L’ancien administrateur de la Société Commerciale Gabonaise de Réassurance ( SCG Ré) revient sur l’opération de levée des capitaux à la BVMAC et sur l’entrée en bourse de cette société, évènement inédit pour le secteur de l’assurance de la zone Cemac.
La SCG ré est depuis l’année dernière, la première entreprise du secteur de l’assurance à être présente à la Bourse des valeurs Mobilières d’Afrique centrale. Comment s’est déroulée cette opération et qu’avez-vous récolté sur le marché ?
En mai dernier, sous instructions du conseil d’administration de la SCGré et des autorités gabonaises, en application de son plan stratégique 2022 -2027, la société devait augmenter son capital social à 15 milliards au plus tard au 31 décembre 2021. Pour ce faire et également dans le strict respect des engagements pris par le Gabon, de désigner trois sociétés qui devaient faire leur entrée à la bourse des valeurs mobilières d’Afrique Centrale, suite à l’acte uniforme de fusion des deux bourses, nous avons entrepris deux opérations concomitamment. Dans un premier temps, après avoir mis en ordre nos ressources internes et mis en place une équipe projet constituée d’experts, nous avons entrepris la phase de préparation du projet avant sa mise en œuvre. Cela se traduit par la valorisation de la SCG ré selon trois méthodes retenues et la moyenne de cette méthode nous donnait une valeur nominale d’une action à 21300. Les actionnaires de la SCG ré ont fait une décote pour l’ensemble des investisseurs de 6%. Avant cette opération, au 31 décembre 2021, la société avait un capital social de 10 milliards, un chiffre d’affaires de13 milliards par an, un résultat net moyen de 950 millions, une distribution moyenne des dividendes par an de 650 millions. L’opération d’appel public à l’épargne inédite pour une société régulée par la Cima nous a permis de collecter sur la place financière de la sous-région 7 milliards d’intentions de souscriptions. Nous nous sommes retrouvés en souscriptions réelles à 5, 6 milliards FCFA. En gros, la SCG ré a par cette opération intéressé 771 nouveaux investisseurs parmi lesquels 50 personnes morales. Les camerounais ayant souscrit à plus de 3 milliards. On a la CNPS qui occupe aujourd’hui un poste dans le conseil d’administration. Cette opération s’est étendue au-delà de la Cemac.
Quels sont les avantages que vous avez pu tirer de ce recours à la BVMAC ?
Il faut dire que c’était une belle réussite. D’abord une réussite humaine et financière. Car cette opération fait de la SCG ré la première société agréée par la Cima sur un espace composé de 14 pays de la zone franc et de la zone Uemoa à faire son entrée à la bvmac. Ladite cotation a généré à la SCG ré un certain nombre d’avantages. Ça a permis à la SCG ré d’accroître sa notoriété, d’être mieux connue, d’accroître son management. La SCG ré a pu modifier son rating qui était de c- aujourd’hui il est de B-. Ça a permis à la SCGré d’augmenter sa capitalisation passant ainsi d’une capitalisation qui était de 10 milliards, aujourd’hui nous sommes sensiblement autour de 36 milliards. Ceci, du fait que le titre de la SCG ré a été apprécié par le marché local. Côté à 20 mille francs il est à 21000 FCFA aujourd’hui à la place boursière de l’Afrique Centrale. Cette expérience devrait servir aux assurances de la zone Cemac qui sont aujourd’hui confrontées à l’obligation d’augmenter leur capital social à 3 milliards pour une société d’assurance vie et à 5 milliards pour une société d’assurance non vie. Jusque-là les opérations d’augmentation du capital des sociétés d’assurances prenaient en compte les anciens canaux, c’est-à dire un appel à numéraire auprès des actionnaires. Avec l’expérience réussie de la SCG ré, les sociétés d’assurance de la zone Cemac et de la Cima n’ont plus d’excuses. Pour procéder à leur valorisation et de l’augmentation de leur capital, elles peuvent aujourd’hui, comme la SCG ré le faire par appel public à l’épargne. Et cela permettra à leurs assurés de devenir leurs actionnaires et rendre beaucoup plus démocratiques les décisions qui seront prises au sein de leurs instances.
L’assureur aujourd’hui doit pouvoir jouer sur deux aspects : émetteur, c’est-à-dire rechercher sur le marché financier des capitaux qu’il lui faut afin de valoriser ses fonds propres et augmenter son capital social, secundo investisseur.
Au cours du colloque international sur les assurances et les marchés financiers organisé à Douala par la Cima, les assureurs ont évoqué deux préoccupations majeures quant à leur entrée en bourse. La question de la fiscalité et de la liquidité. Que pouvez-vous dire à ce sujet compte tenu de votre expérience ?
Les autorités de la Cemac ont prévu une fiscalité particulière pour les sociétés cotées en bourse. Avant la cotation de la SCG ré en bourse, la SCG ré payait un impôt sur les sociétés (IS) à 30% au Gabon. Aujourd’hui l’Etat nous fait un crédit de réduction de 10%. Ce qui fait que dans les 5 ans qui suivent notre inscription en bourse, nous payons l’IS à 20%. Autre chose, les investisseurs payent également un IRCM (impôt sur le revenu des capitaux mobiliers, ndlr) nettement en deçà. Il y a une fiscalité très favorable pour les investisseurs, mais également pour les sociétés qui vont à la bourse. Et même les produits qui sont présentés pour diversifier nos placements bénéficient d’un régime fiscal particulier.
Quels conseils pour les assurances qui voudraient faire aujourd’hui aller à la BVMAC?
Pour susciter la confiance des investisseurs candidats à la bourse, c’est la transparence. Les investisseurs sont très sensibles à la transparence. Aucun investisseur ne pourra faire le pas pour acquérir les actions d’une société d’assurance si cette dernière n’est pas transparente. Autre conseil, commencez à former vos équipes pour conduire ces changements. Elles doivent s’approprier le passage d’une société non cotée pour une société cotée. Et derrière, constituer une équipe projet qui doit comprendre les experts dans le domaine financier, juridique et communication. Rendre l’opération la plus populaire possible.