Défis Actuels : Monsieur le Ministre, dans le contexte de mise en œuvre de la politique d’import substitution, quelles sont les mesures prises par votre département ministériel en soutien à cette dynamique ?
ACHILLE BASSILEKIN III : De prime abord, il convient d’indiquer que le Gouvernement a fait de la politique d’import-substitution et de promotion des exportations, un axe majeur de la Stratégie Nationale de Développement 2020-2030. Bien plus, au cours de son adresse à la Nation le 31 décembre 2022, le Président de la République S.E Paul BIYA a réitéré avec emphase cette vision quand il déclare, je cite : « Nous devons nous atteler à réduire nos importations et à accroître le volume de nos exportations en augmentant la production locale, si nous voulons relever le défi de la croissance ». A l’écoute de cet extrait, le département ministériel dont j’ai la charge a été davantage conforté dans les initiatives opérées au cours de l’année 2022, dont les objectifs étaient en droit fil de cette prescription présidentielle. En effet, le MINPMEESA a réalisé des études dans les secteurs sanctuaires de l’Agro-industrie, des Forêts-Bois ainsi que du Coton-Textile-Confection-Cuir, qui ont permis de comprendre les difficultés rencontrées par les PME, les Unités de l’Économie Sociale et les artisans (PMEESA) opérant dans lesdits secteurs.
Au terme des études conduites, les actions ci-après ont été entreprises : Pour ce qui est du secteur de l’Agro-industrie, il a été mis en place un Programme. Il s’agit du PAD-PME qui est une mutation de l’ancien PACD-PME. L’objectif de ce Programme est de contribuer au développement d’un tissu compétitif de PME de transformation et de conservation des produits locaux, à travers un appui technique visant à rendre bancables leurs projets et à leur apporter un accompagnement pour l’accès au financement, en vue de l’acquisition des équipements et des outils de production modernes.
En ce qui concerne le secteur Forêt-bois, le MINPMEESA a entrepris d’accompagner les Communes d’Edéa, Lomié et Sangmélima à la mise en place des parcs industriels spécialisés bois (PIS-bois), afin de favoriser la transformation poussée des grumes et de rendre disponible les produits comme les meubles, les panneaux et les portes. S’agissant du Coton-Textile-Confection-Cuir, le département ministériel s’est engagé dans un vaste chantier pour sa structuration autour de certaines CTD, à l’effet d’accompagner nos cibles dans l’installation des Zones Économiques Spécialisées. De façon générale, en termes d’accroissement de l’offre des produits manufacturiers Made in Cameroon, un peu plus de 3.384 PMEESA ont été mis en réseau, dans un écosystème de production plus structuré et dynamique à travers le renforcement des capacités techniques de leurs interprofessions.
Enfin, il convient d’ajouter que plus de 500 PME et artisans ont été accompagnés à la normalisation et à la certification des procédés de production, d’étiquetage et d’emballage avec pour objectif, d’accroître la visibilité de leurs produits ainsi que leur compétitivité sur les marchés locaux et internationaux.

Défis Actuels : L’entrepreneuriat jeune est une de vos priorités. Comment promouvoir la vocation et l’élan entrepreneurial chez les jeunes ? Quelles sont les mesures mises en œuvre dans ce sens par le MINPMEESA ? Et quels en sont les premiers acquis ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Au MINPMEESA, nous avons fait de l’entrepreneuriat jeune l’une de nos priorités stratégiques, en adoptant une approche multidimensionnelle pour promouvoir les jeunes entrepreneurs. Ainsi, nous avons accéléré :
- Le Renforcement des capacités/formation-accompagnement sur mesure avec le déploiement des programmes comme EMPRETEC, PE2MJ, PMTIC, etc., qui offrent des modules de formation certifiant en esprit d’entreprise ciblant les jeunes.
