Engagement : Dix ans de combat

Retour sur la longue marche du nouveau patron du football camerounais vers le sacre.

Alors que s’ouvre la phase électorale, plus de 45min après, Samuel Eto’o a des préalables à régler, dont le bulletin de vote. Gilbert Schilck, le président de la Commission électorale est pris à partie. L’homme qui vient de prononcer un discours martial en ouverture, en est à s’expliquer devant le candidat. « Papa, est-ce que vous-mêmes vous êtes fiers de ce que vous avez fait ?», demande-t-il Schlick. «Il s’agit du bulletin unique », lance ce dernier. « Vous devriez vous accorder avec tous les candidats !», tonne Eto’o. « Mais c’est dans les textes !», réagit l’autre. Et Eto’o à qui Prosper Nkou Mvondo glisse par moments des mots dans le creux de l’oreille, de répliquer : «vous allez nous montrer ces textes ! ». Non sans exiger que les bulletins soient signés du président, et contresignés par le vice-président. Même si la demande est rejetée, le contestataire a réussi à casser la « toute puissance » du magistrat très craint.

Ainsi aura été la vie professionnelle de l’ancien capitaine des Lions indomptables. Une vie de combats qu’il a généralement remportés. Lui qui a imposé le respect dû à sa personne en Europe, suspendant le cours d’un match pour avoir été traité de singe. Amenant la FIFA à intensifier la lutte contre le racisme. Lui qui, parti des rues de New Bell natal, a failli hisser le drapeau du Cameroun sur les cimes des compétitions internationales, en étant un élément clé des plus grands clubs d’Europe. « Tout ce que j’ai eu dans ma carrière, c’est grâce au travail », ne cesse-t-il de répéter. En passant, « je n’ai jamais toléré l’injustice dans ma vie», a-t-il souvent clamé, lors des conflits qu’il a eus avec le clan Iya Mohammed qui a gouverné le football pendant plus de deux décennies.

Le Marrakechgate

Le sacre de ce fougueux de 40 ans, est le couronnement d’un long parcours jonché d’embûches que le combattant a généralement réussi à contourner, à défaut de neutraliser. Le premier acte grandeur nature du combat de l’homme pour le respect des droits des footballeurs est la révolte baptisée par la presse « Marrackechgate » en octobre 2011. Cette rébellion des Lions indomptables au lendemain du tournoi LG cup que le Cameroun avait pourtant remporté. Celui qui était capitaine de la sélection nationale fanion moins d’un an seulement avant, était l’organisateur en chef d’une mutinerie au sein de l’équipe nationale, avec pour motif principal la revendication des primes de la LG cup. « Déjà, au début du tournoi de la LG Cup, j’ai demandé au vice-président Mveng de me montrer le contrat, il m’a dit qu’il n’y en avait pas. Je lui ai dit que ce n’était pas sérieux. Or, avant moi, Alexandre Song lui avait posé la même préoccupation. Imaginez que je me blesse en allant prendre part à ce tournoi, sans aucune garantie. C’est un manque de sérieux. A partir de ce moment là, nous avons décidé de ne plus nous laisser abuser », expliquera-t-il au cours d’une émission télévisé. Le match amical contre l’Algérie qui devait se jouer après ce tournoi, est boycotté. Dans la foulée, les joueurs veulent connaître la vérité sur la « gratuité » de cet autre match. A leurs yeux, la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) n’avait pas dit la vérité ; citant des précédents. Et même si le leader était retourné en Espagne, sa troupe est restée soudée à sa position et n’hésitait pas à solliciter son intervention dans les négociations avec les responsables de la fédération. Suspendu pour 15 matchs, le capitaine sera réhabilité et sa sanction revue à huit mois. « Je continuerai de jouer à l’équipe nationale après avoir purgé ma sanction», avait-il promis.

C’était parti pour dix années de « rébellion » contre l’ordre établi à Tsinga. L’homme qui promit des représailles au ministre en charge des sports Michel Zoah et Iya Mohammed le président de la Fécafoot, dénoncera toutes les frustrations et duperies dans la gestion de l’équipe nationale. Au plus fort de la crise avec les autorités du football, le capitaine refusa de prendre le drapeau national des mains du Premier ministre, au départ pour la Coupe du monde 2014. En organisant une grève des joueurs. La question des primes est au centre des revendications.

Le combat redouble d’intensité une fois que l’homme quitte les arènes. Pour le compte de la 2ème normalisation, la FIFA peine à trouver l’oiseau rare qui satisferait les aspirations des contestataires portés par Abdouraman Hamadou, et soutenu en son temps par Samuel Eto’o. Ce dernier jouera sa partition, et la FIFA jettera son dévolu sur Me Dieudonné Happi, après que Gilbert Kadji ait décliné l’offre. C’est cette normalisation présidée par l’avocat de Samuel Eto’o, qui organise les élections qui conduisent Séidou Mbombo Njoya à la présidence de la Fécafoot. La main cachée du client de Me Happi est soupçonnée d’y avoir joué un rôle central. L’homme le confirmera personnellement, non sans dire sa « déception » que son poulain n’ait « pas respecté les engagements ». Nul ne sait de quoi parle le faiseur de rois. Toujours est-il que « je vous avais dit qu’en cas d’échec, vous m’aurez en face», lâcha-t-il en se portant candidat. Promettant toujours de « redonner au footballeur sa place» dans le football camerounais. Il est désormais lui-même aux commandes.

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