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Fiscalité locale : les CTD de l’Extrême-Nord à l’école de la modernisation

Une caravane nationale d’information a fait escale à Maroua ce 7 mai 2025. Objectif : expliquer les contours de la nouvelle loi sur la fiscalité locale aux élus et agents des collectivités territoriales décentralisées (CTD). Un chantier crucial pour doter les communes d’un système fiscal plus simple, performant et adapté aux réalités du développement local.

C’est dans une salle comble du Cercle municipal de Maroua que s’est tenue, le 7 mai 2025, une importante rencontre d’explication de la nouvelle fiscalité locale à l’intention des maires, secrétaires généraux, receveurs municipaux, agents des impôts et du Trésor. Organisée par la Direction générale des impôts (DGI), cette activité s’inscrit dans le cadre d’une caravane nationale déployée dans les dix régions du Cameroun pour vulgariser les grands axes de la réforme. Un chantier stratégique, fruit d’un engagement politique affirmé en faveur de l’autonomie financière des collectivités territoriales décentralisées (CTD).

Abakar Idrissa, chef de mission mandaté par la DGI, a rappelé que cette réforme vise à doubler les recettes locales, pour les faire passer de 271 à 550 milliards de francs CFA. Elle repose sur deux piliers : une refonte de la politique fiscale locale et une modernisation de l’administration des prélèvements. À travers des mécanismes plus équitables et performants, le gouvernement entend faire passer la part des recettes fiscales locales dans les ressources de l’État de 7,3 % à 16 % dans les prochaines années.

Parmi les principales innovations présentées figurent la création d’un Impôt Général Synthétique (IGS) remplaçant l’impôt libératoire et le régime simplifié, la réduction du nombre de taxes directes de 21 à 12, l’élargissement des centimes additionnels communaux, et une meilleure affectation des ressources aux régions, notamment les redevances minières et pétrolières ou encore le droit de timbre local.

Mais au-delà de la fiscalité elle-même, la réforme engage une transformation de l’organisation administrative. Les anciens Centres Divisionnaires des Impôts deviennent des Centres de Fiscalité Locale et des Particuliers (CFLP), désormais chargés de la gestion des impôts locaux sous la supervision de la DGI. Parallèlement, chaque CTD devra mettre en place une Unité de Suivi de la Fiscalité Locale (USFL) pour assurer une meilleure coordination avec les CFLP et garantir la traçabilité des recettes.

Autre avancée majeure : la mise en œuvre du compte unique du Trésor. Désormais, les recettes fiscales collectées seront reversées en temps réel sur les comptes des CTD logés à la Campost. Chaque receveur municipal disposera ainsi d’un Relevé d’Identité Bancaire (RIB) favorisant la célérité et la transparence dans les transferts.

Présent à la cérémonie, le gouverneur de l’Extrême-Nord, Midjiyawa Bakari, a salué une réforme « indispensable au développement local », tout en exhortant les CTD à sortir de leur dépendance vis-à-vis des centimes additionnels. « Nos communes regorgent de potentialités fiscales qu’il suffit d’identifier et d’exploiter dans le respect des textes », a-t-il souligné.

La réforme, selon ses initiateurs, s’inscrit dans le prolongement de plusieurs jalons majeurs de la décentralisation : les Assises Générales de la Commune en 2019, le Grand Dialogue National, le Code général des CTD et la Stratégie nationale de développement à l’horizon 2030. Elle marque une étape décisive dans la quête d’une gouvernance locale plus efficace, au service des populations.

L’administration fiscale, pour sa part, appelle les exécutifs communaux à jouer pleinement leur rôle dans l’enrôlement des contribuables, la collaboration avec les CFLP, et la mise en œuvre rapide des USFL. Une condition essentielle pour assurer le succès de cette réforme et accélérer la transformation des territoires.

Interview 

Abakar Idrissa, chef de la mission conjointe Minfi-Minddevel 


« Payer les impôts en temps réel aux collectivités : un tournant décisif pour la décentralisation »


En marge du lancement à Maroua de la caravane nationale de sensibilisation sur la réforme de la fiscalité locale, Abakar Idrissa, chef de la mission conjointe Minfi–Minddevel, détaille les ambitions, les innovations majeures et les attentes de cette réforme qui vise à doter les collectivités territoriales décentralisées de moyens financiers renforcés et plus transparents.

