Les Douanes, le ministère des Mines et la Sonamines ont tenu, le 14 octobre 2025 à Yaoundé, une concertation technique en vue d’harmoniser leurs outils de suivi et de contrôle des exportations minières. L’enjeu est d’améliorer les recettes publiques, renforcer la traçabilité des flux de minerai et stimuler la transformation locale des ressources.
Réunis dans la salle de conférences de la Direction générale des Douanes (DGD), les participants ont examiné les mécanismes de mutualisation des ressources administratives et techniques en vue d’un meilleur encadrement fiscal et douanier des exportations de minerai de fer et de bauxite. Cette concertation s’inscrit dans la perspective d’une optimisation des recettes publiques, d’une traçabilité accrue des flux miniers et d’une promotion de la transformation locale des matières premières extractives. Les échanges ont mobilisé les responsables des divisions spécialisées de la DGD— ainsi que les cadres techniques du Minmidt et de la Sonamines.
Au terme de deux heures de discussions, les participants ont convenu de renforcer la synergie opérationnelle entre les trois institutions dans le suivi des opérations d’exportation. Cette approche conjointe doit permettre à l’État de mieux capter les recettes issues des exportations de minerais, d’élargir l’assiette fiscale — c’est-à-dire la base sur laquelle sont calculés les impôts et taxes —, et d’instaurer un système de contrôle intégré couvrant la chaîne d’exploitation, du site minier au port d’embarquement. Selon les services de la Douane, cette collaboration interinstitutionnelle vise également à garantir la prévisibilité des recettes et à sécuriser les données de production et d’exportation.
Des propositions de taux d’encadrement fiscal ont été évoquées, notamment pour les quote-parts de l’État dans la production de minerai de fer, de bauxite et de pétrole brut. Ces propositions feront l’objet d’un examen approfondi avant intégration dans la programmation budgétaire de l’exercice 2026.
POTENTIEL MINIER ET ENJEUX ÉCONOMIQUES
Le Cameroun dispose d’un potentiel minier considérable. Pour le minerai de fer, les principaux sites identifiés sont Mbalam-Nabeba, Kribi-Lobé et Bipindi-Grand Zambi. Le projet Mbalam-Nabeba, transfrontalier entre le Cameroun et le Congo, vise à devenir un pôle majeur de production de fer en Afrique centrale. À Kribi-Lobé, la réserve est estimée à 630 millions de tonnes, tandis que la mine de Bipindi-Grand Zambi, inaugurée en septembre 2025 en partenariat avec le groupe chinois Sinosteel, s’inscrit dans une dynamique de production soutenue. Le potentiel cumulé des gisements de fer du pays est évalué à plus de 3 milliards de tonnes.
Parallèlement, le Cameroun a engagé des projets d’exportation à partir du site de Lobé, sur la côte sud. Concernant la bauxite, utilisée notamment dans la fabrication de l’aluminium, les réserves identifiées dépassent 99 millions de tonnes exploitables sur une période d’environ vingt ans. Les gisements à haute teneur, tels que celui de Minim-Martap, affichent une concentration en alumine (oxyde d’aluminium) de 51 %, pour un potentiel global supérieur à 100 millions de tonnes. À cela s’ajoutent environ 600 millions de tonnes de bauxite ordinaire. Un projet ferroviaire reliant Minim-Martap au port de Douala est en cours de construction pour faciliter le transport de ce minerai vers les installations portuaires.
VERS UNE TRANSFORMATION LOCALE DES RESSOURCES EXTRACTIVES
Au-delà de la fiscalisation des exportations, la concertation du 14 octobre a mis en avant la nécessité d’une transformation locale des minerais, en cohérence avec la Stratégie nationale de développement 2020-2030 (SND30). Cette stratégie, qui place la transformation industrielle au cœur de la croissance, prévoit que les matières premières camerounaises soient davantage valorisées sur le territoire national avant exportation. L’enjeu, selon les responsables présents, est de créer de la valeur ajoutée, de renforcer la compétitivité du secteur minier et de stimuler l’emploi local. Les participants ont formulé plusieurs recommandations opérationnelles en vue d’une collaboration plus structurée entre les Douanes, le Minmidt et la Sonamines pour le prochain exercice budgétaire.
Parmi les principales mesures envisagées figurent la création d’une base de données commune destinée à améliorer le suivi des exportations minières, l’harmonisation des procédures de déclaration, de taxation et de certification, ainsi que l’instauration de taux d’imposition spécifiques pour les minerais stratégiques. À cela s’ajoute un volet crucial de renforcement des capacités techniques des agents chargés du contrôle des exportations, dans le but de garantir une meilleure traçabilité et une régulation plus efficace du secteur. Ces mesures, attendues dès 2026, devraient consolider la gouvernance du secteur extractif et permettre à l’État de mieux capter les revenus miniers, tout en encourageant une industrialisation fondée sur la transformation des ressources locales.