Le Cameroun veut réduire une facture d’importations de produits laitiers estimée à 35 milliards FCFA par an. Pour y parvenir, le gouvernement à travers le ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries Animales (Minepia) accélère le déploiement de sa politique d’import-substitution en dotant les acteurs de la filière laitière d’équipements modernes et en leur ouvrant un accès facilité au crédit à travers un partenariat signé avec la Bange Bank Cameroun. L’objectif est de combler l’écart entre une demande nationale évaluée à 630 000 tonnes de lait par an et une production locale qui plafonne à 180 000 tonnes, en grande partie autoconsommées dans les zones pastorales. Résultat, les métropoles comme Douala et Yaoundé restent tributaires des importations de lait en poudre, crème, beurre et yaourts.
« Le marché est là, le potentiel est là, la balle est dans votre camp », a insisté le ministre de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales, Dr Taïga, lors de la cérémonie. Selon lui, l’appui de l’État s’inscrit dans la continuité de la vision présidentielle d’une « agriculture de seconde génération », moderne, productive et créatrice de valeur ajoutée. Il rappelle que cette dynamique a déjà permis au pays d’atteindre l’autosuffisance en volaille et en porc, autrefois massivement importés.
Un plan d’investissement structurant
La relance de la filière laitière s’appuie sur deux leviers majeurs : le Plan national de développement de la filière laitière, estimé à 305,6 milliards FCFA sur dix ans, et le Plan intégré d’import-substitution agropastoral et halieutique (PIISAH) pour la période 2024-2026. Des mesures fiscales incitatives, telles que l’exonération des droits de douane sur les équipements de production et de transformation, visent à alléger le coût des investissements. Sur le terrain, l’État multiplie les actions concrètes : distribution de trayeuses, tanks réfrigérés, ensileuses, écrémeuses et barattes, importation de génisses de race montbéliarde pour l’amélioration génétique, mise à disposition de cryo-générateurs pour l’insémination artificielle, et inauguration d’une unité de production de lait UHT à Ngaoundéré.
Une filière en quête d’investisseurs privés
Le gouvernement entend aussi mobiliser le secteur privé. Il propose la gestion de 35 centres de collecte et mini-laiteries, construits par des projets publics mais encore sous-exploités, aux investisseurs prêts à les remettre en activité. Le but est de bâtir une industrie nationale capable d’approvisionner les grands centres urbains et de viser les marchés de la sous-région. Pour accompagner cet essor, la Bange Bank a lancé une offre dédiée, « Agribanking », orientée vers le financement des filières agricoles et pastorales. « Nous avons créé des produits financiers adaptés aux besoins des producteurs et transformateurs de lait. La banque doit se mettre au service des populations pour leur permettre de produire », a affirmé son représentant.
Un levier économique et social
Au-delà de la souveraineté alimentaire, la relance de la filière laitière porte un enjeu économique et social majeur : réduire le déficit de la balance commerciale, créer des emplois dans la production et la transformation, et stimuler l’entrepreneuriat rural. En misant sur une meilleure organisation de la chaîne de valeur et sur l’investissement privé, le Cameroun espère transformer son potentiel laitier encore sous-exploité en véritable moteur de croissance inclusive.