« Faire du budget de l’Etat un véritable instrument de développement »

BARNABE OKOUDA, Directeur exécutif du Camercap-parc

Le Centre d’analyse et de recherche sur les politiques économiques et sociales (Camercap-Parc) vient de publier une note intitulée : « conception et programmation budgétaire au Cameroun : levier de politique d’import-substitution pour la SND30 ».

Le Cameroun veut atteindre l’émergence dans 13 ans. Pour cela, si le pays veut conserver cet espoir, il est urgent selon une étude du Centre d’analyse et de recherche sur les politiques économiques et sociales (Camercap-Parc), sur les contenus de la circulaire relative à la préparation du budget de l’État, et publiée en mi-janvier 2022, que le pays rompt avec les lacunes et pratiques qui ont été identifiées.

HIBERNATION MANIFESE DU CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL

S’agissant du dispositif institutionnel qui réalise le budget, le Camercap fait remarquer que parmi les organes mis en place et les instruments d’aide à la décision notamment, le niveau stratégique (Présidence de la République, Services du Premier ministre), la coordination (les ministères de l’Economie et des Finances), les organes d’exécution (ministères et collectivités territoriales décentralisées), l’organe de validation (Parlement), le Conseil économique et social (Ces) est un grand absent. « Nul n’est besoin d’une démonstration magistrale pour admettre que cette dernière est en hibernation manifeste depuis plus de trois décennies. Depuis la période des Programmes d’ajustement structurel (PAS), jusqu’à la SND30 actuelle en passant par le Dsrp et le Dsce, son silence a été assourdissant ! Et son absence dans le dispositif institutionnel d’élaboration de la politique budgétaire s’inscrit dans le prolongement de cette attitude passive », écrit le Camercap. Il serait donc indiqué, pour sortir de cette hibernation, d’après Camercap, que le Ces fasse un aggiornamento pour prendre sa place, et toute sa place, dans le dispositif institutionnel du Cameroun ; précisément, dans l’encadrement en matière de politiques économiques et sociales.

NEGLIGENCE DU TERRITOIRE ECONOMIQUE

L’analyse des différentes circulaires montre que la protection du territoire économique n’est pas suffisamment priorisée comparativement à la dimension fiscale, par rapport à son rôle de source de recettes. « En conséquence, la contrebande, la contrefaçon, le commerce illicite se développent malgré des initiatives louables et salutaires comme celle de Halcomi 13 », précise le Camercap. Par ailleurs poursuit-il, si la politique import-substitution constitue un levier pour impulser la dynamique de transformation structurelle de l’économie, les exonérations fiscales qu’elle promeut nécessitent d’êtres rencardées.

RETARDS ACCUSES DANS LA MISE EN ŒUVRE DU DSCE

Les objectifs économiques, ces six dernières années, sont alignés sur le Dsce de 2017 à 2020 et sur la Snd30à partir de 2021. Ceci étant, malgré le changement de document et de période, les objectifs n’ont pas changé. La période couvrant le Dsce (2017-2020) avait pour objectifs d’accélérer la croissance ; créer des emplois ; et réduire la pauvreté. La SND30 vise la réalisation des objectifs d’émergence à travers la transformation structurelle de l’économie tout en reprenant quasiment le Dsce. De manière absolue, au regard des résultats mitigés du Dsce à échéance, aucun de ces 03 objectifs n’a été atteint. Cependant, la Snd30, seconde phase de la vision 2035, devra combler les retards accusés lors de la mise en œuvre du Dsce.

L’OMNIPRESENCE DES PARTENAIRES ECONOMIQUES ET FINANCIERS (PEF)

Pour ce qui est des PEF, s’il ressort des différentes circulaires que malgré l’adoption et la mise en œuvre des plans de développement à long terme (DSCE & SND30), pour le Camercap, les programmes économiques et financiers avec le FMI et les PTFs restent omniprésents dans la gestion de la politique budgétaire au Cameroun. À date, le Cameroun s’est engagé dans un nouveau programme avec le FMI au titre de la Facilité Élargie de Crédit et du Mécanisme Élargie de Crédit pour 689,5 millions de $ depuis juillet 2021.

FAIBLESSE DE L’ETAT DANS LA GESTION DES FINANCES PUBLICS

La reconduction mécanique de cet objectif témoigne d’après le Camer-cap, de la faiblesse de l’État, malgré la mise en place de certains organes tels que le Consupe et la Conac à endiguer les errements dans la gestion des finances publiques d’où la récurrence des détournements de fonds publics. Car, l’opacité dans la gestion des finances publiques demeure une entorse à la réalisation des objectifs fixés par la politique budgétaire.

NON ACTUALISATION DE LA PROGRAMMATION BUDGETAIRE

Sur l’ensemble de la période (2017-2022), les orientations générales de la politique budgétaire sont les mêmes. On peut notamment observer le cas du « parachèvement des projets liés à la préparation de la CAN». Par ailleurs, « on retrouve de manière constante, la mobilisation optimale des recettes non pétrolières, la mise en œuvre du Plan Spécial Jeunes et surtout, contexte oblige, la riposte à la Covid-19, la mise en œuvre du plan de reconstruction des régions affectées par les crises (sécuritaires et sociopolitiques), la couverture santé universelle et l’accélération de la décentralisation », note le Camercap. Pour lui, la récurrence de ces occurrences, dans le cadre des orientations de la politique budgétaire, traduit sans doute, l’absence du relief, voire d’actualisation de la programmation budgétaire au Cameroun. Car, à échéance due, on devrait pouvoir questionner les résultats obtenus : Qu’est-ce qui n’a pas marché? Et pouvoir adresser rigoureusement le problème au lieu de reconduire les mêmes mesures/actions.

COMMENT LE BUDGET DE L’ETAT PEUT BOOSTER LA CROISSANCE

L’analyse des contenus des circulaires relatives à la préparation du budget de l’État par le Centre d’analyse et de recherche des politiques économiques et sociales (Camercap), donne de constater que l’amélioration de la gestion budgétaire est demeurée, depuis près de trois décennies, une rengaine à tous les coups. Des propositions sont faites, visant à identifier des axes à partir desquels la « rupture » pourrait s’effectuer, afin de permettre au budget de l’État de jouer pleinement son rôle.

AUGMENTER LA PRODUCTIVITE TOTALE

Il s’agit entre autres, de la promotion de l’industrie manufacturière et le rattrapage technologique. Ces orientations permettront d’une part, de faciliter l’insertion économique mondiale du Cameroun et d’autre part, d’accélérer l’import/substitution. Ce modèle de croissance économique, tirée par l’industrie manufacturière, exige de faire passer la productivité totale des facteurs d’une contribution moyenne de 5-16% ces dernières années à une cible de 30-40%, du taux de croissance du PIB à moyen et long termes.

PRIORISER LA CIRCULAIRE BUDGETAIRE

Concernant l’alignement du budget sur la SND30, depuis la loi 2013/011du 16 décembre 2013 régissant les zones économiques au Cameroun, il y a eu le décret N° 2015/178 du 06avril 2015 organisant l’Agence de promotion des zones économiques(ZE), et le décret N° 2019/199 du 17 avril 2019 fixant les modalités de création et de gestion des ZE, les choses n’ont pas suffisamment bougé pour un pays qui veut fonder son décollage économique sur cette option de promotion des exportations. En 2013, nous étions au premier tiers de la décade Dsce (2010-2020), et nous revoici dans la Snd30 en visant le même objectif. 35 La circulaire budgétaire devrait en faire une priorité ! Dans le cas contraire, cela ressemblerait à du «remplissage verbal»

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