Entreprises publiques: l’Etat a payé tous les droits sociaux des ex employés

En cette matinée ensoleillée du 25 juin 2019, même la programmation de la rencontre opposant les Lions Indomptables à l’équipe nationale de Guinée Bissau n’a pas dompté la détermination des ex-employés des sociétés d’Etat à venir manifester devant le ministère des Finances (Minfi). « Nous réclamons le payement intégral de nos droits, ça fait 30 ans que ça dure », peut-on lire sur les pancartes brandis par la cinquantaine des manifestants regroupés dans ce lieu, devenu presque mythique de la ville de Yaoundé. « Où est donc passé le vivre-ensemble tant proclamé par le président de la République ? Pourquoi ces responsables du ministère des Finances sont-ils indifférents à nos cris », scande, la mine défraîchie, Honoré P, l’un des manifestants. A grand renfort des bruits de tambours transportés sur les lieux par ses compères.

Du côté du Minfi, l’assurance qu’affichent des responsables contraste avec la mine obséquieuse des ex-employés. C’est que, raconte Bertrand P, cadre dans ce département ministériel, « à la suite du licenciement de ces personnels survenus au plus fort de la crise qui a secoué le pays dans les années 1980, l’Etat n’a lésiné sur aucun moyen pour payer les droits sociaux légaux de ces ex-employés ». Et ce, « depuis le 4 novembre 1988, date à laquelle le président de la République avait ordonné le payement d’un ensemble de droits, en l’occurrence les indemnités de chômage technique, les dommages et intérêts, la prime de fin de carrière, les indemnités de transport, la prime de bonne séparation, les salaires des délégués du personnel, etc ». Toutefois, ceci n’ayant pas donné lieu à un satisfecit général, « les revendications vont s’intensifier, donnant lieu le 10 juillet 2006, à la mise sur pied, par le gouvernement d’une commission chargée d’évaluer le reliquat desdits droits », explique Louis Marie B, cadre à la Direction des Affaires Générales du Minfi. Ainsi, poursuit-til, « après six mois de travail acharné, le comité a rendu public une liste de 47 sociétés éligibles au payement des droits, pour un montant total de 4,535 milliards de francs CFA, a distribué à 22 564 agents des entreprises d’Etat. Et les payements se sont faits de 2009 à 2011 ». Au terme de l’opération, souligne notre source, « 498, 818 millions de francs CFA sont reversés au Trésor public, parce que certains ayant droits n’étaient pas passés rentrés en possession de leurs dus ».

Prime de reconversion : Un « droit » sans fondement légal

L’une des revendications qui a fait l’objet des discussions âpres entre les différentes commissions mises sur pied par le gouvernement et les mandataires des ex-employés, est relative au payement de la prime de reconversion. Le point d’achoppement résidait alors sur le fait que les représentants de l’Etat, « ne reconnaissaient aucun fondement juridique à cette prime, étant donné qu’elle n’était pas contenue dans le code de travail », explique une autre source ayant traité de l’affaire au Minfi. Toutefois, un consensus va être trouvé, et le montant à payer va être fixé à « 28,048 milliards de francs CFA, pour les 48 entreprises retenues », martèle la même source. Cependant, les entreprises ayant indiqué que leurs trésoreries ne leur permettaient pas de payer ce montant, « le gouvernement a de nouveau entamé des négociations avec les 11 représentants du collectif des ex employés, dans le souci de préserver la paix sociale », renchérit un autre haut cadre du ministère du Travail qui avait pris part à ces discussions.

Négociations

Au terme des négociations de plusieurs heures, « les 11 représentants des personnels ont signé un accord dans lequel ils acceptaient de recevoir comme solde de tout compte, trois mois de salaire sur les 12 exigés au départ. Ce qui faisait au total 6,7 milliards de francs CFA à payer à 15 372 ex-employés », argue une autre source. Ainsi, ajoute cette même source, sous la coordination de l’ancien ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey, « un protocole transactionnel est signé le 21 août 2013, suivi du payement d’un acompte de 1,5 milliard de franc CFA ». L’Etat ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Pour éviter que ne s’amplifient la grogne observée à certains points de paiement, le ministre Alamine Ousmane Mey, « va préciser que tous ceux qui avaient des salaires de moins de 100.000 francs CFA par mois ( c’est-à-dire entre 15 000 et 20 000 francs), toucheront la totalité de leur prime. Les autres bénéficieront de l’équivalent d’un demi-mois de salaire et le solde de tout compte dans les différentes régions ». Il va par la suite ordonner le déblocage des fonds qui seront logés à la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA). Laquelle était chargée de virer ces ressources dans les établissements bancaires retenus à cet effet, notamment Ecobank, SCB-CA, Bicec et UBA. Toutefois, le retard pris dans l’exécution de cette tâche va emmener le Minfi à instruire que les payements se fassent par le Trésor public, dès le 21 septembre 2013. Et ce n’est pas tout, quelques mois plus tard, Alamine Ousmane Mey tient de nouveau parole et « fait à nouveau débloqué 5,2 milliards de francs CFA. Ce qui porte le total des sommes payées jusqu’en 2015 à 6,7 milliards de francs CFA », selon une source de la Direction Générale du Trésor. C’est dire, martèle notre source, « le ministre Alamine Ousmane Mey, sous l’impulsion du Premier ministre, Philémon Yang, avait bouclé ce dossier. Bien avant qu’il ne soit muté au ministère de l’Economie ».

Par Junior Matock, Défis Actuels

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