Vous venez de lancer la caravane d’information et de sensibilisation sur la réforme de la fiscalité locale. Quel est l’objectif principal de cette initiative ?

L’objectif principal de cette caravane est d’informer et de sensibiliser les acteurs de la décentralisation sur la réforme de la fiscalité locale, une réforme fondamentale pour renforcer la performance budgétaire et l’autonomie financière de nos Collectivités Territoriales Décentralisées (CTD). La mission est effectuée conformément aux instructions du Ministre des Finances et du Ministre de la Décentralisation et du développement local, contenues dans un  communiqué conjoint qu’ils ont signé le 05 mai 2025. Dans cette optique, le Directeur Général des Impôts, MEYONG ABATH Roger Athanase a déployé les représentants de l’Administration fiscale dans les chefs-lieux de dix régions administratives du Cameroun, à l’effet d’expliquer les enjeux, présenter les innovations et les modalités de mise en œuvre de la loi portant réforme de fiscalité locale afin d’assurer une appropriation collective. S’il faut revenir sur la genèse de cette réforme, il faut dire qu’elle  s’inscrit dans le cadre de l’accélération et de l’approfondissement du processus de décentralisation voulu par le Chef de l’État. Plusieurs événements et textes fondateurs, comme les Assises Générales de la Commune en 2019, le Grand Dialogue National, la promulgation du Code Général des CTD, et la Stratégie Nationale de Développement à l’horizon 2030, ont souligné la nécessité d’un renforcement des ressources propres des CTD pour leur permettre d’assumer efficacement leurs missions.

Quelles étaient les principales limites du système fiscal local précédent ?

Le système précédent souffrait de plusieurs faiblesses : une multiplicité de taxes (plus d’une quarantaine), un rendement faible pour certaines d’entre elles comme la taxe foncière, une répartition floue des compétences entre l’État et les CTD, une faible implication des CTD dans la gestion fiscale, et un développement encore très limité de la fiscalité régionale. Tout cela entravait la mobilisation efficace des recettes locales.

Que prévoit concrètement la nouvelle loi portant fiscalité locale ?

Elle introduit plusieurs innovations majeures. D’abord, la création d’un Impôt Général Synthétique remplaçant l’impôt libératoire et le régime simplifié. Ensuite, l’extension des centimes additionnels communaux à d’autres bases fiscales, et le renforcement des ressources affectées aux Régions, comme les redevances minières, pétrolières, et le droit de timbre local. En matière de fiscalité directe, le nombre de taxes a été réduit de 21 à 12 pour simplifier et améliorer le rendement. Vous comprendrez que cette réforme implique des changements au niveau de l’administration fiscale locale. Par exemple, les Centres Divisionnaires des Impôts ont été transformés en Centres de Fiscalité Locale et des particuliers (CFLP), avec pour mission de gérer les impôts locaux sous la supervision de l’administration fiscale. En parallèle, chaque collectivité territoriale devra mettre en place une Unité de Suivi de la Fiscalité Locale (USFL), pour faciliter la coopération entre les CTD et les CFLP.

 Comment se fera la répartition des recettes entre les différentes collectivités ?

La loi a prévu une approche méthodique et équitable, avec des critères clairs pour répartir les recettes affectées. Elle garantit une allocation équilibrée des ressources, tenant compte des compétences transférées, des efforts de recouvrement et des besoins locaux.  

Des mesures ont-elles été prises pour garantir la transparence et l’efficacité de la collecte des ressources ?

Oui, des adaptations sont prévues dans le fonctionnement du Compte unique du Trésor, pour permettre une mise à disposition rapide des ressources aux CTD. Chaque receveur bénéficiera désormais d’un Relevé d’Identité Bancaire auprès de la Campost, ce qui favorisera des transferts plus fluides et plus rapide des fonds collectés.

Quel appel lancez-vous aux exécutifs locaux et aux autres acteurs concernés ?

L’administration fiscale les invite à s’impliquer pleinement dans la mise en œuvre de la réforme, notamment en facilitant l’enrôlement massif des contribuables, en collaborant étroitement avec les CFLP, et en mettant rapidement en place les USFL. C’est un moment crucial pour renforcer la gouvernance locale et améliorer durablement les conditions de vie de nos populations.

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