Eric Ngah Eloundou « Nous lançons un programme d’accompagnement technique et financier des PME »

L’expert membre du directoire d’Entreprises du Cameroun (Ecam) nous livre les contours d’un programme qui vient d’être mis en place afin de structurer les PME par filières.

Le mouvement patronal Entreprises du Cameroun annonce un programme d’organisation des PME  par filières. Comment cela va-t-il s’opérer et quelles sont les problématiques que cette approche va résoudre?

Le problème de nos PME en général, est un problème d’organisation industrielle. L’organisation au niveau interne et externe  des entreprises et notamment les relations clients fournisseurs d’un bout de la chaine à un autre. Ce qu’Ecam propose désormais c’est de pouvoir enregistrer dans la plateforme qui a été créée à cet effet, les PME et les structurer en filière. Cela veut dire que dès lors que vous êtes enregistrés, ou que l’on enregistre les produits ou les activités que vous réalisez, vous êtes automatiquement affiliés dans une chaîne de valeur. Et à partir de là on peut instruire vos dossiers d’appui technique, dossiers d’appui financier dans la même plateforme. C’est ce qui va nous permettre par la suite d’aller discuter avec les banquiers pour pouvoir défendre les demandes de financements, les demandes d’appui technique auprès du gouvernement ou des partenaires au développement, la mise en relation avec les grandes entreprises pour ce qui est des commandes ou des contrats commerciaux, la mise en relation avec les fournisseurs d’intrants, etc. Mais, tout cela est conditionné par un diagnostic à l’entrée, parce que l’objectif c’est de nous assurer que chaque entreprise qui rentre dans la plateforme à travers une filière, sait produire en qualité et en quantité, et sait se projeter au moins à l’horizon de 3 à 4 ans pour savoir comment son activité va évoluer et comment son environnement va évoluer. Et comme  on sait que nos entreprises n’ont pas toutes ces compétences, le travail qui est fait en amont au niveau d’Ecam c’est d’étudier chacune des filières.

Quelles sont les secteurs d’activités concernés par cette structuration annoncée ?

 Cette année, nous avons retenu une dizaine de filières. Les filières phares,  sont les filières agroalimentaires (boissons, meunières, piscicoles, avicoles, porcines, maraichères) et à côté d’elles, nous avons retenu la filière transport et logistique et la filière économie numérique. L’objectif c’est de nous assurer que toutes ces filières  sont capables de  s’approvisionner, de transporter leur produit d’un bout à l’autre, de les conditionner  conformément  aux attentes du marché et de les vendre. C’est cela l’intérêt de l’approche filière.

Sur quelle période Ecam se fixe-t-elle l’objectif de la finalisation de cette structuration ? 

Notre objectif dès cette année, c’est de  lancer un programme qui va permettre  d’ici septembre 2023, que l’on ait préparé les dossiers pour les entreprises qui ont des activités de 2024 et plus.  On va réunir les dossiers, pour ceux qui vont participer ceux qui n’auront pas réussi d’ici septembre, on ouvre toujours à partir d’octobre pour préparer cette fois les dossiers de 2025. Donc d’octobre 2023 à septembre 2024, ce sera les programmes pour 2025 ainsi de suite. On compte travailler avec tous les acteurs de l’aspect non financier (acteurs publics, partenaires au développement, partenaires privés techniques pour la formation, le renforcement des capacités, etc. ) mais va également travailler avec tous les acteurs de l’aspect financier (Microfinance, banques, banque développement, structures de financement publique et même les subventions de l’Etat)… 

