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Recettes non fiscales : L’État capte 2,3 milliards FCFA par mois via Tresor Pay

En rendant la plateforme Tresor Pay obligatoire pour toutes les entités publiques, le gouvernement veut réduire les paiements en espèces, accroître la traçabilité des opérations et combler le déficit de mobilisation des recettes non fiscales.

Le gouvernement accélère la centralisation numérique des encaissements avec Trésor Pay. Depuis l’arrêté du 28 mai 2025 signé par le Premier ministre Joseph Dion Ngute, Tresor Pay s’impose comme la seule plateforme électronique autorisée pour la collecte des recettes non fiscales et le paiement des dépenses publiques au Cameroun. Cette décision engage l’ensemble de l’administration centrale, les collectivités territoriales décentralisées et les entreprises publiques, avec un délai de trois mois pour s’y conformer.

Au-delà de la contrainte réglementaire, elle marque une accélération du processus de centralisation numérique des flux financiers de l’État, amorcé depuis août 2023 par le ministère des Finances. Selon des données consultées par Cameroon Business Today, Tresor Pay collecte actuellement entre 2,2 et 2,3 milliards de F CFA par mois, soit environ 24 milliards de FCFA projetés en fin d’année 2025. L’ambition, selon une source interne au ministère des Finances, est de « quadrupler ces montants dès l’année prochaine », pour tendre vers le potentiel national estimé entre 600 et 800 milliards de F de recettes de service par an. Ce niveau reste pour l’instant largement sous-exploité : les statistiques officielles évoquent une moyenne de 300 milliards de F collectés chaque année, et la loi de finances 2025 n’en prévoit que 361 milliards.

 Lancée en août 2023, Trésor Pay a été conçue pour centraliser et tracer l’ensemble des encaissements et décaissements publics. L’expression « recettes non fiscales » renvoie ici aux paiements effectués par les usagers pour divers services administratifs (certificats, autorisations, agréments, frais d’examens, etc.) qui ne relèvent pas de l’impôt direct ou indirect. La plateforme est interconnectée au système de gestion du Trésor public, garantissant la fiabilité des opérations et la reddition conforme des comptes.

Sur le terrain, plusieurs ministères ont déjà migré leurs recettes vers la plateforme. Au ministère de la Santé publique, Tresor Pay a permis de sécuriser plus de 4 milliards de F issus des tests Covid et d’autres actes médicaux légaux. Au ministère des Relations extérieures, les paiements pour l’authentification internationale des documents, la production de plaques diplomatiques ou encore l’inscription des traducteurs agréés s’effectuent désormais en ligne.

Le ministère des Mines y perçoit les frais d’agréments de prestataires et de certificats d’exploitation, tandis que celui des Transports centralise les paiements pour la délivrance de permis de navigation, certificats de capacité et concours d’entrée à l’École nationale de la pêche de Limbe (LINAFI). Les administrations foncières figurent aussi parmi les plus actives : plus de 6 milliards de F ont été collectés depuis le 1er janvier 2025.

D’autres départements, notamment les Forêts et la Faune, ou encore les Marchés publics, utilisent la plateforme pour encaisser les frais de délivrance de certificats de non-exclusion de la commande publique. À l’échelle locale, les collectivités territoriales décentralisées ont encaissé près de 2,89 milliards de F au titre de l’impôt général synthétique, première étape vers une réforme de la fiscalité communale désormais appuyée sur un outil numérique. Le ministère des Finances mise sur cette centralisation pour réduire les manipulations en espèces, longtemps à l’origine de fuites de recettes, et renforcer la transparence dans l’exécution budgétaire.

 L’arrêté du Premier ministre prévoit d’ailleurs la fermeture progressive de toutes les plateformes non connectées au réseau Tresor Pay. Sur le plan sécuritaire, les responsables techniques indiquent que le système a déjà déjoué plusieurs tentatives d’intrusion. Les mises à jour régulières et la collaboration avec des experts nationaux et internationaux doivent renforcer la résilience de la plateforme. Par ailleurs, une campagne de sensibilisation vise à accélérer l’adhésion des administrations et des usagers, encore inégale selon les secteurs.

Avec la digitalisation progressive du circuit financier public, l’État entend consolider la traçabilité de ses flux, fiabiliser ses comptes et sécuriser la mobilisation de ses recettes. Trésor Pay, appuyée par la Cameroon Postal Services (CAMPOST) et plusieurs partenaires institutionnels, s’impose désormais comme le socle de la réforme budgétaire camerounaise — une transformation encore silencieuse, mais déterminante pour la discipline financière nationale.

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