- L’accès aux financements innovants, d’une part avec des dispositifs de fonds d’amorçage comme le Fonds-Proto, les subventions aux structures d’incubation, ou des programmes de cofinancement qui réduisent les risques pour les investisseurs et les banques, permettant ainsi aux jeunes entrepreneurs de réaliser leur projet entrepreneurial.
- Le Renforcement de la culture entrepreneuriale et de l’esprit d’entreprises dont les actions reposent essentiellement sur la formulation des réformes sur les politiques entrepreneuriales (le Programme National d’Incubation –PNI-, le Programme de Promotion de l’Entrepreneuriat chez les Femmes et les Jeunes au Cameroun -PPEFJC-, la formulation du Plan National de Développement de l’Entrepreneuriat au Cameroun -PNaDEC-). Mais aussi, l’accompagnement à la mise en place des structures d’incubation publiques et privées, à l’effet de soutenir la transformation des idées de projets des jeunes en entreprises viables et bancables, la dynamisation des « Clubs entrepreneuriat » dans les lycées et collèges et Centres de formation professionnelle, ainsi que l’organisation de campagnes de sensibilisation, de concours/appels à projets, pour stimuler la créativité des jeunes et le réseautage avec d’autres acteurs. Enfin, l’organisation régulière des évènements scientifiques dédiés tels que le Colloque International sur la diffusion de culture entrepreneuriale organisé en octobre 2024, dont les objectifs étaient entre autres de structurer et de diffuser la culture entrepreneuriale dans tous les segments de la société, de renforcer l’écosystème éducatif pour intégrer l’entrepreneuriat dès les premiers niveaux d’enseignement et enfin de créer une masse critique de jeunes créateurs de richesses pour soutenir les ambitions d’émergence du Cameroun. Cette rencontre internationale a eu le mérite de i) mobiliser les jeunes autour de l’entrepreneuriat comme levier d’insertion socio-économique, ii) de renforcer les synergies entre les universités, les incubateurs et les entreprises, iii) d’encourager les jeunes à adopter une posture proactive et créative dans la création d’entreprise.
- Partenariats stratégiques et synergies d’actions avec le Ministère chargé de la jeunesse (MINJEC) où plusieurs leviers de collaboration ont été mis en place à l’instar de la collaboration avec des organismes de formation comme l’AUF, la PNPE d’Edéa pour renforcer les compétences entrepreneuriales des jeunes, la participation conjointe à des programmes gouvernementaux à l’instar de la mise en place du Fonds de Garantie aux Jeunes Entrepreneurs prescrit par S.E.M. le Président de la République, pour faciliter l’accès au crédit bancaire, l’accompagnement des jeunes dans les incubateurs spécialisés en vue de la maturation de leur projet entrepreneurial, sans oublier la valorisation des success-stories pour inspirer les jeunes et renforcer leur engagement à l’esprit d’entreprise. En définitive, je dois dire à date, que ces mesures combinées ont permis d’enregistrer des acquis significatifs et encourageants avec entre autres, une meilleure structuration des cibles et instruments qui promeuvent l’entrepreneuriat (mise en place d’un cadre réglementaire sur l’incubation d’entreprise au Cameroun et cartographie de 91 structures d’incubation (22 publiques, 69 privées), un accroissement du nombre de projets de jeunes financés, un renforcement des compétences techniques et managériales (plus de 42000 jeunes bénéficiaires), ainsi qu’une croissance tangible du nombre de création d’entreprises et d’emplois générés par les jeunes entreprises (21132 entreprises créées en 2024 contre 19651 en 2023, dont 9488 par des jeunes). Ce modèle intégré de politique, qui combine financement, formation, incubation et partenariats, doit permettre de consolider ces initiatives sur le moyen terme pour positionner le Cameroun parmi les pays les plus innovants et compétitifs en matière d’entrepreneuriat jeune. Ceci, grâce à la présence d’un véritable écosystème entrepreneurial, capable de rivaliser avec les standards internationaux tout en répondant aux réalités locales.
