Humeurs : Amadou Vamoulke, la justice et la déshumanisation de l’homme

Une tribune écrite par le détenu datant de six mois, vient d’être ramenée sur la scène, dans laquelle l’homme s’en remet à la vérité.

Amadou-Vamoulke-reclus dans sa cellule

Amadou Vamoulke est prisonnier des questions qui le hantent toutes les nuits : «Mais que fais-je ici ? Où allons-nous ? Quels Dieux ai-je pu offenser et quel prix paierai-je pour ma rédemption?». L’ancien directeur général de la Cameroon radio television (Crtv) se considère comme « otage » du système politico-judiciaire camerounais. Dans une tribune écrite il y a quelques mois, l’homme s’apparente aux esclaves de la Traite négrière dont le seul crime était leur validité particulière. Comme lui le gestionnaire « exemplaire » de la Crtv. « Il a été établi qu’il n’y avait eu ni détournement, ni gonflement, ni perte d’argent», fait-il observer. Lui qui a été inculpé pour «Détournement de deniers publics par gonflement artificiel de la Redevance Audiovisuelle». La Redevance audiovisuelle étant un impôt que l’Etat prélève chez le contribuable pour financer l’audiovisuel public national, et qui est logé dans les comptes du Trésor public qui seul le décaisse et met à la disposition du directeur général de la Crtv.

Un étranger dans le système

En revanche, l’ex Dg de la Crtv plaide coupable pour avoir révisé à la baisse son salaire, en divisant celui de son prédécesseur qu’il trouvait « indécent », par quatre. Non sans écrire au chef de l’Etat pour l’en informer. C’est peut-être là le début des malheurs de l’homme que l’on ne semblait pas attendre, et qui sortait du secteur privé pour succéder au Pr Gervais Mendo Ze ? Toujours est-il que les quelques reproches à lui crachés dans les couloirs des administrations et de la justice laissent croire à Vamoulke qu’il avait trahi un système dans lequel il s’est retrouvé sans en avoir été préparé : «il est hautain » (police, renseignement) ; il n’a rien à faire à la Crtv» (un ministre) ; «il a montré à la télévision la fille du président de la République en tenue légère» (vidéo montage réalisé à mon insu pour décider le chef de l’Etat à me démettre) ; «il a écarté l’entreprise de la fille du conseiller judiciaire du Chef de l’Etat de la Crtv» (ce qui est vrai, pour des raisons objectives) ; «il n’est pas fiable» (comprendre «contrôlable»)« , recense-t-il. « Il est aussi vrai que j’avais signé, en tant que président de l’Union des Journalistes du Cameroun(UJC), un mémorandum directement adressé au Gouvernement pour demander rien de moins que la libéralisation du paysage audiovisuel ainsi que la dépénalisation des délits de presse. Ces actions m’ont valu de fortes pressions et ont bâti une réputation d’électron libre, c’est-à-dire, dans le contexte national, d’une personnalité indésirable !», suppute-t-il.

Privé de soins médicaux

Dans le même temps, le détenu cite de hauts dignitaires du régime qui ont pris des libertés avec la fortune de l’Etat et qui en ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Beaucoup ont pu bénéficier d’évacuation sanitaire. « Quel cynisme il faut avoir pour m’empêcher d’aller me soigner à l’étranger alors même que les spécialistes camerounais et étrangers ont souligné l’extrême gravité de la neuropathie sévère dont je souffre désormais ? », se demande celui qui est privé de soins médicaux. Lui à qui la liberté provisoire a été refusée.

C’est un texte écrit il y a plusieurs mois. Amadou Vamoulke qui a été interpellé le 29 juillet 2016, était à 1200 jours de détention. Mais le texte garde sa pertinence. Mieux, sa pertinence s’en trouve confortée et consolidée, tant rien n’a bougé, si ce ne sont de nouveaux renvois sans issue probable. Pour « défaut de charges crédibles», soutient-il. « Ma carrière ne peut en être la raison, car mes collaborateurs, mon environnement, ma famille, tous plaident en ma faveur, mettant en avant ma probité et mon intégrité », se vante celui qui pense que même « le président Paul Biya pourrait lui-même témoigner en ma faveur». Le détenu ne croit plus à la justice de son pays qu’il qualifie de « broyeuse de vies». Une justice dans laquelle « les juges reçoivent parfois comme instruction de leur «hiérarchie» qu’ils doivent «défendre la position du ministère public jusqu’à l’absurde», dénonce-t-il. Mais est certain que « la vérité se vengera».

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