Donc le premier départ qui est lancé à travers PMEXchange  va jusqu’en septembre, on va structurer les dossiers des entreprises sur les filières que je viens d’indiquer. Cela veut dire que ces entreprises doivent venir vers nous, elles doivent s’enregistrer, elles doivent être disposées à donner les informations concernant leur organisation, leur fonctionnement, leur situation financière, leur besoin en appui technique et financier. Puisque c’est cela qui nous permet de construire le dossier technique. Et nous en suite, on doit mutualiser tous ces dossiers et aller discuter avec les banquiers, pour dire par exemple que sur la filière meunière, nous avons pu réunir à travers l’étendue du territoire, 300 coopératives qui ont accumulé près de 2000 membres et qui produisent à la base le manioc, le maïs, le blé, le mil, le sorgho etc.  Et au bout de la chaîne, nous avons  par exemple les syndicats des boulangers qui vont acheter toute cette production de farine. Et là on a une visibilité d’une année à l’autre,  qui permet aux petits agriculteurs  de savoir que ceux qui produisent vont vendre, les prix sont définis. Ceux qui transforment au premier niveau ces intrants savent à qui les vendre et ainsi de suite jusqu’au prix final de la farine qui est déjà également fixé. Et l’idée c’est de faire cela sur toutes les filières. Ça permet d’organiser le marché et d’avoir des perspectives de développement avec des données tangibles. 

Cette offre d’Ecam suppose  une analyse préalable de l’environnement des PME/ PMI camerounaises. Quel est l’état des lieux et quelle importance des chaînes de valeurs locales ?

Beaucoup de nos entrepreneurs s’engagent dans la création d’entreprise, sans avoir nécessairement toutes les compétences de dirigeants d’entreprise, parce qu’être entrepreneur, c’est un métier. Beaucoup se limitent au fait que si je veux par exemple produire du manioc, je m’engage à produire du manioc, mais gérer une entreprise qui produit le manioc, c’est un autre métier. Donc, l’objectif  c’est déjà de faire prendre conscience à nos dirigeants d’entreprises, qu’être patron d’entreprise est un métier qu’il faut apprendre  rigoureusement, parce qu’on doit être capable de parler des enjeux stratégiques, des enjeux opérationnels, des enjeux financiers de son activité. L’autre volet c’est de se concentrer sur comment on développe son entreprise. C’est un autre challenge qui appelle toute une formation par rapport à l’activité qu’on réalise. Est-ce qu’on a fait les bons choix stratégiques, est-ce que par rapport à l’activité, qu’on a adoptée, on a choisi la bonne technologie, le bon capital humain, la bonne surface financière ?  Généralement, comme il n’y a pas cette réflexion qui est menée, beaucoup investissent énormément d’argent et d’énergie et après se retrouvent paralysés. L’intégration dans la filière permet de nous rassurer entre chef d’entreprise, déjà du choix de la filière qu’on a fait est pertinent. Et que  l’organisation qu’on a mis en place pour développer cette activité  peut nous permettre d’atteindre nos objectifs, que ce soit opérationnel ou financier, et grâce à cela tout le monde est rassuré, y compris les banquiers.

D’après vous, est-ce que les dispositions prises dans la loi de finances actuelle, permettent véritablement aux PME de se développer ? 

La loi de finances 2023, a intégré beaucoup de clauses incitatives pour les PME. Je vais prendre une seule référence, qui est celle du partenariat fiscal intégrée et qui  épouse la démarche que je viens de vous présenter. Je prends la filière meunière. Nous, au niveau d’Ecam on est capable de signer une convention avec la direction générale des impôts, ce fameux partenariat fiscal intégré qui permet que toutes les entreprises mobilisées, soient protégées sur le plan fiscal. Cela veut dire que même si vous avez des antécédents fiscaux, nous savons négocier avec la direction générale des impôts pour qu’on ne vous mette pas la pression. Si vous venez de lancer votre activité et que vous êtes dans  l’informel, on sait vous accompagner avec l’agence de promotion de PME pour que vous puissiez vous formaliser. Si vous voulez accéder au crédit, on sait négocier avec les banques pour accéder au crédit de façon sécurisée. Autres facilités au niveau de la loi de finances, les entreprises agricoles. Les filières que nous avons retenues ici sont pour l’essentiel les filières agroalimentaires et la loi de finances 2023 a accordé beaucoup de facilités  aux entreprises agricoles. C’est pour cela que nous invitons les entreprises  à ne pas se décourager, à venir vers ECAM s’enregistrer, présenter quels sont leurs besoins en appui technique, en appui financier, nous on  va préparer les dossiers et on va finaliser, et on va défendre auprès des différents  partenaires. 

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