Défis Actuels : Quelles solutions mettez-vous en place pour lever les obstacles au financement des PME, TPE, artisans ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Le MINPMEESA met en œuvre plusieurs solutions innovantes et structurantes pour lever les obstacles au financement des PME, TPE et artisans au Cameroun. Celles-ci visent entre autres à réduire les délais de paiement, améliorer la solvabilité des PMEESA, et stimuler leur croissance dans un environnement financier souvent contraignant. C’est ainsi que dans le cadre de la mise en place des mécanismes de financement innovants en faveur de nos cibles, une plateforme numérique nommée BLUPASS a été lancée par le MINPMEESA en 2023, en partenariat avec la Société Camerounaise d’Equipement ciblant principalement les PME opérant dans divers secteurs tels que le commerce, la distribution, la fabrication, les brasseries, le transport maritime et l’industrie métallurgique.
Son objectif est de faciliter l’accès au financement, d’aider à l’externalisation de la gestion des créances et la protection contre les impayés, mais aussi d’améliorer le recouvrement des créances pour les TPE et PME camerounaises. Le mécanisme principal utilisé par Blupass est l’affacturage, un procédé financier encadré par la loi n°2014-6 du 23 avril 2014 au Cameroun.
Par ailleurs, il faut noter que le Président de la République, soucieux des difficultés que rencontrent les PMEESA en matière d’accès aux financements, a initié en 2013 la mise en place la Banque Camerounaise des Petites et Moyennes Entreprises (BC-PME). Depuis sa création, la BCPME a réalisé en termes de production de crédit environ 75 Milliards de Fcfa et dispose de près de 4000 PME dans son portefeuille. En outre depuis 2021, un guichet agricole pour le financement des PME agricoles est opérationnel dans cette institution bancaire. Dans la perspective de faire de la BC-PME un acteur central du financement des Petites et Moyennes Entreprises, une stratégie de repositionnement est actuellement en cours, visant à renforcer son rôle en tant que véritable banque de développement dédiée aux PME.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de consolidation de ses missions, afin d’élargir son champ d’intervention, de diversifier ses produits financiers et de mieux répondre aux besoins spécifiques des entreprises en croissance. Il convient également de faire mention des lignes de financement en faveur des PME négociées auprès de certains Partenaires Techniques et Financiers (BEI, BADEA-PNUD, BID), à hauteur de 50,9 Milliards de FCFA et qui sont aujourd’hui placées dans certaines Banques locales. Enfin, les start-ups ne sont pas en reste. En effet, ces derniers au regard de leur faible capacité à apporter des garanties auprès des banques qui contraste sans doute avec leur potentiel exceptionnel de croissance sont accompagnés à travers des fonds de prototypage et des fonds d’amorçage avec pas moins de 2,124 milliards FCFA de subvention accordée aux centres d’incubation.
Défis Actuels ; Les petits entrepreneurs camerounais font également face aux problèmes d’accès aux marchés, d’arrimage aux normes, de packaging, etc. Quels soutiens leur apporte le Gouvernement dans ce registre ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Dans le cadre des réponses plurielles du Gouvernement visant l’accompagnement optimal des entrepreneurs, plusieurs actions ont été engagées à travers un processus global qui intègre les questions liées à l’amélioration de la qualité de leurs produits en termes d’accès aux normes, aux packagings et à la certification, aux fins de garantir leur compétitivité dans les marchés locaux et internationaux. Outre les initiatives conjointes que le MINPMEESA mène de concert avec l’ANOR, pour intégrer dans l’esprit de nos acteurs la culture de la qualité et l’accompagnement à la certification et à la démarche qualité de leurs produits, mon département ministériel a signé en 2020, une convention de partenariat avec le Laboratoire National de Contrôle de Qualité des Médicaments et d’Expertise (LANACOME), en vue de garantir l’innocuité des produits en vente destinés à la consommation au Cameroun. Cette convention s’articule autour de plusieurs piliers essentiels à savoir, le contrôle de la qualité, à travers un système national d’évaluation de la conformité des produits de nos entrepreneurs ; le renforcement des capacités institutionnelles nationales de management en la matière ; le développement des compétences locales susceptibles d’accompagner efficacement nos entreprises dans la démarche qualité. S’agissant des aspects liés à l’amélioration du packaging et du conditionnement des produits, l’Agence de Promotion des PME a adressé cette problématique dans le cadre du programme Cameroon Food Packaging and Quality (CAPMACK-Q).
