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Cameroun : 36 milliards FCFA pour sauver des réfugiés de la famine

Sans ce financement additionnel, le Programme alimentaire mondial (PAM) révèle que plus de 240 000 réfugiés ayant fui les conflits en République centrafricaine et au Nigeria, ainsi que leurs communautés d’accueil, se retrouveront privés d’aide alimentaire.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) tire la sonnette d’alarme. Sans un financement additionnel de 65,5 millions de dollars (36,7 milliards FCFA) d’ici à janvier 2026, ses opérations d’urgence au Cameroun s’arrêteront net, plongeant dans la faim plus de 240 000 personnes ayant fui les conflits au Nigeria et en République centrafricaine (RCA). L’avertissement, lancé ce mardi à Genève puis relayé à Yaoundé par le bureau national, survient alors que les ressources de l’agence des Nations unies atteignent un seuil critique. Selon le communiqué publié le 19 août, dès la fin du mois, le PAM n’aura plus les moyens de fournir une aide vitale aux déplacés et réfugiés. Dans un pays déjà confronté à de multiples crises humanitaires, cette perspective marque un tournant inquiétant. « Nous avons atteint un point de basculement critique », a déclaré Gianluca Ferrera, directeur pays du PAM pour le Cameroun. « Sans financement immédiat, des enfants souffriront de la faim, des familles seront en détresse et des vies seront perdues », a-t-il insisté.

DES RESTRICTIONS DÉJÀ VISIBLES

La contraction budgétaire se fait déjà sentir. En juillet, 26 000 réfugiés nigérians installés dans le camp de Minawao, dans l’Extrême-Nord, ont vu leur ration totalement suspendue. Dans le camp de Gado, à l’Est, les réfugiés centrafricains ne reçoivent plus que la moitié de leurs besoins alimentaires quotidiens. Ces réductions forcent des familles entières à sauter des repas, à brader leurs biens ou à s’endetter pour survivre. Plus largement, le PAM prévient qu’à partir de la rentrée scolaire, 60 000 enfants ne bénéficieront plus des repas distribués dans les cantines, une mesure qui avait contribué à stabiliser la fréquentation des écoles et à améliorer la nutrition dans les zones de crise. « L’arrêt des repas scolaires risque d’inverser les gains durement acquis en matière d’éducation », a alerté M. Ferrera.

UNE AIDE VITALE MENACÉE

 En 2025, le PAM a déjà soutenu 523 000 personnes au Cameroun, qu’il s’agisse de familles déplacées, de réfugiés nigérians et centrafricains ou de communautés d’accueil fragilisées. Plus de 300 000 femmes et enfants ont bénéficié d’un accompagnement nutritionnel. Ces interventions, souligne l’agence onusienne, ont permis de freiner la progression de la faim et d’éviter l’effondrement social dans certaines zones frontalières particulièrement exposées. Mais l’inertie des financements internationaux menace de réduire à néant ces acquis. Les prévisions du Cadre harmonisé estiment qu’entre juin et août 2025, 2,6 millions de personnes au Cameroun sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, soit une hausse de 6 % par rapport à l’an dernier. Le pays se trouve ainsi en première ligne d’une crise régionale qui combine conflits armés, chocs climatiques et pressions économiques.

YAOUNDÉ EN QUÊTE DE SOLUTIONS

Conscient de l’urgence, le gouvernement camerounais a ouvert un dialogue avec le PAM. Le 5 août, le ministre de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey, a reçu Gianluca Ferrera à Yaoundé. L’entretien, tenu à huis clos puis confirmé par les deux parties, a porté sur les moyens de mobiliser de nouveaux financements dans un contexte international tendu. « Dans le monde d’aujourd’hui, les priorités changent », a reconnu le représentant du PAM à la sortie de la rencontre. « Certains bailleurs traditionnels se réorientent, ce qui réduit nos marges. Nous avons donc exploré avec le ministre les pistes à suivre pour combler ce déficit. »

Le ministre a, de son côté, rappelé l’importance du partenariat avec le PAM, dont l’action humanitaire constitue une composante essentielle du cadre de coopération signé en mars 2022 pour la période 2022-2026. Doté d’une enveloppe initiale de 729,6 millions de dollars (410,7 milliards FCFA), ce plan vise à soutenir la sécurité alimentaire, la nutrition et la résilience agricole du Cameroun, tout en contribuant à l’atteinte de l’Objectif de développement durable numéro 2, « Faim Zéro ». « Il est clair qu’aujourd’hui, sans financement additionnel, nous ne pourrons pas garantir la continuité de nos programmes », a martelé Gianluca Ferrera. Le message est adressé autant aux bailleurs bilatéraux qu’aux institutions multilatérales. Le gouvernement camerounais, pris en étau entre ses propres contraintes budgétaires et la pression sociale, ne dispose pas de la capacité d’absorber seul le choc.

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