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Investissements publics : 123 milliards FCFA de surcoûts en 2022 dus aux retards d’exécution

Le FMI révèle, dans son rapport sur la 7e revue du programme économique avec le Cameroun, que ces importants surcoûts sur une vingtaine de projets financés par des ressources extérieures entre 2012 et 2020, sont dus à une préparation insuffisante, un suivi défaillant et des retards de décaissement.

Au Cameroun, l’exécution tardive des projets d’investissement public engendre des surcoûts massifs. D’après les dernières analyses du Fonds monétaire international (FMI), publiées courant juin dans le cadre de la septième revue du programme économique entre le Cameroun et l’institution de Bretton Woods, les retards accumulés dans la mise en œuvre de 20 grands projets financés sur ressources extérieures ont généré environ 123 milliards de FCFA de pertes, soit 0,4 % du PIB et 16,3 % du service de la dette extérieure en 2022.

Ces projets – signés entre 2012 et 2020 avec des créanciers bilatéraux, multilatéraux et commerciaux – couvrent plusieurs secteurs de développement. En moyenne, leur mise en œuvre devait être bouclée dans un délai équivalent à la période de différé d’amortissement, c’est-à-dire le laps de temps pendant lequel le pays ne rembourse pas encore le principal de l’emprunt, généralement parce que le projet n’est pas encore en service. Cette période, censée représenter le calendrier d’exécution, est estimée à six ans dans l’échantillon analysé.

Mais la réalité est toute autre. Trois quarts des projets ont été retardés d’au moins deux ans. À la fin de la période de différé d’amortissement, la moitié seulement des fonds ont été décaissés, et 70 % au bout de dix ans, ce qui signifie que certains projets s’étendent sur plus d’une décennie avant d’être achevés. Ce phénomène touche particulièrement les projets financés par des créanciers multilatéraux, pourtant réputés pour leurs procédures rigoureuses. À peine un tiers des projets financés par les bailleurs bilatéraux et commerciaux ont été réalisés dans le délai prévu, avec des retards plus importants du côté des institutions multilatérales, malgré des différés souvent plus longs (jusqu’à 8 ans).

DÉPENSES GONFLÉES, RECETTES DIFFÉRÉES

Ces retards engendrent des dépassements de coûts importants. Une étude récente (Espinoza et Presbitero, 2022) montre qu’un dépassement de 10 % du calendrier peut entraîner une hausse de 5 % des coûts du projet. En clair, plus un projet prend du retard, plus il devient cher. À cela s’ajoutent d’autres facteurs aggravants tels que la hausse des prix des matériaux (inflation), les frais liés aux interruptions de chantier, ou encore la corruption. Selon certains partenaires techniques, au Cameroun, les coûts réels des projets dépasseraient d’au moins 25 % les prévisions initiales à cause des délais d’exécution. Les pertes ne sont pas seulement comptables, elles se traduisent aussi en manques à gagner pour l’État.

Par exemple, un seul projet d’adduction d’eau à Yaoundé, dont la mise en service a été retardée, cause chaque année une perte de 6,2 milliards de FCFA de recettes budgétaires potentielles, soit un tiers du budget alloué aux filets sociaux nationaux. En dehors de cette conséquence préoccupante, le FMI indique qu’alors que les projets tardent à générer des revenus (taxes, redevances, bénéfices d’exploitation), le service de la dette – c’est-à-dire le remboursement des emprunts – commence. Il faut alors puiser dans les recettes fiscales ordinaires pour honorer les échéances, ce qui crée des coûts d’opportunité.

Ces ressources auraient pu financer d’autres priorités économiques ou sociales. En outre, des commissions supplémentaires sont souvent appliquées sur les prêts non encore décaissés à la fin du différé d’amortissement.

UNE CHAÎNE DE DÉFAILLANCES

L’origine des retards est multiple. Selon une évaluation conjointe (EGIP, 2020), des failles sont présentes à toutes les étapes de la gestion des projets. De la préparation à la sélection et à l’exécution. A en croire le FMI, le cadre actuel ne prévoit pas d’exigences claires pour la maturation des projets, c’est-à-dire leur préparation technique, financière et institutionnelle en amont.

Ce qui, d’après l’institution de Bretton Woods, conduit très souvent à des projets mal conçus, aux coûts sous-estimés, inscrits au budget et financés sans garantie de faisabilité. Elle en veut pour preuve, l’absence d’étude sur le raccordement des infrastructures aux réseaux existants, comme l’électricité ou les routes. Ce qui d’après l’institution a engendré des coûts supplémentaires et des retards dans la mise en service.

L’analyse de la Banque mondiale en 2018 l’avait déjà souligné. Pour limiter les retards et les surcoûts, le FMI recommande de poursuivre les réformes de la gestion des investissements publics (GIP) et des finances publiques (GFP). Il s’agit notamment de renforcer le cadre de préparation des projets ; supprimer les chapitres budgétaires communs qui compliquent le suivi des engagements ; limiter le recours aux procédures budgétaires exceptionnelles peu transparentes ; intégrer les considérations climatiques dans la planification des projets, afin d’assurer leur durabilité. Enfin, le recours à l’assistance technique pour professionnaliser la gestion des projets, améliorer l’exécution budgétaire et maximiser l’efficacité de chaque franc investi est jugé indispensable.

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