En outre, dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Intégré d’Import-Substitution Agropastoral et Halieutique (PIISAH) en 2025, le MINPMEESA est à pied d’œuvre pour accompagner plus d’une centaine d’entrepreneurs des filières par ledit programme. Cet accompagnement se traduit par des appuis multiformes notamment l’encouragement d’installation d’unités de transformation dans les bassins de production désenclavés, la promotion des zones agro-industrielles pour la valorisation locale des matières premières (maïs, manioc, riz, sorgho, mil, soja, huiles raffinées, lait, produits halieutiques), l’encadrement de nos cibles pour la mise aux normes de leurs produits (hygiène, sécurité alimentaire, certification), l’octroi des subventions en vue de l’acquisition d’équipements de transformation pour les produits locaux (presses à huile, broyeurs, séchoirs, etc.) ainsi que la structuration des interprofessions pour améliorer la gouvernance des filières et la mutualisation des ressources. En termes de perspectives, en ce qui concerne l’appui à la certification et à la normalisation des produits des PMEESA, des réflexions sont en cours pour la mise en place par le Gouvernement, d’un Fond d’appui spécial dédié à la certification des produits des petits entrepreneurs.
Défis Actuels : Où en est la structuration du secteur de l’artisanat et la formalisation des artisans ?
ACHILLE BASSILEKIN III : La politique de structuration de l’artisanat et de formalisation des artisans prend ancrage dans la Loi N° 2007/004 du 03 juillet 2007 régissant l’artisanat au Cameroun. Cette loi définit l’artisanat, l’artisan, l’entreprise artisanale et les métiers des trois secteurs de l’artisanat que sont l’artisanat d’art, l’artisanat de production et l’artisanat de service. Elle précise également les différents services et avantages déterminés par la réglementation en vigueur auxquels les artisans et les entreprises artisanales peuvent prétendre. En outre, le Décret N°2010/2996/PM du 03 novembre 2010 fixe les modalités d’application de la loi précitée, en mettant une emphase sur la structuration du secteur et la formalisation des acteurs. Dans le cadre de la mise en œuvre de toutes ces dispositions, le MINPMEESA de concert avec toutes les parties prenantes a engagé des réflexions qui ont abouti à l’élaboration d’un Plan de structuration des filières dont le processus est en cours de validation dans les Services du Premier Ministre.
En outre, des actions allant toujours dans le sens de la structuration se poursuivent actuellement dans les communes avec le regroupement des artisans dans les différents métiers dédiés, aux fins d’induire le développement de leurs chaînes de valeur, d’améliorer les conditions de travail de cette cible et in fine de mieux capter leur contribution dans le PIB. Les travaux d’élaboration des listes des métiers artisanaux ont abouti à la formulation de la nomenclature des métiers artisanaux qui est également disponible au sein du Département pour appuyer cette dynamique de structuration. S’agissant de la formalisation des artisans, le Département après avoir doté les communes du matériel informatique pour l’enregistrement des artisans par filières et par métiers dans les registres dédiés, a bénéficié de l’appui technique du BIT pour la formulation d’une feuille de route arrimée aux standards internationaux en vue de la formalisation des entreprises artisanales, des artisans et de leurs travailleurs. Par la suite aux fins de réduire l’ampleur du secteur informel chez cette catégorie d’acteurs, le bulletin de formalisation pour les entreprises artisanales a été produit dans les Centres de Formalités de Création des Entreprises (CFCE) et dans les Bureaux Communaux des Artisans (BCA) en ce qui concerne les artisans.

