Les résultats officiels de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025 seront proclamés, le 27 octobre 2025 par le Conseil constitutionnel. Ils ne seront probablement pas très différents de ceux déjà en circulation sur les réseaux sociaux, après la compilation des résultats faite par la Commission nationale de recensement général des votes. Des résultats qui donnent Paul Biya, vainqueur avec environ 53% des suffrages exprimés, suivi par Issa Tchiroma Bakary, 35%. Mais la vérité des urnes selon le candidat Issa Tchiroma Bakary est toute autre. Au soir du 12 octobre 2025, il s’est déclaré vainqueur de cette élection, selon les tendances issues des bureaux de vote. Bien évidemment, cette vérité ne sera pas celle du Conseil constitutionnel, l’instance juridictionnelle habilitée à proclamer officiellement les résultats de l’élection présidentielle.
Et déjà depuis lundi dernier, les cadres du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), le parti du président candidat Paul Biya, sont mis à contribution pour préparer l’opinion publique à se détourner des éventuelles contestations incitées par certains candidats à cette élection. En exécution des « Très hautes prescriptions » du Président Paul Biya, ces élites sont de nouveau envoyées sur le terrain, pour délivrer « un message de rejet total de la violence et d’impératif respect du verdict des urnes à venir, visant à contrecarrer les appels au chaos lancés par des acteurs politiques en attendant la décision du Conseil constitutionnel », apprend-on de la communication de ce parti.
Les mises en garde du RDPC
Dans la région de l’Est par exemple, le ministre Joseph LÉ, ignorant le message d’une autre élite de cette région, Michel Ange Anguing qui, dans une tribune au lendemain de l’élection présidentielle, reconnaissait que « les bastions imprenables du RDPC sont pour la plupart ébranlés dans leurs fondations » et que « le moment est certainement venu pour chaque militant, sympathisant ou allié du RDPC d’évaluer sa contribution à la victoire souhaitée du candidat président ». Mais le plénipotentiaire politique de la région de l’Est va plutôt mette en garde les populations contre les manipulations qui conduiraient à la destruction de leurs villes. Tout en insistant sur le fait que le vrai gagnant doit être le Cameroun, et en réitérant le message de paix du Chef de l’État. Il va également mettre en garde la population contre les conséquences dévastatrices de la violence, insistant sur la primauté de la stabilité et du vivre-ensemble sur toute ambition politique individuelle. Pourtant, comme le pense Mgr Paul Lontsie, évêque de Bafoussam, « On ne peut pas parler de paix et bourrer les urnes, voler la victoire du peuple. La paix va ensemble avec le respect de la volonté populaire ».
Les vraies raisons de la débâcle électorale ignorées
La tribune de l’ancien ministre Michel Ange Angouing, si elle a le mérite d’appeler les cadres de son parti à une autocritique pour comprendre les véritables causes de leur échec électoral et s’ajuster. Elle cache mal le malaise actuel au sein de ce parti. L’on se regarde en chiens de faïence. Des messages comme « Présidentielle 2025: Philippe Mbarga Mboa, l’homme de main du SGPR, Ferdinand Ngoh Ngoh accuse le ministre Etoundi Ngoa de faire partie des ministres qui ont félicité Issa Tchiroma Bakary », écument les réseaux sociaux. L’on se rejette donc mutuellement la responsabilité de l’échec électoral. Ou alors, on se réfugie derrière un supposé vote communautaire, comme le reconnaissait Félix Zogo, le Secrétaire général du ministère de la Communication, au cours d’un débat télévisé sur les antennes de la télévision Vision 4, le 19 octobre 2024. Toute chose qui frise la stigmatisation. C’est cette logique de stigmatisation qui peut d’ailleurs transparaitre de cette invitation du préfet de la Sanaga Maritime, Cyrille Yvan Abondo, à la suite de ceux du Wouri et de Guider, invitant les chefs des communautés Bamiléké, du Grand Nord et Anglophones, regroupées et organisées d’Édéa à une séance de travail prévue, le mardi 21 octobre à la préfecture, pour consolider la paix et le maintien de l’ordre.
Pourtant, les véritables raisons de cet échec électoral n’ont aucune couleur tribale. C’est tout simplement l’expression d’un raz-le-bal social face aux difficultés que rencontre l’ensemble de la population actuellement. La vie chère, le chômage des jeunes, la pauvreté ambiante, avec son corollaire de faible pouvoir d’achat des Camerounais, la mauvaise gouvernance, etc., n’ont de couleur ethnique. Et, c’est ce raz-le-bal qui a été exprimé à travers les urnes, le 12 octobre 2025.
Blaise Nnang