Alors que la hausse du budget du ministère des Arts et de la culture, soit 10,4 milliards de francs CFA fait encore des vagues quant à son orientation chez les artistes, l’annonce du bilan du projet Cameroonian cultural Network-CCN fait l’effet d’une bouffée d’air dans les sphères culturelles. Lancé officiellement en 2022 à Yaoundé, le réseau Cameroonian cultural Network-CCN dans le but de faire tourner des productions artistiques et de fournir un programme de renforcement des capacités pour les infrastructures associées, samedi 06 décembre dernier, les responsables de huit institutions camerounaises et celle de la coopération culturelle européenne avec à leur tête la Délégation de l’Union européenne, étaient face à la presse pour présenter les résultats de l’année 2025. Le chef de projet, l’artiste Grimo (Dzou Mbarga) a planté le décor d’une rencontre ouverte et conviviale.
Cameroun-réseau
Le Cameroun tout entier recèle des pépites qui ont juste besoin d’un accompagnement structuré et ils rayonnent au-delà des frontières. Les huit institutions à savoir: le Clac, le Cipca, Kiki entertainment, Othni-Laboratoire de théâtre de Yaoundé, l’Institut français du Cameroun, le Goethe-Institute, l’ambassade d’Espagne et la Délégation de l’Union européenne au Cameroun. Selon Thekla Worch-Ambara, parlant en filigrane sur la création de ce réseau et son déploiement sur le terrain du CCN 2025, «l’idée du CCN c’est de s’appuyer sur un réseau d’espaces culturelles avant même de parler de propositions artistiques. Il est question de mettre en réseau les différents partenaires, qu’ils se connaissent et qu’ils partagent leurs différents challenges pour avancer ensemble dans l’écosystème culturel local, de donner les possibilités aux artistes locaux de tournées sur le plan national». Elle continue plus loin sur les résultats élogieux enregistrés depuis la création du réseau. Les arts choisis cette année sont la danse, le théâtre, la musique, les arts visuels, les arts déclamatoires. Avec remarquablement Débora Yawdam, laureate avec son Avec son exposition de tableaux basés sur les violences conjugales. À travers le CCN tour, on a pu faire un décompte extraordinaire.
Les chiffres parlent avec force et arguments: 130 représentations, 10 régions, 14 espaces culturels locaux hors des instituts diplomatiques; 30 artistes. La plateforme avait quelques difficultés à couvrir les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (NoSo). Elle a réussi au cours de l’édition 2025, à couvrir avec des artistes tels le groupe Motanni venu de Bamenda dans le Nord-Ouest.
Des cités d’art
Avec un budget de 70 000 euros en 2025 (un peu plus de 45 millions Fcfa), le dispositif fabrique une cartographie sur le plan national. « Nous voyons que les artistes n’ont pas toujours eu des expériences avec d’autres villes ou communautés», poursuit-elle d’un ton satisfait. Le CCN a eu une belle idée de créer des collaborations avec des espaces étendus sur le territoire avec des dispositifs d’acceuil des productions artistiques variés. Cette édition a également été marquée par un élan vers une diversité de disciplines et de cultures accrue, rassemblant des artistes issus de plusieurs régions et aires culturelles: Nord-Ouest, Nord Cameroun, Littoral et même du Centre. Tous ont contribué à enrichir la programmation des espaces retenus dans cet ecosystème de diffusion nationale. Certains artistes comme Nda Chi ou Emmanuel Barka, une richesse musicale sans frontières, portée par des valeurs de partage, de tolérance et de créativité. Les lieux sont choisis dans les villes à part des centres culturels d’envergure, mais aussi des sites ou les institutions de la coopération. On retrouve les artistes qui ne sont pas toujours populaires, mais qui répondent à un spectacle professionnel exportable. Le CCN est clairement le seul au Cameroun qui permet aux artistes d’avoir un réel accompagnement et de se produire plusieurs fois dans diverses villes. L’équipe de ce dispositif a sillonné les villes et le milieu artistique pour comprendre l’environnement et les préoccupations liées à la production des artistes. A part certains instituts qui peuvent garantir au plus deux diffusions par production.
Professionnalisation et publics
Outre les tournées, le dispositif forme les artistes au montage de leurs projets de tournées, de dossiers professionnels de leurs productions. Les institulés de formation et des débats, ont permis d’enrichir les background des artistes et même des espaces qui les accueillent. Les artistes Cie Tchina, Emmanuel Barka et autre Nda Chi ont pu profiter de ces formations et ce dispositif pour avoir de nouveaux contrats. Ces artistes à travers leurs productions de qualité, le public a repris avec les salles dans ces différentes villes. Charles Kamdem, chef de file du CCN scande ce travail de fond sur les publics. Car la multitude des spectacles a drainé vers les salles depuis la mise en place du dispositif plus de 3 800 spectateurs cumulés. Au cours de la rencontre avec la presse, l’enjeu politique a aussi été relevé. Dans son discours de circonstance, le chef de la Délégation de l’Union européenne au Cameroun, Jean-Marc Chataigner, a rassuré sur le soutien de ce projet qui permet la valorisation de la culture camerounaise et de dresser des ponts de coopération entre les institutions européenne et camerounaise. Ce jeu politique demande également de la contribution au niveau bilatérale.
Dans les échanges, il a été dit que le bilan est impressionnant. Le projet est très sollicité mais il en faut plus comme moyens pour accompagner les talentueux artistes. A cela, l’une des conclusions aura été que le dispositif CCN pense à un modèle économique permettant de susciter son autonomie et par conséquent sa pérennité.
Avec Eyangi Boka







