Investissements: le marché financier de la Cemac victime de ses coût élevés

Le recours massif au marché monétaire pour le financement des investissements des Etats de la Cemac met en évidence les coûts d'accès élevés aux capitaux sur le marché financier

Le marché financier de la Cemac victime de ses coût élevés

L’évolution des activités des marchés de la dette souveraine dans la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (Cemac) affiche une domination écrasante du marché monétaire sur le marché financier. Selon les statistiques de la Banque des États de l’Afrique Centrale (Beac), on note l’essor des émissions de titres de dette souveraine sur le marché monétaire. On observe aussi un allongement de la maturité des Obligations du Trésor Assimilables (OTA) qui se rapproche de celles des Obligations émises sur le marché financier régional. En 2019, les États membres de la Cemac ont mobilisé 3 121, 48 milliards de FCFA par adjudications organisées par la BEAC (marché monétaire) et 126, 34 milliards de FCFA par syndication sur le marché financier régional. (Figure histogramme). L’aversion au marché financier manifestée par les États de la CEMAC s’explique par la recherche des capitaux à moindre coût. En tant qu’agent économique et compte tenu de la conjoncture économique actuelle, les États se doivent de trouver des ressources financières à bas coût et rapidement disponibles pour faire face à d’importants besoins de trésorerie. Le marché des titres publics organisé par la Beac offre aux États un guichet adapté à leurs besoins de trésorerie. En effet, le cadre réglementaire y autorise des émissions de longues maturités, la célérité de traitement et de réponse aux besoins de financement s’étendent généralement sur quelques jours contre plusieurs semaines sur le marché financier. L’existence d’une contrepartie certaine, essentiellement les banques réduit le risque de l’assèchement des liquidités. On comprend alors mieux, le choix du Cameroun, premier émetteur de la CEMAC de se recentrer sur le marché monétaire. Les autres États de la sousrégion ont suivi la même démarche. L’État du Cameroun a préféré le marché monétaire de la CEMAC pour réaliser des émissions d’OTA d’un montant de 240 milliards de FCFA relatifs au financement des projets d’investissement de l’exercice 2019. Selon Samuel Tela, Directeur de la Trésorerie, la structuration faite par des fonctionnaires du ministère des finances et le recours au marché monétaire a permis à l’État de réaliser une économie de 4,8 milliards de FCFA. Cette performance a d’ailleurs été récompensée par l’octroi de la médaille de Chevalier de l’Ordre de la Valeur à l’équipe des fonctionnaires du ministère des finances l’ayant réalisé. Les États justifient l’abandon du recours au marché financier régional pour financer leurs investissements par le coût élevé d’accès aux capitaux et la durée de la mise à disposition des fonds sollicités. On apprend du Directeur de la Trésorerie du Cameroun qu’en s’adressant au marché financier et en confiant l’arrangement des émissions sus citées à des intermédiaires boursiers, l’État aurait payé en frais financiers, 2,2% du montant global des émissions. Le calcul économique fait par les États de la CEMAC met en évidence le coût élevé des opérations sur le marché financier régional. Les agents économiques s’accordent pour dire que la nouvelle grille tarifaire publié le 10 Mars 2020 par la Commission de Surveillance du Marché Financier de l’Afrique Centrale (Cosumaf) reste dissuasive pour le recours au marché financier régional. Pour preuve, l’atonie qui caractérise ce marché, que ce soit pour les émissions (marché primaire) ou pour les transactions boursières (marché secondaire). En 2019, le marché financier régional n’a enregistré que deux émissions obligataires pour un montant total de 128,34 milliards de FCFA. Il s’agissait d’une émission de dette souveraine du Gabon dénommé « EOG 6,25% net 2019-2024 » d’un montant 126,34 milliards de FCFA et d’une émission obligataire de l’entreprise SAFACAM « SAFACAM 6% HT 2019-2022 » d’un montant de 2 milliards de FCFA. Selon certains experts, l’élaboration de cette grille tarifaire ne s’est pas appuyée sur le calcul du coût de revient d’une émission sur le marché financier qui devrait être plus bas que celui du financement bancaire. On y note aussi la multiplication des coûts liés à des prestations qui pourraient être agrégées pour diminuer les lignes de dépenses à la charge de l’émetteur. Les proportions des taux indiqués par la grille tarifaire du marché financier régional devraient inciter les agents économiques à recourir au marché financier pour leurs besoins en financement, et mettre les intermédiaires boursiers au travail dans la recherche et la réalisation de plusieurs émissions. Au moment où la deuxième phase du projet de fusion des marchés financiers de la Cemac est engagée, et dont l’objet porte sur le développement et la promotion du marché financier régional unifié, il nous semble impérieux d’examiner sérieusement les coûts d’accès aux capitaux sur la place boursière. On pourrait citer l’exemple du marché financier de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (Ueoma qui, malgré son dynamisme, continue de travailler à la réduction des coûts d’accès aux capitaux.

Par Junior Matock ( Défis Actuels 501)

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