Cacophonie gouvernementale : Dion Ngute tente de reprendre la main sur sa troupe

En fin de semaine dernière, Joseph Dion Ngute a essayé de remettre de l’ordre dans les rangs des membres du gouvernement. Dans une lettre aux ministres, signé de Séraphin Fouda, secrétaire général des Services du Premier ministre, a dénoncé des dérapages observés par le Premier ministre au sein du gouvernement. « L’attention du Premier ministre, chef du gouvernement, a été appelée à plusieurs reprises par la démultiplication d’initiatives personnelles et solitaires de la part des membres du gouvernement dans la conduite des affaires publiques, au mépris des principes cardinaux de collaboration , de solidarité et de respect des procédures qui régissent l’organisation du travail gouvernemental…», écrit Séraphin Magloire Fouda. Alors à travers le patron de l’administration de ses services, Joseph Dion Ngute a recadré les ministres dans l’exercice de leurs fonctions. Ainsi, « les textes à caractère réglementaire, édictés par les chefs des départements ministériels, …doivent obligatoirement être soumis au visa administratif préalable avant leur signature par les ministres concernés », a-t-il prescrit.

Madeleine Tchuente en spectacle, Malachie Manaouda…

Et actualité oblige, la lutte contre le Covid-19 a davantage intéressé l’Immeuble Etoile. « Les administrations sectorielles impliquées dans la stratégie gouvernementale de riposte à la propagation de la pandémie doivent préalablement solliciter et obtenir formellement du Chef du gouvernement les autorisations nécessaires, avant de prendre des mesures à portée générale », exige Dion Ngute. Cela afin « d’éviter la cacophonie observée dans la communication sur cette crise sanitaire qui préoccupe la communauté nationale et internationale». L’observateur assidu peut y percevoir les bruits observés autour des dernières sorties de Madeleine Tchuenté. Après une première communication au cours de laquelle la ministre de la Recherche scientifique et de l’innovation (Minresi) et les experts de son département démontraient que la chauve-souris est le réservoir par excellence du virus qui décime la planète, la patronne des chercheurs du Cameroun a effectué une visite à l’Institut médicinale et des recherches médicales (Impm), au terme de laquelle elle a annoncé que la structure est capable de produire de la chloroquine. Invitant son collègue de la Santé publique, à accorder son quitus pour les besoins de la cause.

Madeleine Tchuente était engagée dans une communication solitaire

Lequel ministre, en première ligne du combat contre la pandémie, a hésité à accéder à la demande ; avant de céder, en renvoyant à la requérante l’approvisionnement des intrants qu’elle a sollicité du Minsanté. Entre temps, Madeleine Tchuente s’est livré à une autre interview à Naja Tv, la web Tv promue par Jean Bruno Tagne. Une sortie dans laquelle la Minresi s’est encore livrée en spectacle, au sujet de la transmission du Covid entre diverses espèces d’êtres vivants.

De son côté, Manaouda Malachie du Minsanté continue de se montrer plus présent sur son compte twitter, à rendre compte de l’évolution de la maladie au Cameroun, et du niveau de combat que mènent les autorités publiques. Si le public en général salue cette initiative du fantassin placé à la première ligne de front, il reste qu’il est arrivé que des voix s’élèvent pour dénoncer l’angle jugé un peu trop alarmiste du Minsanté. Dion Ngute en a marre de vivre ces sorties visiblement incontrôlées des hommes placés sous sa responsabilité. Et a sifflé la fin de la récréation.

Le Premier ministre prescrit que « les membres du gouvernement doivent faire preuve de retenue et de prudence dans leurs communications écrites ou à l’occasion de leurs interventions orales sur les problématiques relevant de la politique du gouvernement en général, et de la riposte contre le Covid-19 en particulier ». De toutes les façons, Dion Ngute a convoqué tout l’arsenal juridique qui encadre ses prescriptions, pour se prémunir éventuellement contre toute critique.

C’est une sortie pour le moins rare au Cameroun. Le Premier ministre est très souvent considéré par des critiques comme « le premier des ministres ». Au regard du faible poids qu’ils croient déceler en ce personnage généralement nommé le même jour que les ministres dont il est supposé avoir donné son avis parce que « consulté » par le président de la République. Chaque locataire de l’immeuble Etoile a eu ses rebelles. En son temps, Yang Philemon a d’ailleurs été annoncé au bord de la démission, à force de subir le mépris de certains de ses ministres. Le dernier remaniement ministériel de son ère a d’ailleurs été perçu par certains observateurs comme un remaniement-sanction à l’encontre de quelques récalcitrants.

Quand Atanga Nji ramait à contre-courant

Joseph Dion Ngute est désormais et plus que jamais rentré dans la peau du chef du gouvernement que lui confère la loi fondamentale. Dans un contexte marqué par la prééminence du Premier ministre. En effet, depuis la dernière élection présidentielle, le président Biya est de plus en plus absent physiquement sur la scène nationale. Confiant la plupart des responsabilités au Premier ministre : conduite du Grand dialogue national, résolutions de la crise dans le Nord-ouest et le Sud-ouest, conduite de la lutte contre le Coronavirus,… Et jusqu’ici, des dissonances ont souvent été relevées, comme dans le cadre de la gestion de la crise dans les régions dites anglophones : alors que Dion Ngute promettait que la forme de l’Etat allait être inscrite au menu des débats lors du Grand dialogue national, Paul Atanga Nji, le ministre de l’Administration territoriale (Minat), s’était fendu en déclarations contradictoire sur les antennes de Radio France international et France 24. Et sur la crise sanitaire, des velléités de dissonance n’ont pas manqué. Le Chef du gouvernement tient à recadrer ses éléments. Bref, « les activités des départements ministériels doivent s’intégrer dans la stratégie d’ensemble telle que définie par le Chef de l’Etat, et s’exécuter dans un esprit d’ouverture, de franche collaboration de cohésion et de synergie». Paul Biya l’arbitre n’étant pas toujours présent.

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