C’est un tournant dans la lutte contre la fraude, la contrebande et l’informalité aux frontières. Le chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord a servi de cadre à la signature, par la Direction générale des Douanes (DGD) et les communes de Bourha, Fotokol, Kolofata et Mora, des conventions qui donnent naissance à leurs Centres de négoce. Véritables points uniques d’entrée des marchandises, ces structures se veulent des espaces modernes, organisés et régulés, où se concentrent les opérations de dédouanement, de stockage et de négoce. « Il s’agit de doter nos collectivités d’outils crédibles pour canaliser les flux commerciaux, sécuriser les recettes et offrir aux populations des marchés mieux encadrés », a souligné le Minfi. Constitués sous forme de groupements d’intérêt public, les Centres de Négoces disposent de la personnalité juridique et de l’autonomie financière.
Si la Douane en assure le pilotage stratégique et le contrôle, les communes sont responsables des infrastructures, parmi lesquelles les entrepôts, les aires de dédouanement, magasins, les points d’entrée sécurisés. Elles doivent également fournir renseignement et assistance aux services douaniers, notamment dans la traque des réseaux de fraude. En contrepartie, la DGD s’engage à accompagner techniquement et financièrement les communes, notamment dans les facilités de dédouanement pour les dons, organisation de formations, aménagement de couloirs rapides pour les produits périssables et allocation annuelle indexée sur les recettes douanières locales.
UNE RÉPONSE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE
Pour les populations, ces centres se présentent comme des accélérateurs d’opportunités. Les prix deviennent transparents, les produits tracés et contrôlés, la sécurité et l’éclairage garantis. Les jeunes et les femmes bénéficieront d’espaces réservés dans la logistique, la transformation et le conditionnement. « La dignité d’acheter et de vendre au juste prix sera désormais une réalité », a insisté un responsable communal. Pour les opérateurs économiques, les bénéfices sont multiples. La réduction des coûts et délais, accès à des services financiers innovants (warrantage, micro-assurance), marchés élargis grâce au groupage pour l’export, et surtout une prévisibilité fiscale grâce à des barèmes harmonisés et digitalisés. Quant aux collectivités territoriales, elles voient s’ouvrir la perspective de recettes sécurisées et stables, d’un meilleur pilotage grâce aux données collectées, et d’une attractivité renforcée de leurs territoires.
UN LEVIER DE RÉSILIENCE ET D’INTÉGRATION
Au-delà des retombées locales, les Centres de Négoces visent aussi l’intégration régionale. Situés dans des zones charnières comme Mora ou Fotokol, ils devraient fluidifier les échanges sur les corridors stratégiques Douala–Ndjamena et Douala–Bangui. En toile de fond, le gouvernement mise sur ces plateformes pour soutenir sa politique d’import-substitution et bâtir une résilience alimentaire et logistique dans un contexte marqué par les tensions sécuritaires et les défis climatiques. La réussite de cette initiative dépendra toutefois de la capacité des acteurs à jouer pleinement le jeu de la formalisation, dans une région où la contrebande et l’économie informelle restent profondément ancrées.







