Réuni à Yaoundé, le Comité de Politique Monétaire (CPM) de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) anticipe un ralentissement de la croissance économique et une poursuite de la désinflation à l’approche de l’année 2026. Ces projections ont été rendues publiques le lundi 15 décembre, à l’issue de la quatrième session ordinaire du CPM.
Présidant les travaux, le gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, a indiqué que la croissance économique dans la sous-région CEMAC devrait s’établir à 2,4 %, contre 2,7 % enregistrés à la clôture de l’exercice 2024. Un tassement qui s’explique, selon l’institution d’émission, par un contexte international toujours incertain et par des contraintes structurelles persistantes dans les économies de la zone.
Sur le front des prix, les perspectives sont en revanche plus favorables. L’inflation devrait reculer à 2,2 % en 2026, contre 4,1 % en 2024. Une évolution qui traduit, selon le CPM, les effets combinés du resserrement monétaire antérieur et de la détente progressive des tensions sur les marchés internationaux.
Concernant les équilibres budgétaires, le gouverneur a annoncé une légère amélioration du solde budgétaire hors dons, attendu à 1,4 % du produit intérieur brut (PIB), contre un déficit de 1,6 % du PIB en 2024. En revanche, le solde du compte courant, dons inclus, se détériorerait pour s’établir à –2,9 % du PIB, après un niveau positif de 0,3 % en 2024.La liquidité bancaire devrait, pour sa part, progresser de 5,1 % pour atteindre 21 977,7 milliards de FCFA à fin décembre 2025. Les réserves de change, en revanche, sont projetées en baisse de 2,6 %, à 6 377,3 milliards de FCFA au 31 décembre 2025. Ce niveau permettrait de couvrir 4,2 mois d’importations de biens et services, contre 4,9 mois en 2024, traduisant une fragilisation de la position extérieure de la sous-région. Le taux de couverture extérieure de la monnaie passerait ainsi de 74,9 % à 67,0 %.
Au plan international, le CPM s’est appuyé sur les perspectives de l’économie mondiale telles que présentées dans le rapport World Economic Outlook du Fonds monétaire international (FMI), publié en octobre 2025. Selon le FMI, la croissance mondiale devrait atteindre 3,1 % en 2026, après 3,3 % en 2024 et 3,1 % en 2025. L’inflation mondiale, quant à elle, est attendue à 3,7 % en 2026, contre 4,2 % en 2025 et 5,8 % en 2024.Ajustement des taux directeurs.
Tenant compte de ces évolutions globales et régionales, le Comité de Politique Monétaire a procédé à un ajustement de certains taux directeurs. Le taux d’intérêt des appels d’offres a été relevé de 4,50 % à 4,75 %, tandis que le taux de la facilité de prêt marginal est passé de 6,00 % à 6,25 %. Le taux de la facilité de dépôt, en revanche, a été maintenu à 0 %. Les coefficients de réserves obligatoires demeurent inchangés, à 7,00 % pour les dépôts à vue et 4,50 % pour les dépôts à terme. Appel à l’accélération de la substitution aux importations.
Au-delà des chiffres, le gouverneur de la BEAC a lancé un appel pressant aux États membres de la CEMAC pour qu’ils traduisent concrètement la politique de substitution aux importations. Selon Yvan Sana Bangui, la dépendance excessive vis-à-vis des importations continue de peser lourdement sur les réserves de change. Il a regretté que certains pays consacrent jusqu’à 1 000 milliards de FCFA par an à l’importation de biens, appelant à des mesures fortes pour stimuler la production locale et soutenir la croissance.
Interrogé sur la question sensible de la rapatriation des réserves de change, notamment dans les industries extractives, le gouverneur a reconnu les difficultés persistantes. Il a révélé que des discussions récentes, notamment à Washington, avec les entreprises concernées, n’ont pas encore permis d’aboutir à des avancées significatives. Selon lui, les négociations achoppent sur des intérêts divergents, certaines entreprises conditionnant leur coopération à une remise en cause de l’immunité de la Banque centrale.
La BEAC n’exclut pas, a-t-il précisé, le recours à un cabinet international de droit pour soutenir ses démarches. Dans un contexte marqué par le ralentissement économique et la pression sur les réserves extérieures, la BEAC mise ainsi sur une combinaison de vigilance monétaire, de réformes structurelles et d’un engagement accru des États pour préserver la stabilité macroéconomique de la sous-région.