En outre, en vue d’optimiser les résultats de cette démarche, le MINPMEESA a doté les Mairies de 850 guides pratiques de l’agent communal chargé de l’enregistrement des artisans dans les BCA. Par ailleurs, un manuel d’accompagnement des artisans à la tenue de la comptabilité simplifiée, conformément à l’une des recommandations de la loi OHADA, relative au processus de formalisation a été produit pour une gestion harmonisée et transparente de l’activité de ces derniers. Enfin, une étude sur la mise du plan « train MyGeneration » a été réalisée et des démarches sont en cours auprès des partenaires au développement pour la certification technique des travailleurs du secteur informel en vue de garantir une migration réussie de ces acteurs dans le circuit formel.
Défis Actuels : Quelle politique de promotion de la sous-traitance au bénéfice des PME camerounaises ? Et quels sont les premiers résultats ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Avec la promulgation récente de la Loi n°2025/010 du 15 juillet 2025 portant régime de la sous-traitance au Cameroun, l’activité de la sous traitance a connu un tournant décisif pour le développement et la protection des PME camerounaises. En effet, cette loi s’inscrit dans une logique de souveraineté économique, en cohérence avec le PIISAH et la politique d’import-substitution, visant à renforcer les capacités locales et à réduire la dépendance aux multinationales. Sur le plan de la protection juridique et contractuelle des PME, elle assure un encadrement strict des contrats de sous-traitance en définissant clairement les obligations des parties, les modalités de rémunération et les sanctions en cas de non-respect.
Un point d’honneur est également mis sur la préférence nationale obligatoire où désormais tous les projets structurants doivent prioriser les PME locales (au moins 51 % de capital détenu par des nationaux). En outre, cette loi assure la sécurisation financière des PME avec notamment l’exigence de l’avance obligatoire de 30 % avant démarrage des travaux, versée par l’entreprise principale à la PME sous-traitante, un délai de paiement plafonné à 60 jours ouvrables, avec un maximum légal de 90 jours, les sanctions financières en cas de retard de paiement : pénalités administratives et intérêts moratoires. Il faut noter également le renforcement de la compétitivité des PME à travers le transfert de compétences technologiques des grandes entreprises vers les PME, l’accès facilité aux marchés publics et privés, avec obligation de publication annuelle des montants versés aux sous-traitants, sans oublier les incitations fiscales et douanières pour les PME engagées dans la sous-traitance. Les premiers résultats de la mise en œuvre de cette loi pourront s’observer à travers l’amélioration du climat des affaires relativement aux aspects liés à la transparence dans les marchés de sous traitance où désormais les entreprises publiques et privées sont tenues de publier la liste de leurs sous-traitants et les montants versés, renforçant la traçabilité et la confiance.
Avec cette loi, on pourra également observer la hausse des opportunités d’affaires pour les PME locales dans les projets d’infrastructures, grâce à l’obligation de réserver 40 % en valeur des prestations de ces projets à la sous-traitance locale. On pourra également observer la diminution des préfinancements forcé par les sous-traitants, évitant ainsi des faillites liées aux retards de paiement.
Défis Actuels : Quels sont les buts et contenus de la convention de partenariat entre votre département ministériel et le réseau des Maires du Cameroun pour l’Economie Sociale et Solidaire ? Avons-nous déjà quelques retombées ?
ACHILLE BASSILEKIN III : La transformation structurelle de l’économie est au cœur de la SND30 où il est question pour le Gouvernement d’actionner tous les leviers qui concourent à l’atteinte de la vision d’émergence du Cameroun. Le secteur de l’économie sociale et solidaire n’est pas en reste. A cet effet, le MINPMEESA s’emploie à structurer les acteurs par le biais de leur mise en réseau et des accompagnements divers, afin de booster la création de plus de richesses et d’emplois porteurs de croissance. C’est donc dans cette perspective et au regard de l’ancrage territorial des organisations de ce secteur que nous avons signé le 22 juin 2023, une convention de collaboration avec le Réseau des Maires du Cameroun pour l’Economie Sociale et Solidaire (REMCESS).
