datchéka, une commune de Mayo-Danay qui jadis était à l’abri de telles catastrophes.
Estimant les importants dégâts dans sa circonscription communale, Jean Claude Karmo lance un cri d’alarme : « la situation est inquiétante et nécessite une intervention de grande envergure. 4 908 ménages sont concernés, soit un total de 20 855 personnes sinistrées dans cette commune, avec deux décès par noyade, dont un à Djamni et un à Kankarwa, et 3 035 hectares de cultures détruites ». Cette catastrophe a aggravé une crise alimentaire déjà sévère dans l’Extrême-Nord du Cameroun. Certaines terres agricoles sont à présent inexploitables, les infrastructures essentielles submergées, et l’accès à l’eau et à l’électricité coupé, augmentant les risques de maladies hydriques qui planent sur la région.