Ladite convention fixe les modalités de collaboration entre le département ministériel dont j’ai la charge et le REMCESS en matière d’encadrement des acteurs, de promotion et de développement de l’économie sociale. Les domaines de collaboration couverts par ladite convention sont entre autre, l’appui à l’enregistrement, à la structuration, à la professionnalisation et au renforcement des capacités des Unités de l’Economie Sociale (UES) ; le soutien au développement des structures d’accompagnement et des dispositifs territoriaux d’appui à l’innovation et aux entreprises sociales ; l’encadrement et la promotion des activités des réseaux locaux d’économie sociale et l’échange d’informations et renseignements utiles à la mise en œuvre conjointe et satisfaisante des activités prévues par la convention. En ce qui concerne les retombées, elles sont nombreuses. Nous pouvons citer entre autres, la Co-organisation entre mon département ministériel, le REMECESS et d’autres acteurs de l’économie sociale du Tout premier Forum Africain de l’Economie Sociale et Solidaire (FORA’ESS), du 28 au 30 mai 2024 au palais des congrès.
Forum qui nous a permis de mettre en lumière le modèle Camerounais de structuration auprès des 2000 participants venus de 32 pays d’Afrique et d’ailleurs. Cette dynamique de structuration en elle-même constitue également un résultat positif à mettre au crédit de cette convention, dans ce sens qu’à travers nos efforts conjoints, nous avons pu mettre en place 316 Réseaux Locaux d’Economie Sociale (RELES) au niveau des communes, 54 Réseaux Départementaux (REDES) et 09 Réseau Régionaux (RERES). Nous pouvons également souligner comme résultat positif de cette convention, une appropriation par les maires du concept de l’économie à travers des sessions de formations que nous organisons de manière conjointe à leur endroit chaque année. Il est également à souligner l’organisation des marchés dont la prise en charge des acteurs est assurée par les CTD.
Défis Actuels : Une de vos missions consiste en la constitution d’une banque de données et de projets à l’intention des investisseurs dans le secteur des Petites et Moyennes Entreprises et de l’artisanat. Quelles sont vos réalisations dans ce domaine ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Il faut souligner que le MINPMEESA a mis en place en 2021 une plateforme en ligne de gestion de la banque des projets. Cet outil centralise les besoins en financement exprimés par les PMEESA à travers des projets. Les projets inscrits dans cette plateforme font l’objet d’un accompagnement à la maturation à travers les services internes du MINPMEESA et ceux de l’Agence des Petites et Moyennes Entreprises pour qu’à terme, nous disposions d’un portefeuille de projets crédibles et bancables. Il convient de noter que le MINPMEESA ambitionne à travers la banque de projet de mettre à la disposition des banquiers et des bailleurs de fonds, un outil efficace permettant de réduire l’asymétrie d’information et de connaissance avec les promoteurs des projets, facilitant par conséquence leur accès aux crédits. C’est d’ailleurs dans la perspective d’organiser un écosystème incitatif autour de ladite banque de projet que le MINPMEESA a signé récemment une convention avec la BANGE Bank et d’autres conventions dans ce sens sont à venir dans les prochains mois.
Défis Actuels : Monsieur le Ministre quels sont les principaux indicateurs qui témoignent de la dynamique en cours dans les secteurs des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisanat ?
ACHILLE BASSILEKIN III : Trois principaux déterminants témoignent de la dynamique en cours au MINPMEESA pour renforcer la création des richesses et des emplois au Cameroun :
- La promotion de l’entrepreneuriat innovant et social avec en perspectives l’organisation dans les prochaines semaines de plusieurs activités promotionnelles (Journées Nationales de la PME (JNPME) ; Journée des Micros, Petites et Moyennes Entreprises (JMPME) ; Journées de la Coopération et du Partenariat (JCP) ; Journées Nationales de l’Economie Sociale (JNES) ; Caravanes de sensibilisation des PME en vue de leur adhésion aux CGA ; la Semaine Mondiale de l’Entrepreneuriat au Cameroun (SMEC) ; ainsi que les Salons Régionaux et Départementaux de l’Artisanat. A l’issue de toutes ces activités, il est attendu en termes de densification du nombre des PME, des entreprises artisanales et des Organisations de l’Economie sociale, de porter le stock des PMEESA à 1 000 000 d’unités de production formelles, susceptibles de générer près de 560 000 nouveaux emplois directs. En matière d’incubation, notre ambition est d’inscrire l’activité d’incubation sur la voie de la spécialisation, à travers l’appui à la mise en place de 100 structures d’incubation spécialisées dans les secteurs prioritaires définis dans la SND30. L’objectif ici est de favoriser l’éclosion des PME innovantes du secteur de la transformation afin d’accroître substantiellement la valeur ajoutée manufacturière. S’agissant de la structuration des filières artisanales, il est envisagé la formalisation de plus de 10 filières, 45 corps de métiers et 301 métiers autour d’une Chambre des Métiers de l’Artisanat en vue de mieux valoriser le savoir-faire des artisans et renforcer leur contribution au PIB. En matière d’entrepreneuriat social, le processus de structuration des acteurs en cours sera consolidé, afin de faire des réseaux de l’Economie Sociale de véritables unités de production locales ; l’objectif étant d’aboutir à la mise en place de 360 unités de production collectives dans les Communes.
- La mise en œuvre de la politique d’import-substitution, il est envisagé la mise en place de 03 Unités de Transformation Collective et de 10 petites unités individuelles de transformation agroalimentaire dans les Collectivités Territoriales Décentralisées, afin d’accroître la production des farines locales, d’huiles végétales, de riz et de lait. Les attentes portent sur 8611 tonnes de farine locale, 6965 tonnes d’huiles, 5400 tonnes de riz et 1440 tonnes de lait par an. Le Ministère entend également consolider le dispositif de soutien à la normalisation et à la certification des produits transformés par les PMEESA, et accompagner leur arrimage aux normes dans des filières clés telles que le maïs, le riz, l’huile de palme, le blé, le mil, le soja, le lait et les produits halieutiques. L’objectif étant d’accompagner 200 PMEESA au processus de certification de leurs produits. En outre, le MINPMEESA apportera son appui à l’implémentation d’une Zone Économique Spécialisée au niveau communal dans la Région de l’Adamaoua, dédiée à la transformation du coton. Plus de 3500 emplois sont envisagés ainsi que la production du textile et du fil pour le marché local. De même, la mise en place de Parcs Industriels Spécialisés dans la transformation du bois dans les Communes de Lomié, d’Edéa et de Sangmélima, permettra d’envisager la création de près de 16 000 emplois ainsi que le développement de chaines de valeur de la filière bois pour créer de la Valeur Ajoutée Manufacturière.
- L’amélioration de l’accès au financement, il sera principalement question d’intensifier le plaidoyer auprès des institutions et partenaires financiers en vue de la mise à disposition des banques commerciales de lignes de financement au profit des PME ; d’œuvrer à l’opérationnalisation rapide du Fonds de promotion des PME et à la mise en place du Fonds spécial d’appui à la certification des produits locaux transformés par les PME ; de favoriser la mise en place des dispositifs légaux pour l’opérationnalisation des mécanismes des financements innovants et verts ; et d’accompagner la création et l’opérationnalisation de la Société de gestion des Fonds de garanties des crédits en faveur des PME.
Propos recueillis par François BAMBOU